L’effondrement de Science po

Science po s’appelait, jusqu’à la Deuxième Guerre Mondiale, l’Ecole Libre des Sciences Politiques créée au début des années 1870 pour former les élites intellectuelles, administratives et économiques françaises dans la perspective du redressement d’un pays abîmé par la défaite militaire contre la Prusse. Jusqu’à 1990, en gros, cette école présentait un haut niveau d’exigence, formait à l’histoire, le droit public et l’économie. Son succès reposait sur un concours d’entrée sélectif et la qualité d’une formation qui donnait accès, toujours par concours, aux plus hautes fonction de l’Etat. Et puis, l’idéologie du nivellement par le bas a fait son œuvre et vandalisé cette formation. Sous la houlette de Richard Descoing dès les années 1990, Science po a été pris de gigantisme, a recruté des promotions considérables et multiplié ses campus, au prix d’un endettement vertigineux. En 2020, la suppression du concours d’entrée, au profit d’un choix par dossier et sur entretien – donc partial – a parachevé cette œuvre de destruction. A l’heure actuelle, le directeur de science po démissionne en raison d’une affaire privée, comme son prédécesseur, sous la pression des étudiants. L’école de la rue Saint Guillaume est bloquée par des militants favorables au Hamas. Une étudiante de confession juive a été maltraitée à raison de sa religion. C’est tout un ensemble dont les dirigeants politiques sont responsables, avec leur obsession du nivellement par le bas, au cœur de leur religion: neutralisation du bac (depuis 1980 mais accéléré avec le contrôle continu, « grand oral », etc.), et de la spécialisation dans les lycées, suppression de la culture générale dans les concours, puis abolition des concours d’entrée à science po, vandalisme scolaire avec le saccage des enseignements du français, de l’histoire, des mathématiques, des sciences destruction de l’Ecole nationale d’administration et des métiers de la fonction publique ou des grands corps de l’Etat. Car le désastre de science po qui apparaît en pleine lumière, fruit d’une idéologie et d’une politique, n’est que la partie visible de l’iceberg. La crétinisation est en marche. L’asservissement de tout un peuple aussi.

MT

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Aide à mourir, la question de méthode

Voilà, disons le franchement, j’ai beaucoup d’idées sur de nombreux sujets mais je n’ai pas de position arrêtée sur l’aide à mourir en soi. Dans certains cas de paralysie totale sans pouvoir bouger le petit doigt, et de souffrance indicible, d’asphyxie progressive, sans aucun espoir de rémission (c’est du vécu pour un proche) pouvoir apporter une aide à mourir au patient qui le demande instamment me paraît être le bon sens. Mais d’un autre côté, le risque de dérive est évident par exemple des pressions familiales pour pousser à une demande d’euthanasie ou des recours à l’aide à mourir en toute autre circonstances comme une grave dépression. L’expérience montre que ce type de circonstances existe aux Pays-Bas ou en Belgique. Mais ce qui est de toute façon intolérable, inadmissible, c’est que ce genre de sujet touchant à la vie humaine soit soumis aux caprices d’un individu en fonction des circonstances politiques, qui n’a pas d’autre obsession que de faire parler de lui à n’importe quel prix et d’occuper le premier rang de l’affiche sur tout et n’importe quoi. Cela est une infamie. Un tel choix de société de long terme engage avant tout les médecins, les autorités morales et religieuses, les représentants élus des Français. Il relève d’une réflexion et concertation de long terme et non d’un bon coup médiatique ou politique à la veille d’une élection. Dans l’idéal, le politique ne devrait pas se saisir d’un tel sujet qui relève d’une relation entre le médecin, un patient dans le malheur absolu et ses proches (cas ci-dessus). Faut-il réellement changer la loi? Peut-être pour clarifier le cadre légal pour des raisons de responsabilité. Ce n’est pas une raison pour faire de cette question un enjeu politique.

MT

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Les accords de Munich, une obsession anachronique (pour le Figaro Vox)

« Hier Daladier et Chamberlain, aujourd’hui le Pen et Orban, nous sommes à Munich en 1938 » a déclaré Mme Valérie Hayer, tête de liste de Renaissance, donnant ainsi le ton de sa campagne des élections Européennes. Le 12 septembre 1938, à Nuremberg, devant une foule fanatisée, Hitler exigeait le rattachement à l’Allemagne des Sudètes, région de la Tchécoslovaquie pays allié de la France et ami du Royaume-Uni. Cependant, à l’issue de la conférence de Munich, le 30 septembre, provoquée par Mussolini comme dernière chance pour éviter une guerre en Europe, Daladier, Chamberlain, le Duce et le Führer signaient deux accords donnant satisfaction à ce dernier. A son retour, le président du Conseil français fut fêté comme un héros. « Ah les cons, s’ils savaient » aurait-il déclaré devant la liesse populaire. Non seulement ces accords de sinistre mémoire n’ont pas sauvé la paix mais ils ont sans doute favorisé la débâcle de mai-juin 1940 en donnant le temps à l’Allemagne hitlérienne de s’armer davantage et d’augmenter sa supériorité aérienne.

Or ces accords de Munich sont devenus, à compter de la seconde moitié du XXe siècle, une référence quasiment systématique voire un outil de propagande des partisans de l’usage de la force armée dans des circonstances qui n’ont strictement aucun rapport avec l’Europe de la fin des années 1930. Plus qu’un mythe, le tristement célèbre compromis du 30 septembre 1938 est devenu une sorte de tarte à la crème qui ne manque jamais de resurgir dès qu’un arbitrage politique est à rendre entre une solution militaire ou négociée.

« La défaite des USA au Vietnam a provisoirement discrédité l’amalgame de Munich, que Lyndon Johnson et son Secrétaire d’Etat Dean Rusk ont invoqué ad nauseam pour convaincre l’électorat américain de la nécessité d’une intervention au Vietnam. Indiscutablement, Munich a propulsé les Etats-Unis au Vietnam » écrit l’historien Jeffrey Record dans un article salutaire, intitulé « Usage et abus de l’histoire » et publié par la revue Politique Etrangère (2005 n°3).

Provisoirement, certes ! Car la même fixation obsessionnelle a resurgi pour justifier la désastreuse intervention américaine en Irak en 2003. « Le néo-conservateur Richard Perle, influent président du Defense Board Policy, citait la leçon de Munich pour justifier la nécessité de la guerre : « Certes, l’action pour renverser Saddam pourrait précipiter l’avènement de ce que nous voulons éviter, l’usage d’armes chimiques et biologiques. Mais le danger qui se présente à propos de ces armes ne fera que s’accroître avec l’augmentation de l’arsenal. Une frappe préventive contre Hitler, au temps de Munich, aurait signifié la guerre immédiate, évitant celle qui est venue plus tard. Plus tard était bien pire… »  Or ces armes de destructions massives n’existaient pas et le mensonge des dirigeants américains de l’époque a plongé le Moyen-Orient dans un indescriptible chaos marqué par l’avènement de Daesh, le massacre de centaine de milliers de personnes dont l’anéantissement des chrétiens d’Irak.

L’abus des comparaisons historiques a pour inconvénient de fausser l’appréciation des tensions contemporaines en appliquant au temps présent des leçons tirées d’une situation sans véritable rapport. Faire des accords de Munich un banal objet de communication politique revient à brouiller la perception d’événements qui surviennent dans des circonstances radicalement différentes de celles de la fin des années 1930. Certes l’usage de la force peut être inévitable selon les circonstances ; toutefois l’anachronisme ou les amalgames absurdes, en brouillant les repères de l’intelligence, en pesant en faveur d’interventions armées qui se sont révélées désastreuses, a sans doute contribué à aggraver le chaos planétaire depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.  

D’ailleurs, Pierre Mendès France fut lui aussi traité de munichois au moment des accords de Genève accordant l’indépendance à l’Indochine en 1954 ; la même injure fusa envers les opposants à la désastreuse et humiliante expédition franco-britannique contre l’Egypte de Nasser en 1956 et de Gaulle lui-même fut traité de munichois pour sa politique d’indépendance algérienne (1959-1962), etc.

De fait, la sempiternelle accusation d’esprit munichois est tout aussi absurde au sujet du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Car 2024 n’est pas 1938. L’Allemagne hitlérienne de la fin des années 1930, fanatisée, se présentait comme une puissance quasiment invincible qui allait terrasser la Pologne en quelques jours et la France (supposément la première armée au monde) en trois semaines… Or la Russie est tenue en échec, depuis deux ans, par la 50ème puissance mondiale. La dissuasion nucléaire est devenue une donnée essentielle du problème, évidemment inexistante en 1938. Le drame des accords de Munich vient en partie de la trahison par la France d’un traité d’alliance avec la Tchécoslovaquie qui n’a pas d’équivalent avec l’Ukraine. Et puis, la Russie actuelle n’est pas animée par l’équivalent de Mein Kampf annonçant la destruction de la France, l’asservissement de l’Europe et les intentions génocidaire du Führer.

 La question qui était posée au moment des accords de Munich était celle de l’entrée en guerre des démocraties pour sauver la Tchécoslovaquie. Or, la question ne se pose même pas aujourd’hui puisque aucun Etat occidental n’envisage d’entrer en conflit direct avec la Russie pour défendre l’Ukraine (par-delà quelques fanfaronnades).  Au paroxysme de l’absurdité, le concept de munichois devrait donc s’appliquer à l’ensemble du monde occidental y compris les plus ardents pourfendeurs actuels de l’esprit de Munich invoqué une fois de plus en dépit du bon sens.

Ce constat n’excuse absolument en rien le régime de Poutine et ne débouche évidemment pas sur une remise en question du soutien occidental à l’Ukraine mais il souligne qu’au moment venu et si les circonstances s’y prêtent, cette obsession anachronique qui repose beaucoup sur une logique de posture – celle de l’antimunichois d’opérette –, ne devra pas faire obstacle à la recherche d’une solution de paix.

MT

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Guerre d’Ukraine, n’ayons pas trop peur (réflexion sur la parole présidentielle)

Hier, les propos du président français ont marqué les esprits à l’issue de sa rencontre avec les chefs de partis politiques: « Nous n’aurons aucune limite dans le soutien à l’Ukraine ». Il était difficile de cogner plus fort. Aucune limite, si les mots ont un sens, implique la possibilité de l’envoi de l’armée français au combat (même seule puisque les USA, l’Allemagne, etc. ont exclu toute intervention), d’une mobilisation générale, des bombardements français de la Russie, et même de l’usage par la France de l’arme nucléaire. J’ai bien dit, si les mots ont un sens: aucune limite. Cette déclaration reprenait en beaucoup plus musclé les mots présidentiels de l’avant-veille sur l’envoi de troupes françaises en Ukraine, non à exclure, qui avait déjà déclenché un formidable tollé en France et dans le monde occidental. Il va de soi que la Russie disposant de 20 fois plus d’ogives nucléaires que notre pays (6000/300), un tel recours aux bombardements voire au nucléaire par la France – aucune limite – signifierait, en quelques minutes, l’anéantissement de notre pays et la vitrification de ses 60 millions d’habitants. Les responsables politiques ont tous réagi au propos présidentiel par le même mot: « irresponsabilité ». En vérité, la rhétorique élyséenne ne doit pas nous inquiéter exagérément. La politique, dans tous les domaines, se caractérise par le découplage entre le réel et le virtuel. Peu à peu, le virtuel, ou le spectacle, le théâtre, le Grand-Guignol, écrase la réalité et s’y substitue. Quand le chef de l’Etat fait ces déclarations, il n’en pense sûrement pas un traître mot. En parole, M. Macron n’a effectivement aucune limite. Mais face au réel, son tempérament le porte plutôt à la prudence sinon à la pusillanimité. Voyez comme il n’a jamais pris le risque de dissoudre l’Assemblée nationale chaotique, une décision à peu près 1000 fois moins grave que celle d’engager l’armée française contre la Russie. D’ailleurs, toute l’histoire montre qu’un dirigeant qui a des intentions offensives ne les formule jamais au grand jour: il prépare son coup en secret. La parole explosive est souvent un mode de compensation d’une fragilité, le masque du désarroi ou de l’indécision. Ces paroles aucune limite sont en parfaite contradiction avec nombre de déclarations, quasi simultanées, selon lesquelles notre pays n’est pas cobelligérant et ne le sera jamais. Cependant, dans le monde virtuel des politiciens au pouvoir, les contradictions n’ont pas d’importance. Alors pourquoi ces déclarations tempétueuses? Les raisons sont de 4 ordres: 1) A la veille des Européennes, ériger le parti présidentiel en défenseur de l’Ukraine contre tous les autres, prétendus « Munichois »; 2) Entretenir l’écran de fumée qui recouvre l’état épouvantable de notre pays (financier, économique, scolaire, sécuritaire, social, etc.) et les échecs du pouvoir actuel; 3) comme pendant la crise sanitaire (« nous sommes en guerre ») maintenir le pays sous la pression de la peur qui annihile la protestation; 4) le tempérament du chef de l’Etat qui le pousse à s’afficher au premier rang – en attendant l’apothéose des JO de Paris. Alors évidemment, ces paroles ne font pas peur aux dirigeants russes tant elles manifestent un désarroi et une indécision, une sorte de chaos mental de leurs adversaires ou ennemis et elles aboutissent à l’effet exactement inverse en leur montrant la fragilité et la division du monde occidental. Et ils ne peuvent qu’en profiter…

NB: ce matin, M. Lecornu: « Il n’est pas question d’envoyer des troupes au sol ». Pour qui nous prennent-ils?

MT

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Bonne ou mauvaise polémique?

Grande polémique d’hier après-midi: la droite et les partis dits nationalistes étaient en ébullition au sujet du dessin des JO de Paris qui remplaçait la croix des Invalide par une flèche et en accusaient le wokisme. Le Sénat était en transe et les orateurs se succédaient sous les applaudissements frénétiques des sénateurs debout. Alors, peut-être est-ce en effet fort critiquable d’avoir remplacé par une flèche la croix sur le dôme des Invalides, même si, franchement, rien de ce dessin baroque ne semble destiné à reproduire la physionomie parisienne. Mais je note que les plus offusqués des sénateurs (ex: M. Karouchi) sont ceux qui se sont soumis par pur conformisme, après l’avoir vivement contestée, à l’inscription de l’ivg dans la Constitution – laissant ainsi dénaturer le sens d’une constitution qui ne devrait être rien d’autre que l’organisation des pouvoirs publics dans le respect de la séparation des pouvoirs et de la démocratie (voir mes billets précédents à ce sujet). Au fond, l’indignation et le lyrisme patriote que suscite ce dessin ont probablement un sens caché. Cela ne coûte pas grand chose de fustiger un dessin et son auteur, illustre inconnu. Cette colère n’est-elle pas un moyen de compenser toutes les lâchetés, les renoncements, la compromission et les preuves d’allégeance au pouvoir macronien sur tous les sujets possibles, la crise sanitaire, les retraites, l’immigration, la complaisance quotidienne envers le désastre financier (dette publique) l’effondrement scolaire, la montée de la pauvreté, les zigzags sur les conflits internationaux, l’incroyable déferlante de violence qui n’intéresse plus personne? Encore une fois SVP, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit: en soi, je n’approuve pas l’effacement de la croix sur le dôme des Invalides pas davantage que ce dessin étrange. Mais je m’interroge sur la nature de cette indignation: l’arbre pour cacher une forêt (de lâcheté)?

MT

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Réédition en format Tempus de la biographie d’André Tardieu (le 7 mars 2024 en librairie)

Les éditions Perrin rééditent ma biographie d’André Tardieu parue en 2019, en format de poche Tempus (9€). Le livre est enrichi d’un abécédaire ou dictionnaire des citations de l’homme d’Etat qui était aussi écrivain, puisées dans toute son œuvre, dont beaucoup tirées de son courrier ou de ses ouvrages inédits. Ces nombreuses citations (environ 200) sont parfois d’une incroyable lucidité voire prophétiques, par exemple (extraits):

Moquerie : Je regarde, je lis, j’écoute et je trouve qu’on se moque du monde à l’excès. On s’en moque à droite. On s’en moque à gauche. On s’en moque partout […] On se moque du peuple français […] Et c’est au peuple français qu’il appartient de décider s’il lui plaît qu’on se moque de lui.

Peuple – Les électeurs responsables ? Responsables de quoi ? Tout se passe en dehors d’eux ! Qu’est-ce qu’ils demandent ? A travailler tranquilles et à vivre tranquilles du fruit de leur travail. En fait, le peuple est le seul élément qui paie pour des fautes commises. Il paye en chômage et en misère les fautes des gouvernements qui ruinent l’économie française. Il paye de son sang les fautes des gouvernements qui déchaînent les guerres inutiles […] Le peuple finit toujours par payer et pourtant ce n’est pas lui le coupable.

Présentation par l’éditeur: Héritier de Clemenceau et de Poincaré, précurseur du général de Gaulle et de la Ve République, trois fois président du Conseil, homme politique et écrivain, André Tardieu (1876-1945) fut l’une des personnalités françaises les plus considérables des années 1920 et 1930.
Personnage complexe, tourmenté, déchiré entre un caractère misanthrope et une profonde générosité, son ambition était de refonder la politique sur l’action en faveur du bien commun. Entraîné par ses intuitions visionnaires, notamment sur le danger hitlérien et l’urgence de réformer la République pour la rendre plus efficace, il fut incompris, détesté et violemment rejeté par la classe politique française, autant à gauche qu’à droite. Accablé par les insultes, les trahisons et l’aveuglement pacifiste, Tardieu a terminé sa vie seul, mais déterminé à mener un combat d’idées pour changer la France en s’adressant à son peuple.

