Electricité, la débâcle ou l’étrange défaite

« Nous sommes en guerre » a déclaré le président au sujet de la crise énergétique, exactement comme il disait « nous sommes en guerre » à propos de l’épidémie de covid19 deux ans et demi auparavant. L’heure est à la dramatisation extrême. Celle-ci vise à étouffer dans la peur collective d’éventuelles interrogations sur les causes d’une catastrophe et surtout, les responsabilités politiques. « La France connaît la plus grave crise depuis la guerre » ajoute un fervent admirateur. Peut-être, mais la faute à qui, depuis 10 ans, mon p’tit bonhomme? Cependant la méthode qui consiste à attiser les angoisses collectives pour asservir l’opinion commence à être éventée. Cette fois, la manipulation semble moins bien fonctionner. Quelques poches d’esprit critique résistent et se manifestent… Les dirigeants mettent la crise de l’énergie sur le compte de la guerre en Ukraine. Or a part du gaz russe est infime dans l’approvisionnement de la France. L’essentiel des difficultés vient d’ailleurs. Et la vérité commence à sortir. Depuis 2012, l’affaiblissement volontaire de la filière nucléaire est un choix délibéré des dirigeants au pouvoir. Il s’exprimait notamment dans le plafonnement du nucléaire à 50% des énergies utilisées en France en 2035 au cœur du programme de M. Hollande. Ce choix idéologique – le message politique d’un retrait progressif de cette filière – a été confirmé, sans aucune ambigüité, par son successeur en 2017. La fermeture de la centrale de Fessenheim en 2020 (qui fournissait l’équivalent de la consommation de l’Alsace) a été hautement et fièrement revendiquée par les plus hauts dirigeants de cette période alors qu’aucune considération sérieuse ne l’imposait. Mais pire: nous apprenons aujourd’hui que la moitié du parc nucléaire (qui fournit environ 70% de l’électricité utilisée en France) est, pour diverses raisons, à l’arrêt. Alors le pouvoir politique se défausse de ses responsabilités – tellement évidentes au regard du message dominant depuis