MT

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Panthéonisation, constitutionnalisation, guignolisation

Le vote du Congrès de Versailles , le 4 mars, constitutionnalisant l’IVG, a quelque chose de fascinant du point de vue de l’observateur. Acquis par 780 voix contre 74, les superlatifs n’ont pas manqué: emblématique, historique, une page de l’histoire, la France renoue avec l’universalité, un événement bouleversant, un tournant dans l’histoire de l’humanité etc.

Beaucoup de députés et sénateurs qui étaient défavorables à cette constitutionnalisation ont voté sous la pression médiatique comme ils l’ont déclaré. Il était impossible de résister à la force du courant (lu dans le Figaro). La présidente de l’Assemblée nationale, Mme Yael Braun-Pivet jugeait cette mesure absolument inutile en juin 2022, mais aujourd’hui, au cœur de la cérémonie, elle invoque solennellement sa fierté. Qui aurait l’idée sordide, en un moment aussi solennel, de lui demander des comptes sur cette volte-face aussi abrupte? Et après, vous vous étonnerez du discrédit de la parole politique!

Formidable imposture: dans un tsunami d’emphase, la classe politique est parvenue à réaliser l’amalgame entre la constitutionnalisation – absolument inutile (dès lors que rien ne menace l’IVG en France) comme disait Mme Braun Pivet en 2022 – et l’IVG elle-même. L’invocation de Simone Veil est malhonnête car nul ne sait ce qu’elle aurait pensé de cette constitutionnalisation. L’a-t-elle jamais souhaitée? Non à ma connaissance! C’est donc qu’elle n’en voyait pas l’utilité. Sinon, elle en aurait parlé.

Panthéonisation, constitutionnalisation, guignolisation… Le pouvoir politique donne le sentiment de fuir la réalité dans une grandiloquence quelque peu faisandée. Parfois, en les voyant, avec cet abîme entre la pompe et la situation profonde du pays, on se serait cru à la cérémonie de couronnement d’un quelconque roitelet virtuel.

Mais ce qui prime, c’est la lâcheté, le manque de conviction. Avec tous ces zozos qui étaient défavorables (non à l’IVG, mais au bricolage inutile de la Constitution et l’usage de celle-ci à des fins de communication politique) et finalement votent pour en invoquant la pression médiatique (lu dans le Figaro).

Pour le pouvoir, la montée aux extrêmes dans la grandiloquence est une manière de cliver en traçant une frontière entre les bons – ceux qui les suivent – et les mauvais. Manque de chance, le vote massif du RN en faveur de cette constitutionnalisation brouille quelque peu les cartes en situant les populistes dans le camp du bien dit progressiste. C’est drôle que nul n’ait eu l’idée de dénoncer la connivence entre le camp présidentiel et son alter ego lepéniste.

Elle sert surtout à masquer le réel: la dette publique, la pauvreté, la crise du logement et des urgences hospitalières, l’impuissance sur les tragédies planétaires, l’insécurité et la montée des viols et agressions sexuelles, le chaos migratoire, l’effondrement scolaire et intellectuel… Il est plus facile, pour les politiciens au pouvoir, de pavoiser, de fanfaronner à tout propos, dans la béatitude ou servitude médiatique (sauf quelques exceptions) que de travailler humblement à l’amélioration de la vie des gens et à préparer l’avenir du pays.

Et à gagner du temps: après le temps des cérémonies de la panthéonisation et de la constitutionalisation (ce n’est pas fini!), viendront les élections européennes qui s’engagent finalement assez bien en termes de légende (la lutte héroïque contre « le mal populiste »), puis les JO de Paris , une sorte d’apothéose dans la boursouflure, et après, après… Un petit coup de provocation sur l’Ukraine peut-être, ou une bonne épidémie serait l’idéal. Bref, tenir, jusqu’à fin 2026, et après ce sera autre chose évidemment!

MT

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A quoi sert une Constitution?

« Une Constitution est un ensemble de textes juridiques qui définit les institutions de l’État et organise leurs relations. En France, par exemple, la Constitution définit les rapports entre le Parlement et le Gouvernement, le rôle du président de la République.  » C’est le site officiel du gouvernement lui-même qui l’indique. Oui, une Constitution est le texte suprême qui assure la séparation des pouvoirs et définit le mode de gouvernement ainsi que, en préambule, les quelques principes immuables de la communauté nationale (DDH 1789 etc.). La Constitution n’est pas un outil de propagande et de communication au service du pouvoir politique à l’image de « la constitutionnalisation de l’IVG ». La force de la Constitution tient à sa constance dans le temps, la réformer pour tenir compte des passions conjoncturelles (dues à la remise en cause de l’IVG aux USA – pas en France où nul ne le conteste dans l’opinion ou la classe politique) revient à la banaliser et par conséquent, réduire sa portée. Banaliser la Constitution en faisant d’elle un super-vecteur de réformes sociétales – d’ailleurs purement emblématiques et absolument inutiles – est aussi une manière de favoriser le culte de la personnalité et l’autocratie: le despotisme vaniteux se nourrit de la banalisation, l’abaissement des institutions. L’affaiblissement du cadre juridique de l’exercice du pouvoir ouvre la voie à l’exubérance vaniteuse comme mode d’exercice du pouvoir. Vous comprenez ce que j’essaye de dire? On gouverne selon des règles ou selon les caprices de l’ego quand ces règles sont neutralisées. Or, banaliser – la Constitution – en la triturant revient à l’affaiblir, la neutraliser comme référence suprême de la Nation, cadre de l’exercice du pouvoir et favoriser, aujourd’hui comme demain, l’exubérance autocratique. On est en droit d’avoir honte des députés et sénateurs, non pas les idéologues mais les autres, les lâches, ceux qui sont bien conscient de ce problème de bricolage et banalisation de la Constitution mais qui ont, une fois encore, cédé à la force du courant. Et cette pauvre Constitution de 1958 dont il ne reste qu’un chiffon de papier malléable à merci…

MT

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L’inquiétant procès fait à CNews (pour Atlantico avec Mme Céline Pina)

  1. Ce jeudi 29 février 2024, Maxime Saada ainsi que plusieurs figures de CNews, dont Pascal Praud, Laurence Ferrari, Serge Nedjar et Sonia Mabrouk ont été entendus à l’Assemblée nationale lors d’une commission d’enquête. Quels sont les principaux enseignements de cette journée d’audition ?

Oui, c’est un spectacle hallucinant qui donne une impression d’Etat totalitaire. Car la démocratie repose sur la séparation des pouvoirs, et la presse, qu’elle soit radio ou télévision est bien un quatrième pouvoir. La démocratie est inconcevable sans une presse et des médias indépendants des autres pouvoir, législatif, exécutif et judiciaire.

Nous avons en France une tradition de service public très puissant de la radio-télévision avec France Inter, France 2 et France 3. Ce service public est lui dépendant de l’Etat. Mais à côté, des chaînes privées qui sont, elles, indépendantes. Les radios libres – et donc télévisions libres – ont été instaurées par François Mitterrand en 1981. Auparavant, il existait un monopole de l’Etat sur les ondes. Le principe même est que ces radios et télévisions sont libres dans leur expression. Est-ce cet acquis, qu’il faut bien le reconnaître, nous devons à François Mitterrand en 1981, que l’on veut remettre en cause ? Ce serait un incroyable recul sur le plan des libertés – un de plus.

 2- Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de cette audition? Les représentants de la gauche au sein de cette commission n’ont-ils pas cherché à politiser, à transformer cette audition en procès à charge digne d’un Politburo ?

Aurélien Saintoul (me semble-t-il) s’est moqué de Laurence Ferrari en parlant de son « blabla ». On se demande où sont passés les féministes à cette occasion ! Vous imaginez si une journaliste présumée de gauche avait été traitée ainsi par des parlementaires de droite ?

L’impression qui est donnée est bien celle d’une sorte de procès de Moscou contre une chaîne indépendante. Ce n’est pas à un député de persécuter ainsi publiquement une journaliste en essayant de la ridiculiser. La scène est sidérante, dépasse toute imagination. C’est un procès politique, idéologique.

Ce qui est reproché porte sur le contenu de l’information et des commentaires diffusés sur CNews. Sur un ton digne du temps des commissaires politiques. Il est évident que la tonalité de la chaîne est davantage marquée à droite que LCI, BFMTV et les chaînes publiques. Et que cette tonalité rencontre un succès chez les téléspectateurs qui ne se reconnaissent pas ou moins dans les autres chaînes jugées exagérément stéréotypées. Le succès de CNews est le produit du conformisme et de la pensée unique qui règnent ailleurs. Mais il est aussi évident que, par le contenu de l’information et la personnalité de ses invités, CNews n’est pas plus à droite que France Inter n’est à gauche.

Au fond, ce qui est inadmissible aux yeux des censeurs c’est qu’il existe une chaîne qui s’éloigne de la pensée unique ou du politiquement correct et se permet de poser des questions qui dérangent. Car enfin, nul n’est obligé d’écouter CNews. Si le ton de la chaîne déplaît, on peut tout aussi bien zapper sur LCI ou BFMTV. C’est la liberté de ton, au regard de la pensée unique qui indigne nos censeurs. Qu’est-ce que cette commission d’enquête ? Nous voyons Pascal Praud et Laurence Ferrari traités comme des délinquants face à un tribunal. On est en plein cauchemar.

3- Au regard de cette audition, les censeurs ne préféraient-ils pas en réalité la discrétion de la voie administrative plutôt que les procès publics qui tournent en bérézina pour les accusateurs ? Faut-il s’inquiéter au regard de cette audition sur « l’attribution des chaînes, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre » et que de possibles sanctions soient prises contre CNews ?

Bien sûr qu’il faut s’en inquiéter.  C’est dans le cadre de l’attribution des fréquences TNT pour l’année 2025 que des dirigeants du groupe Canal et des animateurs de CNews sont interrogés par la commission d’enquête parlementaire de l’Assemblée nationale. Or cette audition a pris des allures de procès politique. L’un des moments les plus surréalistes fut l’interrogatoire sur un ton accusatoire des journalistes de CNews pour le traitement par cette chaîne de la situation en Israël. En quoi cela regarde-t-il des députés ayant revêtu la robe de l’inquisition politique ?

Dès lors qu’il existe un média indépendant de l’Etat, le politique, à travers cette commission d’enquête n’a aucune légitimité pour s’ingérer dans le traitement de l’information par des journalistes. Ou sinon, cela signifie qu’on change de régime ! Quelle impartialité quand France 2 traite des mêmes sujets ? Or, le devoir d’impartialité devrait incomber bien davantage au service public, en partie financé par les contribuables, qu’aux chaînes privées par définition indépendantes de l’Etat.

Il est certes évident que les médias sous le contrôle de Vincent Bolloré offrent une tonalité différente des autres qui n’a rien de fascisante mais ouvre des espaces de non-conformisme et d’expression dite « populiste » qui n’existent plus ailleurs tout en respectant la pluralité des opinions (par exemple avec la participation fréquente de Julien Dray, figure emblématique de SOS racisme et du parti socialiste). C’est cet espace de liberté d’expression que nos censeurs de la commission d’enquête veulent détruire ou refermer au nom du célèbre : « pas de liberté pour les ennemis de la liberté ».  Et le danger est réel.

MT

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Procès Fillon, présidentielles 2017 (à lire, accès libre le Point-extraits)

Le Point: Le 25 janvier 2017, Le Canard enchaîné révèle que Penelope Fillon, officiellement attachée parlementaire de son député de mari – il n’était pas encore Premier ministre –, n’était pas franchement débordée par ce travail, pas plus que par le job de « conseillère littéraire » que son époux avait décroché pour elle à La Revue des deux mondes.

Le jour même de la parution du scoop, le Parquet national financier (PNF) déclenche une enquête préliminaire. « Un service de police » est désigné aussitôt pour enquêter sur ces « emplois fictifs ».

« L’enquête sera menée au pas de charge puisque le parquet en disposera moins d’un mois plus tard », précise Me Briard. Quelques heures après avoir pris connaissance du rapport d’enquête, Éliane Houlette, procureure nationale financière, rédige un réquisitoire introductif, le 24 février 2017. Une instruction est ouverte et, heureux hasard des roulements de service, l’intraitable juge Tournaire hérite du dossier.

Celui-ci travaille dur et il ne lui faut pas trois semaines pour mettre François Fillon et son épouse, Penelope, en examen, le 14 mars. « On est à quelques jours de la clôture des parrainages de l’élection présidentielle », souligne Me Briard. « Il fallait aller vite, l’élection présidentielle approchait », ajoute-t-il. Il se trouve que François Fillon, vainqueur de la primaire de la droite, a été désigné pour être le candidat de son camp.

Peut-on reprocher à la justice de s’être hâtée, elle que l’on dit si lente ? L’excès de zèle, disons plutôt l’ardeur au travail, constitue-t-il un motif de cassation ? Non, bien sûr… Me Briard, qui veut convaincre la haute juridiction que ses clients n’ont pas été poursuivis avec « indépendance » et « impartialité », sort alors sa carte maîtresse : l’enregistrement d’une audition d’Éliane Houlette, entendue trois ans après que l’affaire a éclaté, le 10 juin 2020, par une commission d’enquête parlementaire sur « l’indépendance du pouvoir judiciaire », à l’Assemblée nationale.

François et Penelope Fillon attendent de savoir à quelle sauce le tribunal correctionnel va les manger – trois semaines plus tard, il sera condamné à cinq ans, dont deux ferme, elle à trois ans avec sursis – quand la patronne du PNF, que l’on disait « toute puissante », s’épanche devant la représentation nationale. Elle a des états d’âme et ne se prive pas d’en faire état, se plaignant de la façon dont sa supérieure hiérarchique – la procureure générale Catherine Champrenault – l’a mise sous tension pendant l’instruction de l’affaire Fillon.

Devant la chambre criminelle, Me Briard reprend les éléments les plus saillants de ce témoignage sans filtre que l’on pourrait aussi qualifier de rocambolesque, s’il n’évoquait pas la souffrance au travail dont certains magistrats semblent être victimes. « Quand une personnalité politique est mise en cause, le contrôle est très étroit, je l’ai personnellement vécu dans ce dossier, avec parfois deux ou trois demandes [de remontées d’informations, NDLR] dans la même journée », se lamente Éliane Houlette.

« C’était compliqué, témoigne-t-elle. Le plus difficile était de gérer la pression […] du parquet général, qui nous envoyait des demandes de transmission d’informations rapides et quotidiennes, sur tous les actes que nous pouvions accomplir. Le contrôle était très étroit, la pression très lourde. »

Pour finir, la procureure financière fait état d’une convocation à une « réunion » organisée par sa procureure générale, à laquelle elle se rend avec « trois adjoints ». « Le choix procédural que j’avais fait [une enquête préliminaire] ne convenait pas, “on” m’engageait à en changer et à ouvrir une information judiciaire [condition nécessaire pour mettre un suspect en examen]. J’ai d’ailleurs reçu une dépêche de la procureure générale en ce sens. » Elle s’exécutera sans délai.

Tel un pompier pyromane, Éliane Houlette tentera, quelques jours plus tard, d’éteindre l’incendie provoqué par ses déclarations hautement inflammables, jurant avoir été « mal comprise », ses propos ayant été « déformés ». Mais les enquêteurs le savent bien : un témoin peut toujours se « rétracter », il convainc rarement, surtout quand ses « aveux » ont été enregistrés et filmés.

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« L’envoi de troupes n’est pas exclu »

La déclaration du président Macron devant la conférence internationale de soutien à l’Ukraine ne relève sans doute pas de l’improvisation ou d’une maladresse. Certes elle s’explique essentiellement par l’hubris de son auteur. Mais pour autant, elle marque bel et bien un tournant dans l’approche française du conflit. Le discours officiel, jusqu’à présent, consistait à marteler que la France n’était pas en guerre avec la Russie. Quels que soient les rétropédalages et explications des courtisans, l’envoi de l’armée française ou d’une coalition de l’OTAN en Ukraine marquerait une indéniable entrée en guerre avec participation active aux hostilités et le commencement d’un engrenage. L’idée sous-jacente à ce tournant tient dans l’analogie avec la fin des années 1930. La Russie, comme l’Allemagne hitlérienne, menacerait l’Europe occidentale d’une attaque. Dès lors, l’aide militaire à l’Ukraine se révélant insuffisante pour en venir à bout (ce qui était une évidence dès le départ sauf pour les crétins qui dirigent l’Occident), il faudrait envisager de passer à l’étape supérieure: l’envoi de troupe. Or, cette analyse est fausse ou mensongère. La Russie, isolée, n’a absolument pas le projet (suicidaire) ni surtout les moyens de s’attaquer à l’Europe au-delà de l’Ukraine. Et tout part de ce mensonge, ou de cette stupidité. Comparer la Russie actuelle qui piétine depuis deux ans face à l’Ukraine, 50ème puissance mondiale avant la guerre (probablement beaucoup moins aujourd’hui), exsangue, ayant perdu 1/3 de sa population en quelques années, à l’armée hitlérienne qui a écrasé l’armée française (prétendument la première au monde) en 10 jours, invincible jusqu’à Moscou (décembre 1941), relève de l’aberration et de l’inculture historique, ou juste de la bêtise. Les pourfendeurs de « Munich » dans les médias sont des fanfarons. A chaque conflit (Indochine, Suez, Algérie, Vietnam, Afghanistan, Irak (2003), etc. c’est toujours le même refrain. Les fanfarons traitent les partisans de la paix de « munichois » – mais les mêmes fanfarons, avec le sang des autres, sont bien souvent les premiers à se planquer ou planquer leurs enfants face à un risque pour eux-mêmes. Alors évidemment, après les débâcles irakienne et afghane, un nouveau revers de l’Occident dans le conflit Russie-Ukraine (c’est-à-dire une solution de paix sans défaite militaire russe avérée) serait une humiliation supplémentaire. Mais c’est une autre question. A la suite de cette déclaration, la plupart des pays occidentaux se sont ouvertement désolidarisés (USA, RU, Allemagne, Italie, Pologne, etc.). Ils ont affirmé clairement, en réaction aux propos du président français qu’ils n’enverraient jamais de troupes en Ukraine quoi qu’il arrive. Finalement, tout ceci manifeste l’immense désarroi dans lequel le monde occidental est une nouvelle fois plongé. En tout cas, un joli cadeau et encouragement, au despote de Moscou qui n’en demandait pas tant…

MT

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Remarquable analyse du mode de fonctionnement du macronisme (à lire dans son intégralité, par M. Arnaud Benedetti pour le Figaro Vox)

M. Arnaud Benedetti, directeur de la revue politique et parlementaire: « Il y a une dimension profondément factice dans le macronisme. C’est ce qui pose problème au demeurant et qui risque le moment venu de se payer au prix fort. Il existe des institutions, il existe des procédures, il existe des corps intermédiaires dans une démocratie. Emmanuel Macron affaiblit tout cela par sa pratique. Connaissez-vous beaucoup de présidents sous la Ve République qui aient souhaité qu’une loi dont ils sont à l’origine soit censurée par le Conseil constitutionnel ? C’est pourtant ce à quoi s’est prêté l’actuel chef de l’État, montrant ainsi une désinvolture sans précédent avec l’usage institutionnel. De même lorsqu’il annonce, depuis un an sans avoir de majorité à l’Assemblée nationale, des initiatives comme les «cent jours», les rencontres de Saint-Denis, «le grand rendez-vous avec les Français», tout est fait en usant d’artefacts communicants pour contourner la seule matrice démocratique dont le Président devrait se soucier dans une démocratie, à savoir la souveraineté populaire, qu’il s’efforce en permanence de tenir à distance et de contourner. »

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Salon de l’agriculture, otage de la politicaille

Le salon de l’agriculture, à l’origine quand il a été créé dans les années 1950, représentait un moment de rencontre populaire entre la profession agricole et les personnes, les familles. Un moment d’unité et pas de polémique ou de division. Au fond il appartient au Français. Il faut beaucoup de vice à certains politiciens pour venir y faire de l’exhibition en vue de paraître dans les médias. Cette obsession de paraître comme des paons devient maladive, psychopathique. Oui, le grand Guignol obscène auquel nous avons assisté ce WE est insupportable. Les dirigeants politiques élus (je parle de tous) ont pour mission de diriger le pays et de préparer son avenir, de préserver son unité et non de le déchirer en toute occasion. Leur raison d’être n’est pas de fanfaronner comme des paons et de répandre la violence et la haine. Le salon de l’agriculture, comme la Nation, en leur appartiennent pas. Ils sont élus en tant que serviteurs du pays. Ce défilé permanent exhibitionniste et provocateur de politiciens qu’ils soient de droite ou de gauche, au pouvoir ou dans l’opposition, à quelque chose d’inadmissible. Ils ont réussi à transformer un lieu de rencontre sympathique en un lieu emblématique de la haine et la division. Est-ce un salon de l’agriculture ou une tribune de propagande? Des familles avec des jeunes enfants qui avaient payé cher leur billet ont dû attendre des heures sous la pluie pour pouvoir entrer à cause du chaos provoqué le grand Guignol. Leur visite a été honteusement gâchée par la pagaille causée par les politiciens présents pour s’exhiber en vue des élections. Vous n’avez que cela à faire? La démocratie consiste à être élu pour faire un travail au service du pays, et non, les uns et les autres, à pontifier devant les caméras et jouer les roitelets arrogants qui déchirent le pays, lui donnent des leçons de morale, montrent sa pire image de division et sèment la désolation. On se croirait revenu aux ténèbres des Mérovingiens, les rois fainéants. Et après, les mêmes s’étonneront de taux d’abstention aux élections qui dépassent les 60%. On s’habitue à tout, mais le spectacle est affligeant, honteux. Alors ils cherchent chacun son bouc émissaire. Mais c’est eux les seuls responsables, les semeurs de chienlit, à se pavaner et provoquer les haines plutôt qu’à travailler au bien du pays. Mettez-vous au boulot et foutez-nous la paix!

MT

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Le salon de l’agriculture, un emblème illusoire et politisé (Pour le Figaro Vox)

Chaque année, le salon de l’agriculture s’impose comme une manifestation populaire où se pressent des familles de tout milieu mais aussi un événement politique majeur, notamment à la veille d’élections. Le déplacement ultra médiatisé du chef de l’Etat à la porte de Versailles a pris, à chaque mois de février, une dimension rituelle. L’image d’Epinal de Jacques Chirac, le « président sympathique », flattant le « cul des vaches » et partageant avec des paysans une assiette de charcuterie et un verre de vin rouge, reste gravée dans la mémoire des Français. Le temps de présence consacré au salon de l’agriculture est perçu par les responsables politiques comme un levier des sondages de popularité. En revanche, un salon de l’agriculture qui tourne mal peut être désastreux pour l’image présidentielle. La colère des agriculteurs en 2016 contre François Hollande, conspué, sifflé et insulté, a marqué une étape de la descente aux enfers d’un quinquennat. A l’heure où la vie politique s’enfonce toujours plus loin dans la logique d’un grand spectacle narcissique et hors sol, il est absolument impératif de s’y montrer ce jour-là en communion avec la nation et le pays profond que la profession agricole incarne.

Le salon de l’agriculture doit son formidable succès à une réminiscence collective de 1600 ans  d’histoire d’une nation à dominante paysanne et rurale. Jusqu’à la révolution industrielle du XIXe siècle, 80 à 90% de la population vivaient du produit de la terre. Et la part des agriculteurs dans la population active dépassait encore les 40% à la veille de la deuxième guerre mondiale. D’où l’importance phénoménale du salon de l’agriculture pour les présidents français qui rêvent tous d’inscrire leur nom dans la continuité du « roman national ». Il est un moment fort de l’année qui leur permet de s’enraciner dans une illusion de terroir, tout comme les multiples cérémonies mémorielles et autres panthéonisations. C’est pourquoi dans la logique d’une vie politique désormais réduite à n’être, pour l’essentiel, qu’un théâtre grandiloquent, il est fondamental d’apaiser les esprits du monde agricole avant la grand-messe annuelle de février à la Porte de Versailles. A la veille des élections européennes qui se présentent dans des conditions défavorables pour la majorité au pouvoir, cet impératif d’image est particulièrement crucial.

Toutefois, cette sublimation du monde paysan, au cœur de la métropole parisienne, relève de la logique d’un miroir inversé. Le salon de l’agriculture donne une image heureuse, aseptisée et opulente de la vie rurale et de la profession agricole, mais aussi trompeuse. Elle sert à masquer la tragédie du monde agricole qui s’exprime dans toute l’Europe sous forme de manifestations et plus particulièrement en France, gagnée depuis le début de l’année par un virulent mouvement de contestation. Les annonces de M. Gabriel Attal, le Premier ministre, qui répondaient aux revendications les plus immédiates des organisations agricoles, par exemple sur le financement d’aides supplémentaires de l’Etat ou la suspension de nouvelles contraintes liées à la protection de l’environnement concernant l’usage des pesticides notamment, ont certes facilité la levée de barrages sur les autoroutes.

Ces mesures ponctuelles n’avaient pas, pour autant, l’ambition de répondre au malaise profond d’une profession qui cumule les difficultés et les frustrations. Le nombre d’exploitations poursuit son effondrement à la faveur d’une concentration de la propriété agricole. Il n’est que de 400 000 en 2024 contre 800 000 en 1988, un tiers des exploitants ayant plus de 60 ans. Le revenu moyen des exploitants est inférieur au SMIC selon l’INSEE : 1475 € brut en tenant compte toutefois de profondes inégalités. 18% vivent sous le seuil de pauvreté et beaucoup d’entre eux, notamment les petits éleveurs, vivent en marge de la société, privés de vacances et de week-ends, et cumulant les contraintes de la vie rurale pour l’accès aux soins ou la scolarisation de leurs enfants. Accusés d’être des pollueurs par certains mouvements écologistes, ils ne se sentent pas reconnus dans leur mission d’entretien de la campagne et de ses paysages.  La profession compte un suicide par jour d’exploitants poussés au désespoir par des dettes qu’ils ne parviennent pas à rembourser.

Alors, toujours dans la perspective de sauver leur passage au salon de l’agriculture 2024 – une vitrine qui contraste avec la réalité d’une profession – et désamorcer la colère qui pourrait s’y exprimer, les dirigeants au pouvoir prennent des initiatives exprimant une intention de dépasser le stade d’annonces ponctuelles, et, désormais, de se préoccuper en profondeur de l’avenir du métier d’agriculteur. Ils parlent de restaurer « la souveraineté agricole » et le chef de l’Etat lui-même organise « un grand débat » sur le modèle de celui qui avait accompagné la sortie de crise des Gilets Jaunes. 

Cependant, les marges de manœuvres de la politique française sont désormais réduites sur ce dossier (comme sur beaucoup d’autres). L’avenir de l’agriculture se joue largement au niveau de l’Union européenne. La politique agricole commune (PAC) assure en moyenne 74% du revenu des agriculteurs sous forme de subventions (avec de fortes inégalités : 250% pour l’élevage bovin et 4% de l’horticulture). Les grands sujets de l’avenir qui préoccupent la profession se décident au niveau européen, dans un contexte où les décisions essentielles échappent à la souveraineté nationale : l’ouverture du marché européen à l’Ukraine, les négociations de libre-échange avec le Mercosur (« marché commun de l’Amérique du Sud »), le « pacte vert » réputé comme imposant, à terme, des contraintes environnementales supplémentaires aux agriculteurs. Dès lors, le premier devoir de tout responsable politique (actuel ou futur) n’est-il pas de commencer par dire la vérité au monde agricole (sur le possible et ce qui ne l’est plus), plutôt que d’essayer de le séduire avec des gestes ou paroles emblématiques et d’illusoires perspectives, dans un contexte électoral tendu, et plaqués sur le populaire mais chimérique salon de l’agriculture ?

MT

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De crise en crise, de provocation en provocation, le chaos permanent est-il voulu et recherché et si oui, pourquoi?

« Il a fallu faire un choix et l’Elysée n’a pas tardé à faire celui de la FNSEA. Face à l’invitation des Soulèvements de la Terre au grand débat organisé au Salon de l’agriculture en présence d’Emmanuel Macron, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, avait refusé d’y participer. Difficile d’organiser ces discussions sans le syndicat agricole majoritaire en peine crise des agriculteurs et sur leur propre terrain. La présidence est alors revenue sur sa décision et a finalement décidé de ne plus convier les Soulèvements de la Terre à l’événement. Retour sur un rétropédalage diplomatique. » Organiser un nouveau « grand débat » au salon de l’agriculture en y invitant Soulèvement de la terre était, de toute évidence, le moyen le plus sûr de remettre le feu aux poudres. Mais alors pourquoi? Dans quel but? Quel stratégie? Peut-on parler d’une équipe au pouvoir totalement déboussolée? Ou bien d’une recherche volontaire du chaos? Par plaisir ludique de se présenter en sauveur dans la crise? Un mélange des deux? Quand on n’a pas de réponse, il faut bien l’avouer humblement. Mais une certitude quand même: ce régime présidentiel, qui concentre l’illusion du pouvoir sur un seul personnage hors sol, favorise une boursouflure de l’ego et la déconnexion, en dehors de toute procédure de responsabilité et de sanction, conduit au désastre le plus total. Et encore n’avons nous pas encore tout vu.

MT

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Sur la panthéonisation de Missak Manouchian

Ce qui est gênant, dans ce type de cérémonie, c’est le volet récupération. Qu’eût pensé Manouchian, héros de la Résistance ayant donné sa vie pour la libération de la France de sa panthéonisation? Certaines personnalités, par modestie, discrétion ou non-conformisme, refusent les honneurs officiels de type de Légion d’Honneur ou Ordre National du Mérite. Les bénéficiaires de la panthéonisation ne sont plus là pour donner leur avis sur l’honneur suprême qui leur est reconnu et la solennité ou la pompe d’une cérémonie. Mais surtout et pire, la récupération idéologique ou politicienne qui est faite de leur héroïsme et de leur sacrifice soulève des questions. Qu’eût pensé Manouchian de sa récupération dans le cadre du grand spectacle politicien actuel et d’une mise en scène jupitérienne? Nul n’en sait rien. Peut-être eût-il trouvé cela normal ou peut-être cela lui eût-il déplu. Comment savoir? Manouchian, au moment de subir son martyre, pouvait-il imaginer qu’il serait impliqué, quelque huit décennies plus tard, dans une polémique minable, franco-française, en liaison avec les futures élections européennes et le duel honteux macrono-lepéniste. Cette polémique est-elle digne d’un résistant ayant donné sa vie pour la libération de la France? Selon l’historien Stéphane Courtois (Figaro d’aujourd’hui), le parti communiste qui a largement récupéré sa mémoire après 1944, semble avoir eu un rôle pour le moins ambigu à son égard dans la résistance. Pour ne pas en dire plus… Fallait-il, dans ses conditions, donner une interview à l’Humanité, en clin d’œil paradoxal au PCF, et au-delà un clin d’oeil de gauche, à contre-courant de la prétendue « droitisation » et à des fins de communication politicienne? Qu’en aurait-il pensé? Sincèrement, je ne fais que poser des questions, mais il reste que tout ceci n’est pas clair…

MT

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Sur la notion « d’arc républicain »

La notion d’arc républicain s’impose dans le discours politique. Je n’ai jamais considéré que le RN et Reconquête s’inscrivent dans l’arc républicain, déclare le chef de l’Etat le 19 février. M. Mélenchon s’est mis hors de l’arc républicain affirmait de même le président du Sénat. Outre les compétences constitutionnelles dont elles disposent, les plus hautes autorités de l’Etat s’arrogent en quelque sorte une autorité morale qui consiste à délivrer ou refuser le label républicain au sens de digne de participer à la vie démocratique.

La signification de cette notion est cependant brouillée par des gestes d’apparence contradictoire. Le président Macron avait invité le président du RN aux rencontres de Saint Denis au titre de sa grande initiative le 30 août 2023. Il est tout à fait normal d’avoir des discussions avec le RN, ajoutait-il le 9 février dernier. Ainsi, la notion d’arc républicain semble être à géométrie variable, s’appliquer en certaines occasions, mais pas d’autres. A ce titre, elle semble relever d’un usage opportuniste: utile pour exclure par commodité de communication mais neutralisée si nécessaire à des intérêts politiciens.

En vérité, l’arc républicain a été inventé pour figer la vie politique autour d’une vaste coalition centrale composée de la classe politique dite respectable, entourée par deux maudits, à droite et à gauche, LFI et RN, le mélenchonisme et le lepénisme. Cette approche correspond à l’idéal politique macroniste, celui d’une fusion des forces prétendument républicaines, en gros Renaissance et la droite LR et mieux encore avec des écologistes et des socialistes qui auraient rompu avec LFI, autour de la figure glorifiée du chef de l’Etat. Ce schéma rappelle la Troisième force de la IVe République à ses débuts, quand la coalition centrale formée du MRP centriste et de la SFIO socialiste combattait le parti communiste à gauche et le RPF gaulliste (alors considéré comme anti-système) à droite. Il a l’immense intérêt, pour les dirigeants au pouvoir et leurs alliés, de geler pour des décennies le rapport de force dans la perspective d’un pôle central massif et intangible face aux deux extrêmes diabolisés. Il bouleverse le paysage politique français qui reposait depuis 1958 sur un tête-à-tête entre majorité et opposition (droite/gauche) se respectant mutuellement comme républicaines – et rend quasiment impossible une alternance. Telle n’est-il pas le but recherché?

La grande faiblesse de cette approche tient au déni de démocratie qu’elle exprime. Les candidats Mélenchon, le Pen, Zemmour, ainsi écartés de l’arc républicain représentaient environ 52% au premier tour des présidentielles de mai 2022. Cette notion revient ainsi à considérer que plus de la moitié de l’électorat est non républicain, au sens d’illégitime, hors du champ de l’acceptable. Elle aboutit à une situation où une partie du peuple – et même la majorité – est de fait exclue de la République. Elle procède par ailleurs d’une logique qui valorise la pensée unique, une vision monolithique et conformiste de la vie politique: pour avoir le privilège d’être accepté dans l’arc républicain, il convient de penser droit, conformément à une ligne officielle – ou s’en éloigner le moins possible… Par le plus grand des paradoxes, la notion d’arc républicain est fondamentalement anti-républicaine, au sens ou elle foule au pied le fondement de toute démocratie: le libre débat d’idée, le suffrage universel, le respect du peuple.

MT

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Troisième année, l’impasse d’une guerre

1)-Affirmer mordicus qu’une guerre d’anéantissement nucléaire est inconcevable, c’est n’avoir rien compris à la bêtise humaine. Pourquoi inconcevable? L’histoire de l’humanité n’enseigne-t-elle pas que le pire n’est jamais à exclure? Si elle devait un jour avoir lieu quelque part, ce serait sans doute sur le sol de l’Europe, un massacre qui dépasserait par son ampleur toutes les atrocités du XXe siècle, ultime étape d’un effacement de l’Europe qui dure depuis la tuerie de 15 millions d’Européens en 1914-1918, et 2500 ans de civilisation soufflés en quelques instants.

2)-Avec les bouleversement technologiques, la puissance des ordinateurs, Internet, l’Intelligence artificielle, etc. on aurait pu penser que la supériorité technologique de l’occident allait réduire à peu de chose le rôle des combattants et le poids démographique des armées. Nous savons aujourd’hui que la supériorité technologique n’est pas la seule clé de la guerre moderne, n’efface pas la loi du nombre qui, sur le long terme, joue en faveur de la Russie comme elle jouerait en cas de guerre mondiale avec la Chine.

3)-L’un des sujets d’étonnement lié à ce conflit est la faillite intellectuelle des élites militaires et politiques occidentales: a-t-on jamais assisté à un tel déferlement d’erreurs d’analyse et de diagnostic: d’abord (1er semestre 2022) l’armée Russe devait écraser l’Ukraine et déferler sur l’Europe orientale, puis (2ème semestre 2022) l’armée l’ukrainienne était supposée mettre la Russie en déroute et provoquer la chute de Poutine. Rien de tout cela ne s’est jamais produit, tous les pronostics les plus savants déjoués les uns près les autres et malgré le soutien massif de l’occident, la guerre s’est enlisée et rien ne permet aujourd’hui sérieusement de miser sur une issue militaire.

4)-La posture des occidentaux, depuis le début, est incohérente. Elle consiste à dire, nous ne sommes pas belligérants, il est hors de question de faire la guerre directement. Mais nous aidons massivement l’Ukraine à se défendre par des livraisons d’armes et de matériel. Car l’Ukraine, en combattant les Russes, défend l’Europe et l’occident. Cela signifie que l’occident utilise comme bouclier le sang, les ruines, le deuil et à la souffrance de Ukrainiens – mais évidemment sans l’admettre. Et jusqu’où le peuple ukrainien peut-il accepter de payer seul le prix du sang?

5)-la méconnaissance ou l’incompréhension de l’histoire est la source de toutes les aberrations actuelles. Non la Russie actuelle n’est pas l’Allemagne hitlérienne (pas plus que l’Ukraine n’est sous l’influence de « néo-nazis » comme le prétend Poutine), c’est-à-dire une puissance explosive et quasi invincible, déterminée à asservir l’Europe et exterminer une partie de l’humanité. Il fallut trois semaines à l’armée d’Hitler pour venir à bout de la première puissance militaire du monde (ou réputée comme telle) tandis que la Russie de Poutine piétine depuis deux ans face à la cinquantième puissance mondiale. Ceux qui profèrent ce genre de comparaison sont des imbéciles. Elle n’est pas davantage l’équivalent de l’URSS de Staline, de Khrouchtchev ou de Brejnev – dont l’Armée rouge n’eût fait qu’une bouchée de l’Ukraine. Elle est tout autre chose, une tyrannie d’un nouveau genre, ni mieux, ni pire, une autocratie post marxiste du XXIe siècle.

6)-A-t-on jamais vu aussi une telle prolifération du mensonges dans le monde occidental – ou de la propagande? Plus la Russie semble échapper à l’isolement planétaire (Chine, Inde, Afrique), surmonter les sanctions occidentales sur le plan économique et conforter ses gains sur le plan militaire, plus les dirigeants occidentaux, déstabilisés par la tournure des événements, se mettent des œillères et racontent qu’elle est en plein effondrement et Poutine au bord du gouffre. C’est le même refrain depuis deux ans. L’indignation et la colère légitime devant une dictature belliqueuse ne justifient pas le mensonge ni l’abandon d’une logique de réalisme.

7)-Nous sommes aujourd’hui dans une logique de postures. La réalité n’intéresse personne. Il ne faut surtout pas réfléchir ni au passé ni à l’avenir, ni aux issues possibles et crédibles, mais parader dans le discours va-t’en guerre – comme reflet inversé de l’impuissance et du désarroi. La posture martiale et prétendument antimunichoise est toujours avantageuse – avec le sang, les ruines et la souffrance des autres. Et s’il se confirme qu’il n’existe pas d’issue militaire à ce conflit, autre qu’un enlisement, la lente destruction de l’Ukraine et le massacre de sa population, peut-on concevoir un sursaut de lucidité du monde occidental pour s’orienter vers un cessez-le-feu ou une trêve? En attendant l’espoir même lointain d’une réconciliation/démocratisation? Pas du tout certain.

MT

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Notre époque n’aime pas beaucoup la liberté

Autrefois, le mot liberté était au centre de tous les discours politiques. La France se présentait comme le pays de la liberté – contre la dictature. La liberté comptait plus que la vie, ou plutôt, la vie n’avait pas de sens sans la liberté. Et les guerres se faisaient pour la liberté et en son nom. Curieusement, cette valeur suprême de notre pays est tombée en désuétude. Il ne faut jamais oublier l’invraisemblable Absurdistan qui pendant la crise sanitaire, au prétexte de lutter contre l’épidémie, a balayé d’un revers de main les libertés publiques et individuelles, dans un climat de soumission collective sidérant. Sous l’emprise de la peur, les médias, les institutions, y compris théoriquement en charge de la défense des libertés (CE, CC), l’Etat, le pouvoir politique, les partis, tous les courants de l’opinion, l’air du temps ont fait allégeance à l’abolition des libertés dont le laisser-passer (ci-joint) fut l’incroyable symbole. N’oublions jamais. Mais aujourd’hui, sous d’autres formes, le renoncement à la liberté se poursuit dans la société française. Le Conseil d’Etat (billet d’hier), ouvre la voie au contrôle de l’opinion des intervenants à la télévision. L’article 4 du projet de loi sur la lutte contre les dérives sectaires engendre un risque d’une pénalisation des contestations du bienfondé traitements médicaux. La réforme de la loi de 1881 sur la liberté de presse porte à 12 mois (et non plus 3) la période de recevabilité des plaintes pour diffamation et insultes publiques envers les élus (et eux seuls, curieusement)… Une brèche pourrait ainsi s’ouvrir dans ce monument de la liberté d’expression. La liberté prend l’eau de toute part et dans la quasi indifférence. On a envie de dire, pour parodier Churchill: « Vous avez renoncé à la liberté pour avoir la sécurité! Vous perdrez la liberté et la sécurité »! Il serait temps de réagir.

MT

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Cnews, tollé sur une décision du Conseil d’Etat, qu’en penser?

Il est rare pour ne pas dire exceptionnel qu’une décision du CE provoque une telle avalanche de commentaires et autant de colère. Encore faut-il la lire et rappeler les faits. La lire, c’est assez facile! Résumons nous. Saisi par Reporter Sans Frontières à propos de Cnews qui ne respecterait pas les règles du pluralisme imposées à tout média télévisé auquel l’Etat a accordé un accès sur les ondes, le CE exige donc de l’ARCOM (ex-CSA) ou police de l’audiovisuel, dans les 6 mois de prendre des mesures pour assurer la pluralité des opinions, non seulement au niveau du temps de parole des responsables politiques invités, ce qui était déjà le cas en principe, mais aussi de l’ensemble des intervenants sur cette chaîne: animateurs, experts, invités divers, etc. Cette nouvelle jurisprudence, de ce que je comprends, contrairement à ce que disent nombre de commentaires, ne concerne pas seulement Cnews, mais, au-delà du cas d’espèce, toutes les chaînes de télévision, privées comme publiques. Elle soulève une question de liberté mais aussi de cohérence et de réalisme. D’une part, elle prive les rédactions de leur liberté de choisir leurs intervenants. Encore que, notamment sur les chaînes de télé et radio publiques, surtout, une meilleure pluralité des opinions exprimées ne serait pas un luxe… Mais surtout, et c’est ce qui me frappe le plus, elle suppose la mise en place d’une usine à gaz où chaque personne intervenant sur les ondes serait fichée pour ses opinions. Elle revient à nier qu’un intellectuel puisse avoir une opinion purement fondée sur la réflexion intelligente et sans parti pris – inclassable. (Il est vrai qu’à la télévision, c’est plutôt rare). Au prix d’une sorte de Gosplan, il faudrait, selon cette logique, que sur chaque sujet, chaque thème en débat, étiqueter les invités pour leur opinion sur ce thème et s’assurer d’un partage équitable du temps de parole. Et aussi, instaurer un contrôle bureaucratique de cette nouvelle règle. [J’ajoute un point de vue personnel: la mode des débats sur les chaînes de télé en continue, avec toujours les mêmes intervenants grimés en experts ou en chiens savants avec leurs clichés qui tournent en boucle, n’est pas vraiment ma tasse de thé. Mais c’est un autre sujet.]

MT

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CEVIPOF, dégradation de l’image de la politique française, effondrement de la confiance en la démocratie et nécessaire révolution (pacifique?)

L’enquête CEVIPOF, vague 15, sur la confiance des Français envers la politique montre une nouvelle poussée de la défiance et du dégoût envers la vie publique.

  • Seuls 30% des Français (contre 45% des Allemands) font confiance à la politique et 70% ne lui font pas confiance.
  • 31% pensent que la démocratie fonctionne bien (-4%) et 68%, pas bien (+4%).
  • 82% font confiance aux artisans, 79% aux PME, 70% à la police, mais 28% aux médias et 20% aux partis politiques.
  • La politique inspire un sentiment négatif à 74% (dont 37% de la méfiance et 19% du dégoût) et positif à 25%.
  • 81% estiment que les responsables politiques ne tiennent aucun compte de ce que pensent les gens comme eux.
  • 30% pensent que les politiques sont plutôt honnêtes et 68% plutôt corrompus.

Chaque année, cette enquête réalisée sur un échantillon de 4000 personnes représentatives de la population, montre une aggravation du rejet de la politique et de la vie publique par une immense majorité de Français.

Mais le plus phénoménal [selon moi], c’est que cette révolte silencieuse ne suscite pas la moindre réaction du monde politique ou des responsables publics en général. Ces derniers devraient placer au premier rang de toutes les préoccupations le renouvellement démocratique français: l’abolition de la pitrerie élyséenne (au-delà de l’actuel titulaire) et la réhabilitation d’une présidence sobre, guide moral et intellectuel, au-dessus de la mêlée, la réhabilitation de la démocratie parlementaire, du Premier ministre et du gouvernement dignes de ce nom, le rétablissement de la notion de responsabilité – toute décision ou tout comportement est soumis à une possibilité de sanction – le recours fréquent au reférendum pour tout choix essentiel, le renforcement de la démocratie locale – souveraineté communale (tellement bafouée sous couvert de pseudo décentralisation) avec consultation populaire pour tout sujet engageant la vie des habitants, l’impartialité médiatique, la fin du Grand-Guignol et la restauration des principes de vérité et d’intérêt public etc.

Mais tout se passe comme à la fin de l’ancien régime: avec une oligarchie (tout le monde, de l’extrême gauche à l’extrême droite incluses) obnubilée par la préservation de ses prébendes ou la conquête des fromages, indifférente à la détresse et à la révolte qui gronde et ne s’exprime que sous forme sporadique. Pourquoi cette question de la réforme ou de la révolution politique qui devrait être le cœur de toutes les priorités, ne semble intéresser absolument personne, ni les profiteurs au pouvoir ni les oppositions? Parce que tout le monde profite ou espère profiter demain du système. Et c’est pourquoi rien ne bouge…

MT

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Reproduction partielle d’un article très éclairant du site Atlantico sur le droit du sol à Mayotte

La fin du droit du sol ? parlons-en. Une croyance largement partagée (et cyniquement entretenue) veut que la naissance sur le territoire français suffise à obtenir la nationalité française. Tel n’est pas le cas. En réalité, pour bénéficier de la nationalité au titre du droit du sol, il faut être né en France de parents étrangers mais aussi y avoir vécu pendant 5 ans à l’âge de ses 18 ans.

Dès lors, il est à la fois excessif et inexact de faire croire que la perspective de voir son enfant, né à Mayotte, obtenir la nationalité française à l’horizon de ses 18 ans serait le déterminant essentiel des migrations vers cette île française. Quand on embarque dans des conditions périlleuses pour affronter la mer et les vedettes de la gendarmerie, c’est dans l’espoir d’un Eldorado à court terme et sûrement pas, à titre principal, dans la perspective d’une éventuelle acquisition de nationalité pour ses enfants à l’horizon d’une quinzaine ou d’une vingtaine d’années…  

D’ailleurs, la réforme draconienne limitant le droit du sol à Mayotte, adoptée en 2018 dans le cadre de la loi Colomb (avoir un parent en situation régulière depuis au moins trois mois), annoncée comme une clé de la sortie de crise migratoire, n’a pas permis d’améliorer d’un iota la situation sur place. Le mythe du droit du sol comme déterminant de l’immigration à Mayotte (ou ailleurs…) sert de leurre – ou de chiffon rouge –  pour détourner l’attention d’une situation infiniment plus complexe.

En vérité, c’est le différentiel de niveau de vie qui est l’unique déterminant du flux migratoire et qui explique pourquoi environ la moitié des 300 000 habitants de Mayotte (au moins) sont des migrants en situation irrégulière. Le revenu moyen à Mayotte est plus de 12 fois supérieur à celui des Comores : 1500 €/mois contre 135 $/mois. Les habitants d’Anjouan, à 80 km de Mayotte sont dépourvus de tout : hôpitaux, écoles, services publics, eau potable et sont condamnés à la misère dans l’un des pays les plus pauvres du monde. La tentation de gagner l’îlot de prospérité qu’est Mayotte, ses écoles, son hôpital (sur le standard de la métropole), la perspective d’un revenu 12 fois supérieur, est dès lors inévitable !

En revanche, la suppression du visa territorial annoncée en parallèle par le gouvernement, elle, peut exercer une influence considérable, mais dans le sens de l’accueil en métropole…  Car la plupart des titres de séjour délivrés par la France à Mayotte ont aujourd’hui une particularité : ils ne valent que pour Mayotte (à l’exception des titres de résident de longue durée – 10 ans – accordés notamment aux réfugiés reconnus par l’OFPRA). Les titres de séjour de courte durée d’un an ou pluriannuels, distribués à la masse des personnes régularisées, ne permettent pas aux étrangers qui en bénéficient à Mayotte de se rendre en métropole. Les détenteurs de ces titres de séjour doivent en plus demander un visa territorial, accordé par le préfet de Mayotte, pour se rendre en métropole, à condition d’offrir toutes les garanties de leur retour à Mayotte par la suite. Ce dispositif représente une précieuse garantie pour maîtriser l’immigration comorienne, malgache ou africaine en France métropolitaine… Donc, pour alléger la pression migratoire sur Mayotte, la suppression des visas territoriaux pourrait bien créer un appel d’air vers la métropole.

MT

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L’Education nationale, otage du mépris (extrait de mon dernier article pour Figaro Vox)

Or, en quelques mois, la France médusée a assisté à un étrange imbroglio autour de la désignation du ministre chargé de diriger l’Education nationale. Pendant plusieurs années, les Français ont cru pouvoir faire confiance à M. Blanquer, héraut de la laïcité, dont, pourtant, les réformes n’ont fait qu’aggraver la crise du lycée et du baccalauréat. Puis en 2022 est venu M. Pap N’Dyaye, réputé pour des positions favorables au multiculturalisme, dans lesquelles il s’est empêtré. M. Attal lui a succédé pendant 5 mois, s’attirant les louanges d’une majorité de l’opinion par la posture strictement inverse, autour de la condamnation de l’Abaya à l’école – et suscitant par là même un courant d’espérance. Sa remplaçante, Mme Oudéa-Castera n’a duré qu’un mois. La nouvelle ministre Mme Belloudet, est connue pour avoir déclaré quelques années auparavant (au sujet de l’affaire Mila) : « L’insulte à la religion c’est […] grave », sa nomination, en soi, semble marquer une nouvelle inflexion vers la sensibilité multiculturelle. Pour les dizaines de millions de Français, victimes à travers leurs enfants de la catastrophe scolaire, ces péripéties ne peuvent qu’amplifier le découragement sinon l’écœurement. 

MT

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Suite: une maison de fous

M. Bayrou a finalement refusé d’entrer au gouvernement en invoquant une absence d’accord profond sur la politique à suivre. Cette position est difficilement compréhensible. Depuis 2017, M. Bayrou et son Modem sont des soutiens inconditionnels de la macronie – dont ils font partie. Comment peut-il, 7 ans plus tard, s’apercevoir tout d’un coup qu’il existe un désaccord profond sur la politique à suivre. Cette déclaration sous-tend que l’arrivée de M. Attal marque une rupture radicale dans le macronisme. Mais qui peut croire pareille billevesée? Le centralisme autoritaire – que dénonce Bayrou – était annoncé dès 2017 avec le terme de jupitérisme et tout ce qui a suivi: le grand spectacle narcissique, la politique sanitaire liberticide de 2020-2022, l’asphyxie des collectivités locales, la soumission du Parlement, etc.

La vérité est que M. Bayrou a des ambitions présidentielles pour 2027 et qu’il a jugé contreproductif de s’embarquer aujourd’hui avec un équipage voué au naufrage. A cet égard, il manifeste davantage de lucidité que la dernière vague des félons ex-droite LR…

Et puis, nous avons un nouveau sondage qui fait parler de lui: Mme le Pen, au second tour des présidentielles, ferait jeu égal avec Edouard Philippe et battrait M. Attal d’un point. Le monde médiatique est content: un peu de sensationnel ne fait pas de mal… Ses admirateurs et les partisans de RN exultent. Pourtant, ils ne devraient pas exulter. Ce sondage signifie simplement que le prochain chef de l’Etat français serait, si rien ne devait changer, M. Philippe ou M. Attal. En effet, avec une prévision d’égalité au second tour et un écart si faible, le déchaînement judiciaro-médiatique (à l’image de 2017) qui ne manquera pas de survenir avant le 2d tour de 2027 laisse peu de chance à Mme le Pen. Et puis même, si par un accident électoral Mme le Pen était élue à l’Elysée contre la volonté du système, cette élection d’un personnage aussi connoté et clivant déclencherait un chaos tellement phénoménal qu’elle serait dans l’impossibilité absolue de faire quoi que ce soit. Vous ne me croyez pas? Vous le verrez bien. Ou plutôt, non, vous ne le verrez sans doute pas.

Alors ce sondage confirme aussi l’absence de tout frémissement du côté de l’ancien monde, PS et LR, les deux grands partis d’autrefois, les partis dits de gouvernement – d’avant 2017. Le candidat LR, M. Wauquiez, à 5%… Quelle est la cause principale de cette chute que rien ne semble pouvoir enrayer? l’invraisemblable cascade des trahisons depuis 2017, qui mêle l’image de ce parti, aux yeux de l’opinion, au spectre immonde de la félonie, mais aussi la naïveté des fidèles qui se sont gravement compromis à plusieurs reprises (Absurdistan sanitaire, réforme des retraites et immigration), abandonnant bêtement à Mme le Pen et au RN le monopole de l’opposition au macronisme. Bref, les sondages du jour annoncent surtout, hypocritement – derrière le voile de la progression de Mme le Pen – la poursuite du macronisme sous d’autres formes.

Cependant, en trois ans, des événements sidérants peuvent se produire d’ici 2027, sur la scène nationale comme internationale bouleversant les données de la vie politique française. Des forces et des idées nouvelles peuvent naître à la faveur de l’écœurement qui submerge le pays… L’écœurement peut-il se métamorphoser en retour à la confiance? Il faudrait remettre le monde à l’endroit et placer les idées et les projets avant la démence narcissique et la chute de la politique française dans le néant mégalomaniaque. Bref, il faudrait être capable d’inventer tout autre chose pour réintéresser les Français à la démocratie, fondé sur les idées et non le Grand-Guignol… Mais tout ceci est bien vague et hypothétique; je le sais…

MT

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Politique: la maison de fous

Je préfère être dans un pays où l’on demande si le premier ministre est trop jeune ou pas, plutôt qu’un pays comme les États-Unis où l’on se demande si l’on aura un président fêtant ses 80 ans à la Maison-Blanche, déclare M. Béchu pataugeant dans le jeunisme et le mépris (ou l’ignorance) de l’histoire (Clemenceau, de Gaulle, Mitterrand, Reagan). Mais il y a mieux : Avoir des enfants est un message politique selon M. Peltier (Reconquête) comme si on avait des enfants, non par amour, mais à des fins politichiennes. Et de critiquer les politiques qui n’ont pas d’enfants. A qui pense-t-il: Gambetta, Poincaré, Tardieu, Jean Moulin, Bidault? Quant à M. (zut, j’oublie toujours son nom), ah oui, M. Bardella (RN), il veut faire dissoudre l’Assemblée nationale s’il est en tête aux Européennes, confondant les élections législatives nationales et européennes. M. le ministre de l’économie et des finances déclare que c’est surtout la soumission (du RN) à Poutine qui a fait monter le prix du gaz. Le grand n’importe quoi a-t-il une limite? Le feuilleton sans fin depuis début janvier de Mme Oudéa empêtrée dans ses contradictions (restons courtois) au sujet de la scolarisation de ses propres enfants, comme un insecte dans la toile médiatique, se poursuit. Et le suspens aussi: bientôt virée? Mais derrière le scandale interminable, où est passé l’intérêt général et l’avenir de l’Education nationale? LFI fait des pieds et des mains pour participer à la cérémonie d’hommage aux victimes du 7 octobre, après avoir refusé de qualifier le Hamas de terroriste. Toute honte bue, comme on dit. M. Philippe et M. Copé complotent en vue des présidentielles de 2027. M. Bayrou, 30 ans après, pourrait redevenir ministre de l’EN: 30 ans de catastrophes, de retournements de veste et de lèche-culisme éhonté (SVP ne cherchez pas dans le Petit Robert). Le Premier ministre annonce qu’il est né d’une PMA comme si cela nous intéressait. Il paraît qu’au Sénat (français), un puissant sénateur, filmé dans une pose peu glorieuse, exposé au chantage depuis 3 ans, est menacé d’un scandale à la Clinton. L’ancien président des jeunes de LR, Aurane Jesaisplusquoi qu’on imaginait vaguement honnête, trahit à son tour son parti pour aller rejoindre la grande cohorte pourrie des traitres de droite: à la soupe! Si jeune, franchement… Quant au chef de l’Etat, il peaufine depuis un mois les suites de son remaniement sans fin, laissant planer le suspens: quelques semaines de gagnées ; tenir le plus longtemps possible en occupant l’attention médiatique, avant l’apothéose des JO de Paris. Avec un bon coup de com’ à la clé: le retour de Bayrou! Sent-il à quel point tout le monde s’en fout? Bon, alors, c’est vrai qu’il y a pire outre-Atlantique: le président Biden qui s’adresse à « M. Mitterrand, président d’Allemagne » (sic) »… Piètre consolation…Et tout cela pendant que le pays s’effondre dans la violence sanglante, la crétinisation scolaire, le déclin économique, la dette publique et l’inflation. Franchement, entre nous, comment voulez-vous que les Français ne soient pas gagnés par l’écœurement?

MT

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Qu’est-ce qu’un vote avec 5,68% de participation

La ville de Paris a voté une sur-taxation du stationnement des SUV à plus de 54% des suffrages exprimés dimanche. [NB: les SUV sont des grosses bagnoles à la mode à la forme 4/4 – je me demande si mon Captur Renault en fait partie…]. Toutefois, ce vote a été obtenu avec un taux de participation de 5,68%. Les taux de participation réduits n’ont guère de valeur démocratique. Soyons clairs: la démocratie, pire des systèmes à l’exception de tous les autres comme disait Churchill, repose sur la loi de la majorité: elle donne raison à la majorité face à laquelle la minorité s’incline. Dès lors, en suivant la logique même de la démocratie, quand le taux de participation est inférieur à 50%, cela signifie que la majorité ne reconnaît pas la légitimité d’un suffrage. Le résultat de celui-ci n’a pas de légitimité du point de vue démocratique. Quand la participation est infime, tenir compte du résultat est absurde. On n’est pas dans une logique démocratique puisque l’immense majorité a estimé que le vote était nul et non avenu – inutile. Les abstentionnistes ne sont pas des irresponsables. Ils manifestent par leur abstention que le vote sur un sujet est sans intérêt – et ne mérite pas les urnes. D’ailleurs, il y a quelque chose de pervers à organiser des micro-référendums sur des sujets absolument anecdotiques pour faire croire au peuple qu’on se préoccupe de son avis tout en s’en moquant éperdument. Les suffrages à participation infime sont un outil totalitaire. La Convention élue en septembre 1792 avec les voix de 10% des électeurs (et moins de 5% du peuple dès lors que les femmes n’avaient pas le droit de vote!) a conduit à la Terreur, la loi des Suspects, le Tribunal révolutionnaire et la Grande Terreur. Un taux de participation infime est facteur de fanatisme: ce sont les plus excités qui se mobilisent quand la grande foule déserte les urnes. Dans ce vote imbécile et jaloux contre les grosses bagnoles à Paris, il y a une bien une sorte d’esprit totalitaire larvé, vengeur et haineux, comme un relent de loi des Suspects.

MT

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La nihilocratie (pour Atlantico)

Atlantico: A la lumière de la crise agricole, on voit bien qu’il existe une responsabilité de l’Europe et des gouvernements français successifs. Et une grande difficulté à cerner un cap pour l’agriculture, et plus globalement pour l’ensemble des décisions politiques. Est-ce que ce n’est pas l’aveu d’une incapacité des dirigeants à assumer des choix politiques clairs ?

MT: Le fond du problème est que les dirigeants politiques actuels, au pouvoir, ont perdu le sens de l’intérêt général, ou du bien commun. Ils appartiennent à la génération de « l’ère du vide » de Gilles Lipovetski celle de l’individu dont le seul horizon est l’ivresse de soi, le culte de lui-même. Ainsi, Montesquieu attache un principe à chaque mode de gouvernement : la vertu est le principe de la République, l’honneur celui de la monarchie et la crainte pour le despotisme.  La « nihilocratie » actuelle a pour principe la vanité – à l’inverse de l’honneur.

C’est aussi le fruit du déclin du patriotisme. Jadis, jusqu’au tournant de 1990, en gros, l’ambition politique se mêlait au goût du service de la France, certes dans des proportions inégales et variables. Aujourd’hui, l’idée de France ou d’intérêt de la France est totalement absente de leur vision qui est européiste ou occidentaliste, même si le mot France peut encore leur servir pour fanfaronner.

Alors, ils naviguent à vue, en fonction de la mode idéologique du moment et des caprices de l’événement, avec l’arrogance pour unique boussole, un jour écologistes obsessionnels – parce que c’est la mode – et le lendemain, fervents défenseurs de l’agriculture – parce que le chaos sur les autoroutes dessert leur belle image narcissique. 

  • Atlantico: Certes, il y a des décideurs politiques. Mais, ne doit-on pas aussi s’interroger sur le rôle que peuvent avoir les citoyens eux-mêmes dans cette crise, et plus généralement dans l’ensemble des crises que traverse le pays, lorsque l’on sait que ces décideurs politiques sont élus démocratiquement ?

MT: La responsabilité des citoyens, c’est une vraie question. Au premier degré, en démocratie, la population – ou les gens – sont les grands responsables. Ils n’échappent pas aujourd’hui à l’ère du vide. La dépolitisation dans les profondeurs du pays est évidente. Jusqu’aux années 1970, jamais la participation aux élections législatives ne descendait en dessous de 70 à 80%. En 2022, elle était de 46%… Un record absolu d’abstentionnisme pour ce type de scrutin comme si le pays se désintéressait des lois futures qui, pourtant, s’imposeront à lui.

Mais peut-on reprocher ce désintérêt au peuple en général ? La chose publique (res publica) est un aspect marginal de la vie quotidienne des personnes et des familles, confrontées à mille et une difficultés et soucis : boucler les fins de mois, trouver un logement, se faire soigner, éduquer les enfants dans une société chaotique et violente… Le rôle des dirigeants politiques devrait être, justement, de montrer la voie et de guider l’esprit public en donnant l’exemple du civisme.

Or, que voit-on aujourd’hui ? Exactement le contraire…  Les gouvernements et les majorités pataugent dans l’impuissance à traiter les problèmes de fond, la crise scolaire, la violence, l’immigration, l’effondrement de la santé publique, l’inflation et le chômage, etc. Et à côté de cela, la vie politique se contorsionne en coups de communication, autocratie vaniteuse, esbroufe narcissique, trahisons, corruption, revirement et mensonges. Eh oui, telle est bien l’image honteuse qui est donnée !  Alors, pourquoi voter dans ces conditions quand la politique, de toute évidence, n’offre aucune issue ? De fait, ce n’est pas à titre principal la faute du peuple mais de ceux qui sont censés le représenter et le guider.

  • Atlantico: Avec la crise agricole, force est de constater qu’il existe une incapacité de la société française toute entière à assumer des choix politiques clairs, avec un « en même temps », qui conduit parfois à espérer tout et son contraire. On le voit bien lorsque l’on souhaite à la fois : pouvoir d’achat, sécurité alimentaire, qualité, respect de l’environnement, transition écologique… Comment expliquer cette contradiction apparente des électeurs ?

MT: C’est un sujet complexe. L’opinion est certes aisément manipulable sur le court terme. La sensibilité collective est volatile, largement conditionnée par le 20H de TF1 et de France 2 et aux chaînes d’info. Un jour on explique aux gens que le monde est au bord de l’apocalypse à cause de la crise climatique due à l’activité humaine et notamment aux agriculteurs. Le lendemain, les mêmes faiseurs d’opinion se livrent au matraquage inverse en affirmant, tout aussi doctement, que les normes environnementales oppriment la profession agricole.

Et la foule médiatique suit assez bien les mouvements de l’air du temps tout en survolant d’évidentes contradictions…  « Nous sommes partout vent » écrit Montaigne. Et c’est tellement vrai… Souvenons-nous comment le jeu médiatico-judiciaire a balayé en quelques semaines la candidature de François Fillon en 2017 et porté au pinacle celle d’Emmanuel Macron.

La foule médiatique est aisément influençable sur le temps court, surtout par la peur, peur de l’épidémie, peur de la guerre nucléaire, peur de l’apocalypse climatique, comme nous l’avons constaté notamment pendant la crise sanitaire.

Pourtant, cette malléabilité n’est pas infinie, elle se heurte aux limites du bon sens commun. On ne peut pas manipuler indéfiniment le grand public. Le peuple ballotté par les coups de communication et la propagande, finit toujours par percevoir l’arrogance et le mépris des puissants – dirigeants politiques, influenceurs médiatiques. Il n’est pas nécessaire d’avoir fait science po ni d’avoir lu Aristote, Hobbes et Machiavel pour sentir quand on se moque de vous. Et c’est bien pourquoi les dirigeants politiques du pays – à commencer par le premier d’entre eux – s’ébattent dans une impopularité profonde et chronique. Parce que le pays a compris…

  • Atlantico: Il apparaît que les électeurs réagissent davantage à l’émotionnel qu’au rationnel. On le voit notamment avec les impressionnants résultats d’un sondage Ifop sur le mouvement agricole qui montre que 91% des Français comprennent le mouvement et que 85% le soutiennent. Alors que dans le même temps, nombreux sont ceux qui ont du mal à citer précisément les revendications du secteur. On le voit aussi avec, par exemple, les critiques du libre échange alors que cela a permis des sécurités sur le plan de l’approvisionnement. Ou pour la critique acharnée contre les OGM qui ont permis de nourrir une grande partie du monde et des pays pauvres. Comment expliquer que les électeurs se fient davantage à leurs émotions immédiates qu’à une réflexion profonde ?

MT: Le soutien massif aux agriculteurs n’a rien d’étonnant. Les Français, dans leur immense majorité ont soutenu avec la même ferveur, surtout au début, les Gilets Jaunes et le mouvement social contre les 64 ans de la réforme des retraites.  

La démocratie française est gravement malade. Le sentiment dominant est que les grands choix de société et les vraies décisions essentielles sur la vie quotidienne (par exemple sur les normes sociales, ou agricoles et environnementales), se prennent dans les bureaux bruxellois sous la pression de lobbies économiques, quand ce n’est sous l’influence des cabinets de conseil. Et le peuple, méprisé par ses élites dirigeantes, n’a plus son mot à dire.

Des événements récents ont encore amplifié le malaise : la catastrophe électorale des élections de 2017 dévastées par le scandale, ou en 2022, l’élection d’un président par défaut; le recours systématique de l’exécutif à l’article 49-3 ; la suspension de fait du pouvoir législatif, pris en étau entre le carcan du droit européen et la jurisprudence invasive autant qu’aléatoire du Conseil Constitutionnel ; l’abandon du référendum comme mode d’expression de la souveraineté depuis la victoire du « non » en 2005.

Les Français applaudissent aux différents mouvements de révolte parce qu’ils sont les porte-parole de leur colère, de leur humiliation ou de leur souffrance. Les agriculteurs, comme les gilets jaunes ou les manifestants du printemps 2023, répondent, comme par procuration, au sentiment de dépossession démocratique qu’une immense majorité de Français ressent dans sa chair. C’est pourquoi leur fronde est tellement populaire.

  • Atlantico: L’atomisation du champ politique comme l’impact des réseaux sociaux ou des chaînes d’information rendent difficile l’établissement de priorités puisque les polémiques incessantes poussent à entretenir un « En même temps » qui vise en permanence, non pas à trouver des solutions de dépassement des clivages, mais à tenter de concilier des choix contradictoires.  L’incapacité à choisir et l’absence de trajectoire claire est-elle ainsi vouée à devenir la norme voire à s’intensifier ? Comment les électeurs peuvent-ils participer à l’élaboration d’une politique plus claire – et plus efficace sur le long terme – pour le pays ? Finalement, ce  « en même temps » n’est-il pas un symptôme des crises multiples que connaît le pays plus que sa cause ?

MT: Le problème fondamental est celui du régime politique et de la démocratie française. Dès lors que les gens ont le sentiment que leur vote ne sert plus à rien, et dès lors qu’ils ne croient plus dans la volonté ou la possibilité du pouvoir politique d’améliorer leurs conditions de vie et d’entendre leurs préoccupations, l’émeute ou le blocage, voire l’affrontement physique, s’imposent en ultime recours pour exprimer une révolte, faire valoir des protestations et des revendications. Pour l’instant, les mouvements de révolte restent assez catégoriels en l’absence d’élément fédérateur. Mais une étincelle peut provoquer un embrasement général. D’ici trois ans, d’ici 2027, l’embrasement pourraient bien se produire.

La solution miracle n’existe évidemment pas. Mais ce qui est le plus invraisemblable, c’est que cette question de la démocratie française ne semble intéresser absolument personne – y compris dans les oppositions. Comme si les principaux responsables politiques, de tout bord, s’arc-boutaient à la sauvegarde du système actuel dans l’espoir d’en tirer un jour ou l’autre, à leur profit, les satisfactions d’exubérance vaniteuse qu’il offre en perspective. 

Alors, sans même parler d’un changement de Constitution, nombre de mesures simples permettraient, en un premier temps, de redonner un peu d’air frais à notre démocratie, à droit constitutionnel constant, par exemple :

*élire l’Assemblée nationale avant le président de la République ;

*désigner un Premier ministre indépendant (du président) solide et expérimenté et de caractère, en fonction de la composition du Parlement, et un gouvernement digne de ce nom ;

*en finir avec l’esbroufe élyséenne, masque de l’impuissance et du renoncement ; mettre fin aux interdictions absurdes de cumul des mandats qui entraînent l’effondrement du niveau de la représentation nationale ;

*nommer uniquement des professionnels du droit impartiaux (et non des politiques) au Conseil Constitutionnel ;

*procéder à des référendums au moins deux fois par mandat présidentiel pour tous les sujets vraiment essentiels qui engagent l’avenir du pays (à coupler avec d’autres élections)…

Ces idées ne visent pas à régler tous les problèmes d’un coup de baguette magique mais déjà, à proposer aux Français une lueur d’espérance au bout du tunnel.

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Réflexion sur la percée sondagière lepéniste

La réalité est là, indéniable. Selon le sondage du Figaro Magazine, Mme le Pen est en tête ce mois ci des personnalités dont la cote d’avenir est la plus élevée, et trois personnes de son parti, ou dissidente figurent dans les 4 premiers… Le résultat est presque vertigineux.

Il ne signifie pas que Mme le Pen et son parti sont assurés de prendre le pouvoir. Les élections nationales sont dans 3 ans; beaucoup d’eau, d’ici là, peut couler sous les ponts – et aussi beaucoup de scandales potentiels. Le succès sondagier ne signifie pas succès électoral et enfin, il sera toujours compliqué (mais pas impossible à la faveur de l’exaspération) de franchir la barre de 50% contre une coalition de circonstance de toutes les autres forces politiques. Déjà des appels au « front républicain » se font entendre.

Le plus invraisemblable, dans tout cela, c’est la bêtise suprême qui explique ce succès sondagier, sans que nul n’ait la moindre idée de remettre en cause des stratégies politiciennes et des idées reçues qui conduisent à cette situation. Les vraies raisons de cette percée sondagière sont aux antipodes de la vision généralement partagée dans la classe politique:

1)-Le discours de la « diabolisation », de l’épouvantail, et les appels au front uni ou à la « troisième force » centrale (LR-macronistes) pour « lutter contre l’extrême droite » ne cessent de conforter la position du camp lepéniste ou assimilé en tant que force antisystème sur laquelle le dégoût et l’écœurement populaire viennent se cristalliser – tandis que les dérives du discours mélenchoniste sur l’islamisme ou le Hamas le privent désormais de ce rôle qu’il aurait pu partager.

2)-Mme le Pen et les siens ne se distinguent jamais par la qualité de leurs projets, les perspectives qu’ils offrent et n’inspirent pas une confiance particulière au pays. Seulement, ils sont les seuls à n’avoir jamais gouverné et profitent de cette virginité: les seuls à ne pas avoir trempé dans ce qui est ressenti par beaucoup comme une descente aux enfers progressive de la France depuis plusieurs décennies. Sur le plan sondagier, cette posture est un atout considérable.

3)-Le RN et assimilés (Mme Maréchal-le Pen) parviennent mieux que quiconque à incarner le rejet de la présidence Macron qui sombre dans l’impopularité chronique (24% de confiance selon le même sondage soit moins d’un quart). Ils bénéficient à cet égard de la tragédie de la droite LR, dont l’image a été dévastée par la succession des trahisons emblématiques mais aussi par la tentation de la collaboration avec le macronisme, sur l’Absurdistan sanitaire, sur les retraites comme sur la loi immigration… A tort ou à raison, pour une partie de l’opinion, l’image de la droite LR est globalement associée à celle du macronisme. Le scénario du pire… 3 ans avant les élections nationales, vont-ils enfin comprendre?

4)-Le style le Pen favorise une identification populaire par opposition à l’image élitiste qu’offre le reste de la classe politique (en dehors de M. Mélenchon, mais qui s’est grillé par son extrémisme): la gouaillerie, l’anti-intellectualisme, l’absence de prétention et l’apparente simplicité. Cela ne signifie pas que le personnage soit forcément en conformité avec cette image mais que celle-ci favorise une certaine identification populaire. Aucun autre parti n’a su trouver une personnalité pouvant rivaliser sur ce plan, c’est-à-dire donnant prise, d’une manière ou d’une autre, à une identification populaire… En tout cas pas encore.

5)-La course aux « idées du RN » qui s’est exprimée notamment pendant la réforme de l’immigration profite évidemment à ses leaders en leur donnant raison. La classe politique (hors gauche) y compris LR et la majorité macroniste, a ainsi validé la préférence nationale (personne ne veut l’admettre mais c’est un fait) concept lepéniste par excellence en s’en prenant aux droits sociaux des étrangers (en situation régulière). Or il existe une autre manière infiniment plus utile et juste de parler d’immigration sur la maîtrise des frontières et des visas, la lutte contre les filières criminelles et les entrées illégales, le co-développement – à laquelle il ne fallait pas renoncer pour se livrer à un exercice d’imitation voué à l’échec.

6)-Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. Parler de popularité avec 41% d’avis favorables est sans doute excessif. En fait, Mme le Pen profite surtout du discrédit général de la classe politique et du fait que personne n’émerge vraiment aujourd’hui. Avec plus de 50 à 60% de taux de confiance, on peut commencer à parler de popularité. En tête avec 41%: cela ne signifie pas franchement populaire, mais moins impopulaire que les autres.

MT

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Lecture: Renaud Meltz  « Pierre Laval, un mystère français », Perrin 2019 [présentation de H]

Si vous n’avez pas peur des très grosses biographies, celle-ci est faite pour vous. Elle est à la dimension qu’a occupée Pierre Laval dans la vie politique française essentiellement entre 1914 et 1945. Proclamé « Homme de l’année » par le magazine Times en octobre 1931 à la suite d’un voyage réussi outre-Atlantique, très ancré à gauche à ses débuts, pacifiste convaincu, maire sans interruption de 1923 à 1944 de la ville d’Aubervilliers, député puis sénateur, plusieurs fois ministre et pas des moindres (deux fois aux Affaires étrangères, une fois à l’Intérieur, à la Justice, au Travail ou aux Colonies, sans parler d’un secrétariat d’état), président du conseil à quatre reprises avant l’épisode de l’Occupation, comment et pourquoi un tel homme, à qui la réussite politique s’alliait à une insolente réussite financière, a-t-il pu terminer ses jours à Fresnes, fusillé en octobre 1945? Lorsque vous serez arrivés au bout des 1100 pages de ce livre (hors notes et annexes), vous en saurez probablement un peu plus sur celui que d’aucuns traitaient péjorativement de « maquignon ». 

Pierre Laval a déjà fait l’objet de multiples biographies dont celle de Jean-Paul Cointet publiée chez Fayard. Bien que l’intéressé, du fait de la place qu’il a occupée à Vichy sous l’Occupation, soit présent dans toutes les études ou ouvrages relatifs à cette période de notre histoire, Renaud Metz a réussi le tour de force de revisiter le sujet de fort brillante manière. Du fait de l’éloignement croissant de la période, des archives nouvelles sont désormais disponibles et l’auteur y a abondamment puisé  notamment en ayant eu accès à des archives privées (fondation Josée et René de Chambrun en particulier) mais également au sein des archives nationales (Haute-cour de Justice, Préfecture de Police, Ministère des affaires étrangères, Service historique de la Défense, National Archives à Londres, Centre de documentation juive contemporaine, etc,… la liste n’étant pas exhaustive). S’ensuit un ouvrage extrêmement complet où tous les aspects de la vie du « bougnat » comme on le surnommait sont abordés de manière très précise.

Pierre Laval naît à Châteldon, un petit village d’Auvergne, le 18 juin 1883. Ses parents, aubergistes du village, ne sont ni  riches ni véritablement pauvres. Même au sommet de sa fortune, Pierre Laval se présentera toujours comme un homme du peuple et ce dernier le lui rendra bien. Avant de devenir la personnalité qu’on connaît, il vit des années de vaches maigres et de dénuement. Jeune avocat débutant à Paris en 1909, il est l’avocat des pauvres, et souvent, il ne fait pas payer ses clients. En 1911, l’affaire Manhès, du nom d’un ouvrier anarchiste suspecté de sabotages sur la voie ferrée près de Chosiy-le-Roi, lance le jeune avocat qui obtient l’acquittement de son client* de fort belle manière. La famille et les camarades de Manhès lancent alors une souscription pour le dédommager. Celle-ci rapporte environ 50 000 francs soit 170 000 euros actuels. La soupe devient bien meilleure chez les Laval. Très populaire chez les ouvriers du nord de Paris, il est rapidement surnommé «Pedro» et l’affaire Manhès sera pour lui un excellent argument publicitaire. Ouvertement de gauche, voire d’extrême-gauche bien que ce qualificatif n’ait pas grand-chose à voir avec ce que nous connaissons, il devient député le 10 mai 1914 dans la circonscription de Saint-Denis, au nord de Paris. A l’occasion de cette élection preuve de la virulence et de la violence des mœurs politiques sous la IIIème République, La Libre Parole l’attaque sur son apparence physique en le traitant de … youpin !!! Laval, rhétoricien hors pair, s’en sort magnifiquement. Député, il échappe à la grande boucherie de 14-18. A la Chambre, il fait connaissance d’un jeune député originaire du sud-ouest, un certain Vincent Auriol. Ce dernier lui reconnait une précoce aptitude à la combine parlementaire. Pierre Laval est inscrite au carnet B du fait de ses opinions ouvertement pacifistes en 1911. il voit son inscription radiée par le Préfet de police deux semaines avant l’attentat de Sarajevo. Louvoyant habilement entre ses opinions pacifistes, il hait la guerre, et l’adhésion à l’Union sacrée, Pierre Laval ne tarde pas à se faire un nom dans le microcosme politique. Il se rapproche de Clémenceau et de son jeune chef de cabinet, Georges Mandel. Est-ce les fonds secrets mis à la disposition du Tigre qui sont à la base de la fortune personnelle de Laval ? Difficile d’y répondre mais dès cette époque, il gardera un lien étroit avec Mandel. L’assassinat de ce dernier par la Milice en 1944 fera-t-elle prendre conscience humainement et personnellement à Laval des crimes qu’il a alors couverts? La question est posée mais, aux dires de tous ses proches il sera très affecté par l’action de la tristement célèbre Milice.

L’ouvrage regorge d’informations les plus intéressantes les unes que les autres qui aident à mieux comprendre pourquoi et comment Pierre Laval se compromettra de la manière qu’on connaît vingt ans plus tard et deviendra, au fil de l’Occupation et à la Libération, l’homme le plus haï de France. Pragmatique, charmant et charmeur, roublard, maquignon comme on l’a souvent décrit, ce n’était pas un homme de dossier. Le temps qui passe le verra adopter une forme de défiance vis-à-vis de l’opinion publique et de la démocratie. Mais il a la baraka, comme le montre l’échec de l’attentat dont il est victime en août 1941 à Versailles. Blessé grièvement par Pierre Colette, un jeune camelot du roi, il sollicitera et obtiendra la grâce de son assaillant qui s’éteindra, lui, en 1995. Après l’armistice du 11 novembre 1918, ses talents de profiteur de guerre s’épanouissent pleinement. A droite, François de Wendel admire « une fripouille de talent ». À l’avocat des pauvres, souvent non rémunéré, succède un avocat habile et âpre au gain. Sa vénalité ne cessera de se confirmer mais sa fortune ira croissant. Vivant assez modestement lorsqu’on connaît sa fortune, toujours vêtu d’un éternel costume bleu avec une cravate blanche, il nouera une relation fusionnelle avec sa fille Josée qui sera sa muse dans les milieux mondains. Progressivement, le pacifiste qu’il ne cessera jamais d’être en bon disciple d’Aristide Briand qu’il est, l’homme de gauche laissera aussi la place à un homme profondément anti-communiste. Sa politique déflationniste ayant eu pour conséquence de faire monter le chômage, sa popularité s’écroule. Il vivra son éviction du Conseil en janvier 1936 comme un coup de poignard dans le dos et n’aura de cesse de faire payer les artisans de sa déconfiture. Il saura s’en souvenir le 10 juillet 1940 quand il mettra à bas la IIIème République dans les circonstances que nous connaissons. Ayant la certitude, avec la baraka qui est la sienne et qui l’a si bien servie jusqu’à présent faisant de lui un des chantres du régime, d’avoir raison contre tous, il va tirer un amer orgueil de son impopularité. Ca le conduira dans une voie sans issue quelques années plus tard.

Je laisse au lecteur le soin de découvrir de quoi ont été faites les trente années d’une vie politique intense. Il est fort dommage, mais pouvait-il en être autrement, que son procès tienne plus d’un simulacre de justice que d’autre chose et ait été bâclé. La Libération était assez agitée et il fallait des têtes à l’opinion publique. Comme l’écrit Renauld Meltz : «  Ceux qui assistent au procès regardent Laval comme un monstre. Sa laideur fait signe, plus que jamais. C’est une sorte de cauchemar national, la haine collective de soi, que les Français observent avec une fascination malheureuse ; ses saillies, ses succès oratoires leur permettent de voir briller au fond de leur mauvaise conscience, quelque raison de s’aimer, encore… ».  La lecture de cette biographie éclairera tous ceux qui s’intéressent à l’histoire de notre pays au XXème siècle, qui cherchent à comprendre ce personnage si décrié et pourquoi et comment le vainqueur de 1918 a pu sombrer d’une telle manière vingt ans plus tard. Dans ce naufrage, Pierre Laval apparaît comme un homme politique comme les époques en recèlent tant. Je ne ferai pas l’affront de faire des comparaisons avec la clique actuelle bien que certains noms me viennent spontanément à l’esprit. Je crois qu’il était sincèrement patriote mais une culture défaillante, il lisait très peu, et un égo et une confiance en soi surdimensionnés, ou du moins qui gagneront en importance au fil des années, supplanteront chez lui le bon fond de l’homme du peuple qu’il était et l’amèneront à des compromissions regrettables. On ne peut qu’espérer que des historiens, avec toute la rigueur requise, puissent nous éclairer grâce aux archives désormais disponibles  alors que nous approchons des 100 ans de la catastrophe de 1940. Bonne lecture. H




 



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Une « droitisation » en trompe-l’œil (pour Atlantico, avec M. Christophe Bouillaud)

  1. Gabriel Attal a prononcé ce mardi son discours de politique générale, lors duquel il a dévoilé son cap et ses chantiers prioritaires. Avec ses annonces sur les travaux éducatifs pour les délinquants, le SMIC, le RSA, la “fierté française”, les mesures sur le chômage, Gabriel Attal met-il vraiment le cap à droite toute ? Au regard des mesures annoncées et de ce discours, Gabriel Attal est-il vraiment autant de droite que la plupart des commentaires le disent ou est-ce un trompe-l’oeil partiel ?

« La droitisation » qui s’exprime dans le discours de politique générale de M. Attal doit s’analyser au regard du contexte politique.  Le parti présidentiel est engagé dans une course avec le RN en vue des élections européennes de juin prochain. Pour le Premier ministre, comme pour la macronie en général, l’enjeu essentiel et de coller le plus possible à la « droitisation » de la société française, sa demande d’ordre et de sécurité pour limiter les dégâts face au RN.

Et puis, la macronie caresse l’objectif d’absorber entièrement la droite classique (Les Républicains) dont elle prendrait la place. Le rêve macronien est de recomposer la vie politique française autour d’une force centrale – le macronisme – entouré de deux extrêmes, une droite lepénisée et une gauche mélenchonisée, ce qui lui permettrait de se perpétuer indéfiniment.

Alors oui, les appels du pied à l’électorat de droite jalonnent le discours de politique générale. On n’a jamais autant entendu, de la part d’un Premier ministre venu de la gauche les mots souveraineté nationale, autorité et identité. Cette droitisation n’est même pas une main tendue à la droite libérale mais plutôt sur certains points à une droite autoritaire. Le retour d’une service national universel – ersatz du service national – comme de l’uniforme à l’école, reprennent des éléments du programme de Mme le Pen en 2017 par exemple.

Ce sont des mesures totalement illusoires et horriblement coûteuses si elles étaient mises en œuvre mais peu importe : elles servent de leurre pour faire croire à un retour à l’ordre. D’autres annonces sont aussi des appels du pied à l’électorat de droite. Il en est ainsi pour les travaux d’intérêt éducatifs qui doivent sanctionner la délinquance des mineurs – un projet tout aussi flou et illusoire – ou sur l’affirmation du droit des Etats à maîtriser leur immigration ou encore le conditionnement du RSA à 15 heures d’activité – sachant qu’un tel dispositif était déjà prévu mais n’a jamais été respecté.

En parallèle, M. Attal fidèle au « en même temps » qui est la marque de fabrique du macronisme, donne des gages sérieux à la gauche : la semaine de 4 jours dans la fonction publique est un clin d’œil appuyé à la gauche de la gauche qui en a fait un thème politique fort, comme la confirmation de l’inscription de l’IVG dans la Constitution.

2- De nombreuses personnalités à gauche comme Mathilde Panot et Jean-Luc Mélenchon ont estimé que le discours de Gabriel Attal était “le plus réactionnaire depuis un siècle”. Le discours de politique générale du Premier ministre était-il si marqué à droite ? Comment expliquer que l’opposition, à gauche, soit si véhémente ?

Plus que jamais, on baigne dans le double langage. Le discours de M. Attal est une sorte d’apothéose du macronisme que nous connaissons depuis sept ans. Il martèle « souveraineté nationale » mais « en même temps » fait le panégyrique de l’intégration européenne et en appelle à son renforcement. Il ne semble pas voir qu’en transférant des compétences à Bruxelles, à la Commission, au Parlement européen et à la cour de Justice, dans le cadre de la majorité qualifiée qui prive les Etats du droit de veto, il en dépossède la démocratie nationale – donc affaiblit la souveraineté nationale. Mais cette contradiction, tellement flagrante, est loin de l’arrêter…

De même il est parfaitement contradictoire de fustiger les normes européennes sur l’environnement et l’agriculture, qui sont en cœur de la révolte du monde agricole, et de prôner davantage de « souveraineté européenne ».

Le macronisme se caractérise par la déconnexion entre la sphère du discours, de la communication, de l’apparence, et celle des réalités. Le discours de M. Attal était un formidable numéro d’autosatisfaction sur la politique macroniste depuis sept ans. Mais enfin, le décalage entre la droitisation du discours et la réalité est vertigineux.

En matière d’immigration, l’année 2023 fut celle de tous les records d’accueil en France des migrants avec 323 000 premiers titres de séjour accordés et 140 000 demandeurs d’asile. Le déficit public atteint 4,9% du PIB et la dette publique bat tous les records avec 3000 milliards, elle s’est accrue de 800 milliards depuis 2017. Et le record absolu des prélèvements obligatoires? Celui du déficit commercial?

En matière de sécurité les chiffres de 2022 sont désastreux :  homicides (+8%) ; coups et blessures volontaires sur personnes de 15 ans ou plus (+15%) ; les violences sexuelles (+11%). La politique de nivellement par le bas, incarnée par les réformes Blanquer poursuit ses ravages dans l’Education nationale avec l’effondrement du niveau en mathématique et en orthographe, attestés par les études internationales ou nationales, ou la destruction systématique du peu de crédibilité qui restait au baccalauréat avec le contrôle continu.

Est-ce bien cela, une politique telle que la souhaite l’électorat dit de droite ? Le macronisme, à travers M. Attal, se livre à une course éperdue à la droitisation du discours tandis que dans les faits, il accentue fortement les travers de la politique qui était déjà à l’œuvre sous le quinquennat de François Hollande. Alors en effet, la gauche a beau jeu de dénoncer la droitisation du discours macroniste. Elle prend appui sur ce discours pour tenter de se reprendre des couleurs. Mais ce faisant, elle s’attaque à l’écume des choses.

Au fond la mystification est totale : par un tour de baguette magique invraisemblable, l’échec du macronisme, dans la bouche de la gauche, devient un échec d’une politique de droite. En vérité, cet échec est celui d’une très mauvaise politique de gauche déguisée en politique de droite.


3- Quid de l’avenir de Gabriel Attal et de sa future politique au regard de son discours de politique générale ? Peut-il capter l’électorat de la droite ? Aura-t-il les moyens d’appliquer les priorités, le cap fixé et les mesures énoncées ? Cela laisse-t-il planer aussi un espoir pour la candidature de Gabriel Attal à l’Elysée en 2027 ?

La vraie question est de savoir si cette mystification – celle d’une très mauvaise politique de gauche déguisée en politique de droite – réussira ou si elle échouera. Dans quelle mesure l’électorat se laissera-t-il ainsi duper ?

La politique devient de plus en plus une affaire d’émotion, de sensation, et d’influences. M. Attal bénéficie d’une relative popularité. Il se présente sur bien des points comme un clone du président Macron mais jusqu’à présent sans le jupitérisme ou l’image d’arrogance qui dessert ce dernier. Les sondages le trouvent « sympathique ». Mais cela suffira-t-il ? Existe-t-il, dans ce pays, des ressources d’esprit critique ou d’intelligence politique pour opérer une distinction entre l’affectif, l’émotionnel, la manipulation médiatique et la réalité d’une politique avec ses résultats ? A voir…

La stratégie qui consiste à asphyxier la droite classique pour prendre sa place, au moyen d’une pseudo droitisation et du débauchage de personnalités emblématiques fonctionne plutôt bien en définitive. Dès lors, l’objectif macroniste d’incarner seul le camp du bien ou de la raison contre une gauche radicalisée ou mélenchonisée et la droite lepéniste, pourrait bien réussir. Alors, il pourrait en effet s’incarner dans une candidature à la présidentielle de M. Attal à travers lequel se prolongerait le macronisme.

Tout cela est possible évidemment, mais pas du tout certain. En trois ans, beaucoup de choses peuvent se passer. Le pays peut se réveiller. L’exaspération envers le macronisme, déjà considérable peut prendre encore plus d’ampleur dans les années qui viennent et forcément entraîner comme un boulet l’image encore plutôt favorable de M. Attal aujourd’hui (jusqu’à quand ?). 2027 pourrait bien être un gigantesque défouloir contre le souvenir de 10 ou 15 années maudites.

Dès lors selon ce scénario toutes les possibilités sont à envisager. L’émergence d’une candidature crédible de gauche n’est pas à exclure. Mais la clé de l’avenir tient surtout dans la survie et le retour au-devant de la scène de la droite classique. Si elle parvient à rompre avec la fatalité de son absorption par la macronie, si elle parvient à déjouer cette mystification, à faire émerger un projet cohérent, de nouvelles équipes et un leader charismatique, à retrouver la confiance de l’opinion en s’adressant à une immense majorité de Français rongée par l’écœurement, elle peut aussi avoir son mot à dire.  

MT

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Le naufrage français dans le chaos permanent est la conséquence de la crise démocratique (pour Figaro Vox)

Plus la vie publique a tendance à se bureaucratiser et plus s’accroît la tentation du recours à la violence. Dans un régime totalement bureaucratisé, on ne trouve plus personne avec qui il soit possible de discuter, à qui on puisse soumettre des revendications, ou sur qui la pression du pouvoir puisse avoir prise. La bureaucratie est une forme de gouvernement où chacun est entièrement privé de la liberté politique et du pouvoir d’agir ». (« Sur la violence »).  Hannah Arendt montre comment les révoltes naissent du sentiment des peuples d’avoir perdu la maîtrise de leur destin.

En effet, le chaos est entré dans les habitudes de la France contemporaine. Depuis 2018, il est devenu récurrent, sous des formes diverses. La crise des gilets jaunes a duré quasiment un an, marquée par l’occupation des ronds-points, des images d’émeutes et de violences à Paris, jusqu’au saccage de l’Arc de Triomphe. Le mouvement social contre la première réforme des retraites a pris le relais pendant l’hivers 2019 et 2020 : pendant plusieurs mois, les transports en commun ont été bloqués et le pays au bord de la paralysie.

Puis est venue la crise sanitaire de 2020 et 2021 avec ses confinements et son Absurdistan bureaucratique qui a provoqué une sorte de glaciation de la vie sociale et politique, et, dans la foulée, les élections présidentielles et législatives.

Ensuite, le climat s’est rapidement dégradé de nouveau : la seconde réforme des retraites, celle des emblématiques « 64 ans » a remis le feu aux poudres. Pendant trois ou quatre mois consécutifs, la France a vécu au rythme des blocages, des manifestations violentes, des saccages et des incendies, des images de nuages de fumée noire au-dessus de Paris. Puis aussitôt cette page refermée, la révolte des banlieues s’est déchaînée pendant une semaine, d’une violence inouïe du 27 juin au 3 juillet : 722 membres des forces de l’ordre blessés, 11 113 incendies sur la voie publique, 5 662 véhicules brûlés, 1 313 bâtiments incendiés ou dégradés, dont 254 locaux de la police nationale comme municipale et de la gendarmerie soit un milliard €. Et six mois plus tard, le mouvement des agriculteurs qui menace de bloquer le pays…

 Alors évidemment, en apparence, ces événements n’ont aucun lien entre eux. Ils émanent de milieux qui sont aux antipodes les uns des autres et leurs revendications sont des plus hétéroclites, quand elles existent… Pourtant, ces phénomènes ont un dénominateur commun. Ils traduisent la crise de la démocratie française. L’approbation massive de la fronde agricole – 87% selon des sondages – souligne que l’opinion dans son immense majorité se reconnaît dans une révolte dès lors qu’elle s’identifie massivement à la cause du monde rural.

Cette situation qui plonge peu à peu la France dans un chaos permanent est le fruit de la crise de la parole politique et de la démocratie. Elle exprime, dans la rue, le même message que celui de l’enquête CEVIPOF sur la confiance des Français, selon lequel « 88% d’entre eux estiment que les politiques ne tiennent aucun compte de ce qu’ils pensent ». Les Français ont le sentiment que leur vote ne sert plus à rien. Ils ne croient plus dans la volonté ou la possibilité du pouvoir politique d’améliorer leurs conditions de vie et d’entendre leurs préoccupations. A l’heure actuelle, ils sont privés de toute perspective crédible et raisonnable d’alternance politique. Ainsi, l’émeute ou le blocage, voire l’affrontement physique, s’imposent en ultime recours pour exprimer une souffrance, faire valoir des protestations et des revendications.   

La démocratie, fondée sur la loi de la majorité devant laquelle la minorité accepte de s’incliner, est ainsi profondément malade. Des événements emblématiques, survenus récemment, ont manifesté une fois encore la profondeur du déni de démocratie : pauvreté de l’offre politique, recours systématique de l’exécutif à l’article 49-3, législateur pris en étau entre le droit européen et la jurisprudence tatillonne autant qu’aléatoire du Conseil Constitutionnel, abandon du référendum comme mode d’expression de la souveraineté depuis la victoire du « non » en 2005.

Le sentiment dominant est que les grands choix de société et les vraies décisions essentielles sur la vie quotidienne (par exemple sur les normes environnementales), se prennent dans l’opacité des bureaux bruxellois sous la pression de lobbies économiques, quand ce n’est sous l’influence des cabinets de conseil. Et le peuple, méprisé par ses élites dirigeantes, n’a plus son mot à dire.

Plus encore que lors des Gilets Jaunes ou du mouvement social contre les 64 ans, les Français applaudissent la révolte des agriculteurs comme une réponse au sentiment de dépossession démocratique et à la banalisation d’un régime politique qui privilégie une autocratie hors sol, l’entre-soi, le clanisme et le mépris des gens, l’exubérance narcissique, la confiscation bureaucratique du pouvoir et à la destruction morceau par morceau de la démocratie française.

Le culte narcissique de la personnalité, la mise en scène de la personnalisation du pouvoir à outrance servent à masquer l’impuissance et le renoncement du politique – quand la comédie étouffe l’action. Mais aujourd’hui, le grand spectacle ne fait même plus illusion – plus personne n’y croit, ou presque. La confiance des Français dans la parole politique se trouve anéantie et la crise de l’autorité bat son plein. D’où la banalisation ou normalisation de la rébellion comme mode d’action en marge des institutions. La France a besoin d’une réforme profonde et radicale de son modèle politique.

MT

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La France unie

La France unie contre:

  • Le totalitarisme « vert » (sans lien avec la protection de la nature et de l’environnement)
  • La destruction systématique de la démocratie parlementaire comme référendaire
  • La banalisation de l’autocratie impuissante
  • Le mépris des gens, le mépris du peuple
  • Le grand naufrage de la politique dans l’esbroufe narcissique
  • L’obscurantisme bureaucratique sous couvert « d’Europe »
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Les mauvais comptes de la communication à outrance

Le premier ministre s’est rendu sur un barrage dans le Sud-Ouest et il a engagé un échange avec les initiateurs de la fronde des agriculteurs. Son principal mérite, à l’inverse d’Edouard Philippe face aux mouvement des GJ? Son principal mérite? C’est d’avoir cédé tout de suite aux revendications concernant la fiscalité du gasoil, sans attendre, sans faire semblant de vouloir tenir ou de résister, même quelques heures quelques jours. Tout de suite… Son anté-anté-prédécesseur avait joué les gros bras et la fermeté, pendant plusieurs semaines sur la taxe carbone, avant de reculer, céder sur toute la ligne… Sans pour autant arrêter le mouvement. M. Attal a tenu compte de l’expérience en cédant immédiatement. Il a même déclaré: l‘agriculture passe avant toute chose. Donc, avant l’écologie? Avant la « souveraineté européenne » chère au président Macron? Avant le « déplacement des migrants en milieu rural », nouveau dogme et avant même les JO de Paris? Le problème qui se pose est celui de la crédibilité de la parole politique. Quel est le prix à payer, en termes de crédibilité de la parole publique, pour éviter les images délétères d’un quatrième ou cinquième désastre (après les JG, le mouvement des retraites, le chaos des émeutes). Tout se passe comme si le déclin de la démocratie parlementaire sans être remplacée par une démocratie directe se traduisait par une banalisation de la violence dans la rue comme unique mode d’expression des revendications populaires. Le hollando-macronisme (2012-2017) en affaiblissant la démocratie parlementaire – sans la remplacer – a plongé la France dans le chaos quasi permanent. Alors, le culte de l’image narcissique, de la communication à outrance est censé combler le vide laissé par le déclin de la démocratie. Ce jeu est fondé sur l’illusion médiatique du héros qui monte courageusement au front, au contact de la population pour régler les problèmes. Le principe est de substituer l’émotion romanesque – le héros sur le barrage – à la négociation et au travail de fond. Le volet audace et courage individuel est toutefois à relativiser, au regard du cadrage en amont de telles opérations, ou de la mise en scène. Leur inconvénient est de discréditer l’interlocuteur désigné qui peut apparaître comme un « jaune ». Il est aussi d’affaiblir la représentation institutionnelle de la profession, désignée par l’élection, au profit de créatures médiatiques éphémères – sorties de nulle part. Le pire est le climat de courtisanerie qui se répand comme un fléau – c’est un extraterrestre a-t-on lu quelque part au sujet du personnage supposé avoir réglé la crise d’un coup de baguette médiatique. Les pires courtisans le soutiennent mordicus: « Ce n’est pas de la communication, c’est de la générosité »… Mais alors, pourquoi la mise en scène, pourquoi les caméras et l’avalanche des images? Et déjà les sondages… Et c’est ainsi que la politique et la démocratie se meurent peu à peu, cette mort engendrant de nouvelles violences dans un cycle infernal…

MT

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Réflexion sur l’intelligence et la politique

Emmanuel Macron est intelligent voici un refrain banalisé de la vie politique française contemporaine. Son intelligence est un handicap va jusqu’à dire un scientifique réputé. Son intelligence fait l’objet d’un quasi consensus, presque d’un dogme. La plupart des politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite, et des intellectuels se retrouvent sur ce constat. Discutez de l’actuelle présidence avec n’importe quel politicien, le verdict fini par tomber: Il est intelligent. Non il est bête entend-on aussi parfois mais ce point de vue est extrêmement minoritaire et exprimé comme une provocation.

Tout se passe comme si l’intelligence présidentielle se substituait aux institutions, aux traditions politiques, à l’Etat de droit, aux équilibres démocratiques. Mais il n’est pas le seul à avoir cette réputation. M. Lemaire a lui-même déclaré un jour que son intelligence était un obstacle. D’autres présidents donnaient aussi une image d’intelligence supérieure, par exemple VGE ou François Mitterrand – le Florentin. On disait couramment d’eux: Il est intelligent. Pourtant, la France n’a jamais été aussi malheureuse, n’a jamais autant qu’aujourd’hui souffert, dans sa chair et dans sa dignité depuis 1944. L’actuel chef de l’Etat – comme ses prédécesseurs – est profondément impopulaire. Pourquoi, comment, de belles intelligences, réputées et revendiquées comme telles, conduisent la France dans un précipice?

Henri Bergson peut nous aider à comprendre le paradoxe. L’intuition marche dans le sens même de la vie, l’intelligence va en sens inverse et se retrouve tout naturellement réglée sur le mouvement de la matière, écrit-il. L’intelligence au sens où il l’entend [en tout cas ce que je comprends] consiste dans le savoir-faire, l’habileté qui permet d’atteindre un objectif. Elle consiste en la capacité à inventer des outils, des instruments destinés à travailler la matière, à satisfaire ses besoins ou ses désirs. L’intuition est une autre qualité de l’esprit, sensiblement différente. C’est elle qui, sans l’intermédiaire d’une méthode ou d’un mode de calcul, permet d’approcher une vérité. Elle découle de l’instinct, mais infiniment plus puissante, et permet à la conscience humaine de ressentir directement les choses dans toute leur profondeur. [Les philosophes me pardonneront si je me trompe].

L’intelligence politique ou politicienne est du premier ordre. Sa matière est le pouvoir. Elle est la faculté qui permet au politicien d’atteindre son objectif, la conquête et la conservation du pouvoir. Elle lui dicte les soumissions opportunes, les adversaires ou les obstacles à détruire, la séduction à déployer, les postures à adopter, les mensonges et les mauvais coups nécessaires, le choix des slogans, les moyens de briser les résistances. [Je songe, par exemple, à l’habileté avec laquelle le président Macron s’est sorti de la crise du projet de loi immigration, en roulant copieusement dans la farine ses adversaires de gauche, ceux de LR et du RN].

Cette forme d’intelligence, appliquée à la politique, s’appelle aussi le machiavélisme. Elle est synonyme de ruse, de malignité, ou bien, plus péjorativement, de fourberie. Mais elle est bien réelle, permet à un homme de renverser la table, de séduire, de s’imposer aux autres, de les berner et de rayonner. C’est ce qu’on appelle les maquignons. L’expérience montre d’ailleurs qu’en général, les spécimens les plus accomplis de ce genre de profil finissent mal.

En revanche, l’intelligence politicienne ne préjuge en rien de l’intuition (au sens de Bergson) d’un homme ou d’une femme, cette sensibilité des autres et du monde des réalités. L’intuition est en effet d’une toute autre nature. C’est elle qui permet de sentir ce que ressentent les autres, les individus et les groupes sociaux. Elle est la clé de la sensibilité historique, d’une vision de l’Etat, de ses racines et de l’avenir. Qui sommes-nous et où allons-nous? Quelle est notre place dans l’univers, l’espace et le temps? Quels sont les grands choix à accomplir aujourd’hui pour préparer le lendemain? Elle enseigne la relativité de soi-même et l’humilité – nul n’est indispensable. Elle pousse au service des autres plutôt qu’à l’autosatisfaction et l’exaltation vaniteuse. C’est elle qui donne la clé de l’appréhension de l’univers et de ses mouvements.

Ainsi, on peut être d’une extrême habileté, donc intelligent au sens politicien, machiavélien, tout en étant privé des antennes qui permettent de sentir les mouvements de l’âme collective. Les personnalités qui réunissent les deux qualités de l’esprit, l’intelligence, au sens de l’habileté, et l’intuition – ou la vision historique – sont rarissimes. Il en vient peut-être une ou deux par siècle. Le malheur de la France aujourd’hui, est de n’avoir à sa tête que des machiavel ou maquignons bas de gamme, qualifiés d’intelligents, mais privés du sens de l’intérêt général et de la vision historique, qui jettent aveuglément le pays dans le trouble et le malheur.

MT

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Immigration, Conseil constitutionnel, qu’en penser vraiment?

Venus de la droite classique comme de la droite lepéniste, les superlatifs s’enchaînent sur la décision du conseil constitutionnel qui a censuré un tiers de la loi immigration, CAD l’ensemble des dispositions ajoutées par le Sénat censées « durcir » le texte: coup d’Etat, gouvernement des juges, etc

En vérité, cette décision était conforme à la jurisprudence du CC. Elle était parfaitement prévisible et attendue [en voici la preuve]. Ceux qui font semblant de s’en étonner sont des hypocrites. Le CC, juge des lois, est extrêmement formaliste. Il s’accommode parfois de violentes atteintes aux libertés publiques et individuelles (pendant la crise sanitaire). Mais il censure la loi immigration pour des questions de procédure, non pas sur le fond qu’il s’est gardé d’aborder.

L’ensemble des dispositions censurées ont été balayées par le CC au titre de cavaliers législatifs, en se fondant sur l’article 45 de la Constitution selon lequel un amendement parlementaire doit avoir un rapport au moins indirect avec le projet de loi qui lui est soumis.

Or, le CC avait beau jeu de considérer que la déchéance de nationalité pour le meurtrier d’un policier, par exemple, était sans rapport avec la maîtrise de l’immigration (droit pénal), ou encore que les restrictions apportées au droits sociaux des étrangers relevaient du droit social et non d’une loi sur l’immigration. Au vu de sa jurisprudence habituelle, cela n’a rien d’étonnant – et rien d’inattendu.

Evidemment, cette jurisprudence, s’ajoutant au poids de la réglementation européenne, à l’usage banalisé du 49-3, finit par réduire comme peau de chagrin la marge de manœuvre du parlement et à le neutraliser. Mais elle était parfaitement prévisible. La France n’est plus une démocratie parlementaire (ni référendaire d’ailleurs). Qui peut en douter? Elle est devenue une autocratie soumise à la volonté et à l’habileté manœuvrière du prince.

Cependant, cette censure ne changera rien sur le plan de la maîtrise de l’immigration. Cette loi immigration, avec ou sans les ajouts de la droite, est parfaitement creuse et inutile. Elle joue sur les symboles. Sabrer dans les droits sociaux des étrangers (en reportant leur bénéfice de quelques années) est sans doute populaire pour une partie du pays mais n’aura jamais le moindre effet sur des populations qui fuient la misère, l’oppression ou l’insécurité, souvent au péril de leur vie.

La droite LR est une fois de plus la dupe de cette séquence. Pour la deuxième fois après la catastrophe des « 64 ans » (tout aussi inutiles et emblématiques), elle a sauvé le pouvoir macroniste d’une humiliation et d’un désastre politique en lui permettant de tenir sa loi immigration et de parader aujourd’hui. Rongée par les trahisons, la droite LR vient de recevoir une nouvelle gifle – magistrale.

Décidément, l’artiste est au sommet de son art. Alors que le pouvoir macroniste se trouvait en grande difficulté au Parlement sur sa loi immigration, au bord du précipice, il est parvenu exactement à ses fins en s’appuyant sur la phénoménale naïveté de la droite LR avec cette fois-ci, la complicité active du parti lepéniste (ayant lui aussi voté la loi immigration à l’unanimité).

Mais cela ne changera rien à la réalité. En 2023, tous les records d’immigration, en incluant les étudiants étrangers, ont été une nouvelle fois battus en France avec 323 260 premiers titres de séjour délivrés et 142 500 demandeurs d’asile – deux records absolus dans le contexte d’un pays qui compte 5 millions de chômeurs (selon pôle emploi).

Les droites nationalistes (RN et Reconquête) gesticulent, aboient, surfent sur l’impuissance, mais ne proposent strictement rien d’utile ou de crédible, bien au contraire. La gauche, radicalisée, s’enfonce dans l’angélisme et l’utopie sans frontière. La droite LR continue de sombrer, victime de la félonie de certains des siens, mais aussi de sa naïveté. Le pouvoir macronien jubile, parade mais ses succès magouilleurs ne font que couvrir l’incroyable faillite de sa politique. Un jour, il sera le premier à payer.

Le seul résultat de toute cette lamentable séquence sera d’amplifier l’écœurement et la défiance populaire envers le politique. Où allons-nous? Désolé, je n’ai aucune réponse, aujourd’hui je ne vois aucune solution politique – peut-être demain ou après demain – mais aujourd’hui, rien du tout.

MT

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Totale solidarité avec le monde paysan

Les agriculteurs sont les premières victimes de l’hypocrisie nationale. Ils ont choisi leur métier par fidélité à des traditions familiales, par amour de la nature et de la liberté. Leur rémunération moyenne est de 1500 € par mois mais beaucoup vivent avec quelques centaines d’€. Ils ne connaissent ni les samedi-dimanche ni les vacances. Ils doivent s’endetter à mort dans des conditions qui ne permettent pas les remboursements. Leur profession compte 150 suicides chaque année. Les paysans sont accusés de tous les maux, y compris de polluer la terre. Or, c’est à eux que nous devons l’entretien des paysages de France. Sans les agriculteurs, la campagne française ne serait qu’une friche ou une jungle. Hier, une mère de famille de 36 ans et sa fillette de 12 ans ont été tuées sur un barrage. Elles n’auront sans doute pas droit aux marches blanches ni aux hommages nationaux à l’Assemblée. Le monde agricole proteste contre son étranglement par les prix du carburant et des normes environnementales inapplicables. J’ai absolument honte de ce pouvoir politique qui verse des larmes de crocodile, fustige aujourd’hui les normes européennes qu’il a lui-même approuvées à Bruxelles. Une telle hypocrisie dépasse l’entendement. Nous avons eu les Gilets Jaunes, deux mouvements sociaux sur les mauvaises réformes des retraites, surtout la plus imbécile, la seconde, une explosion de violence dans les banlieues et aujourd’hui une révolte du monde paysan qui pourrait bien faire tâche d’huile. Ce chaos permanent est le résultat direct du discrédit de la parole politique, d’un mode d’exercice du pouvoir politique fondé sur le mépris, l’exaltation vaniteuse, l’autocratie et le népotisme hors sol, et surtout de l’absence de toute perspectives d’alternance visible dans un paysage politique en ruines – ruiné par le maquignonnage, la courtisanerie et la félonie. Les agriculteurs n’ont plus d’autre choix que la révolte. Nous les comprenons et nous les soutenons, sans la moindre réserve.

MT

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La vérité sur le lynchage médiatique de Sylvain Tesson

Sylvain Tesson est avant tout le formidable écrivain de ses récits de voyages: dans les forêts de Sibérie, les chemins noirs, la panthère des neiges… Ses livres ne sont pas engagés, ne se penchent pas sur les questions idéologiques ou sociétales. Or, Sylvain Tesson fait l’objet d’une tentative de lynchage médiatique, lancée par 600 poètes, la plupart illustres inconnus qui le traitent de réactionnaire et à ce titre contestent la présidence du printemps des poètes qui lui est confiée. Sylvain Tesson est ainsi traité en emblème de l’extrême droite, c’est-à-dire diabolisé comme incarnation du mal populiste. Que peut-on reprocher à cet auteur qui pourtant, à l’inverse d’un Michel Houellebecq, par exemple, ne s’intéresse pas ou si peu, dans ses ouvrages, aux enjeux de société? Pire: Sylvain Tesson est le chantre de la splendeur de la langue française, avec son style qui rappelle celui des plus grands écrivains, de l’amour de la littérature, de la nature, de la solitude et de la liberté. Le réflexe de vouloir le lyncher est celui de petits gardes rouges ou « commissaires du peuple » qui s’offusquent de son hymne à l’évasion et à la beauté. Ce qui ne lui est pas pardonné: fuir la médiocrité par un authentique talent. Le voyage sublimé par la littérature fait peur aux esprits mesquins et totalitaires. Il entraîne l’esprit loin des barreaux de leur mesquinerie. Bien évidemment, la jalousie envers le talent et le succès est en toile de fond de cette cabale. Pour ses lecteurs et admirateurs (dont je suis), cette polémique est lamentable. Il faut déplorer la bêtise de ses détracteurs mais aussi la cupidité de certains de ses défenseurs politiciens qui saisissent l’occasion pour se faire remarquer. L’écrivain apprécie-t-il sa défense prise par certains carriéristes de bas étage, et félons de droite? Rien de moins sûr. Une seule réponse à cette offensive de la crétinerie jalouse : lisons le, relisons le!

MT

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« Droitisation » ou crétinisation?

La caractéristique des hommes et des équipes au pouvoir est la fuite devant le réel. Plutôt que de devoir affronter les déficits et la dette publique, l’inflation, le chômage, l’effondrement scolaire, la violence endémique, la hausse des prélèvements obligatoire, etc. le politique s’échappe dans les limbes, avec, il faut bien le dire, la complicité d’une partie des médias amourachés. C’est ce qu’on appelle généralement le tout communication ou le grand spectacle. Ce mode de fonctionnement repose sur un vice fondamental: l’ivresse de soi qui écrase toute notion de bien public. Alors, ils ont choisi successivement la fuite dans le mépris des gens, le faux progressisme, et puis le bureaucratisme sanitaire. Aujourd’hui la mode est passée à autre chose: la prétendue droitisation. Ils n’ont plus à la bouche que des mots qu’ils considéraient jadis comme emblématique de la droite moisie, sinon la droite extrême: ordre, souveraineté et même identité. Ils accélèrent le débauchage d’individus supposés représentatifs de la « droite ». D’aucuns y voient une preuve de génie politique. Pourtant, rien n’est plus facile que de séduire des opportunistes sans foi ni loi qui iraient n’importe où et chez n’importe qui pour un fromage. La véritable question n’est pas dans les gesticulations et la logorrhée, bref la « droitisation ». Les postures et les belles paroles sont une chose. Les actes en sont une autre. On aimerait moins de coups de menton et davantage de signaux de bonne volonté à vouloir améliorer la vie quotidienne. Les Français, dans leur majorité, savent qu’il n’existe pas de remède miracle ni de baguette magique. Se mettre au travail et au service de l’avenir du pays sans frime ni ostentation, est-ce trop demander? Mais ce qui est le plus terrifiant, c’est que les dirigeants politiques au pouvoir, contrairement à une idée répandue, sont les propres dupes de leurs mystifications. C’est une erreur de les imaginer animés par quelques dessein mystérieux. Leur unique horizon est eux-mêmes. On ne peut même pas dire qu’ils ne savent pas où ils vont. La question d’une direction ne leur vient pas à l’esprit. Ivre d’eux-mêmes, indéfiniment malléables, ils s’admirent, s’autoéblouissent. Ils passent et repassent pour eux-mêmes leurs grimaces à la télévision. Ils s’y croient vraiment, ils se voient supérieurs, se prennent pour guides, détenteurs du bien et de la vérité, face à un troupeau obtus qu’il convient de placer dans le droit chemin. « Mon intelligence est un obstacle »: la phrase idiote par excellence. La question n’est pas celle de la droitisation. C’est celle d’une crétinisation accélérée de la classe dominante ou dirigeante.

MT

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L’horreur hypocrisie

La politique française baigne dans l’hypocrisie comme jamais. Le pouvoir donne des coups de menton virils et proclame: « Ordre, autorité, nation ». Or, la politique et la réalité sont précisément à l’inverse du discours: pagaille, violence généralisée, chaos et criminalité dans les cités populaires, explosion des déficits et de la dette publique, des PO, inflation, poussée du chômage et effondrement scolaire. La grandiloquence est toujours le miroir inversé de la chienlit et de la souffrance. Pendant sa conférence de presse élyséenne, M. Macron a longuement fustigé le RN. Ne soyons pas dupes: c’est le moyen d’introniser le parti extrémiste en unique opposant officiel au macronisme. En parallèle, le débauchage des félons de droite LR s’accélère avec la prise de Mme Dati. Le corbeau succombe toujours aux flatteries du renard – surtout à propos d’un fromage. L’idéal macronien de toujours est d’absorber la gauche, la droite et le centre en une force centrale incarnant la respectabilité bourgeoise face au camp dit populiste ou nationaliste ou le mal absolu dont chacun sait que ses chances de l’emporter sont de fait infimes, sinon inexistantes car il ne rassemblera jamais 50% des électeurs. Et même s’il parvenait à gagner les présidentielles par un accident électoral, ce serait une victoire éphémère plongeant la France dans un indescriptible chaos d’où le macronisme sortirait in fine triomphant. Ainsi ce dernier pense s’assurer la mainmise sur l’Etat pour une période indéfinissable, au moins d’un demi siècle afin de poursuivre son spectacle hors sol pendant que le pays souffre et s’abîme. Face à la mystification grossière, le salut ne peut venir que d’un sursaut d’intelligence du pays dans ses profondeurs. Viendra-t-il?

MT

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Que penser de la notion de « réarmement civique de la Nation »

La notion de réarmement civique de la nation était la clé de la conférence présidentielle du 16 janvier consacrée au « grand rendez-vous avec la nation ». Curieusement, elle ne semble avoir intrigué personne. On s’habitue à tout. En sept ans, le discours élyséen a évolué, passant de la start up nation, de l’absence d’une culture française et de la colonisation comme crime contre l’humanité, de l’histoire nationale à déconstruire, au thème du « réarmement civique de la Nation ». En gros, cela signifie que la nation, le peuple français, manque de sens civique, surtout la jeunesse. Dès lors, il faut lui réapprendre le civisme. C’est mépriser les Français que de les accuser de manquer de sens civique, mépriser les 90% Français (ou étrangers en France) qui payent leurs impôts, respectent le code de la route, n’insultent pas et n’agressent pas leurs voisins, ne volent pas dans les supermarchés, essayent d’élever leurs enfants, travaillent et peinent à boucler les fins de mois. En revanche, le réarmement civique devrait surtout s’appliquer aux dirigeants politiques au pouvoir (tous). Qu’ils travaillent humblement au service du pays plutôt que de s’exhiber quotidiennement comme des paons narcissiques pour satisfaire leurs pulsions vaniteuses! Qu’ils en finissent avec le copinage ou les désignations au plus haut niveau de l’Etat de personnalités mises en examen ou évidemment incompétentes par clanisme, népotisme ou calculs politiciens! Qu’ils cessent de creuser la dette publique qui pèsera sur les futures générations et de dire n’importe quoi en tenant des propos contradictoires du jour au lendemain et d’enfumer l’opinion dans la grandiloquence! Bref, qu’ils commencent eux-mêmes à donner l’exemple de l’esprit civique en travaillant au bien commun avant de donner des leçons aux Français. Le SNU et l’uniforme scolaire sont des gadgets ou des attrape-nigauds démagogiques, presque ridicules et dramatiques pour les finances publiques. Par ailleurs, le discours du coup de menton, l’ordre et de l’autorité n’est autre que le reflet inversé du renoncement face à la violence quotidienne: comme s’il fallait faire payer à l’immense majorité des jeunes le chaos qui émane d’une infime minorité de voyous! Les Français attendent une politique concrète, pas des sermons moralisateurs d’un autre âge – un autre âge qu’on n’ose même pas nommer.

[Non, je vous en donne ma parole d’honneur, ceci n’est pas chez moi un esprit de critique systématique, mais bien un violent écœurement que je ressentirais à ce genre de propos quel qu’en soit l’auteur, et pire peut-être s’il émanait de personnalités représentatives de ma sensibilité politique].

MT

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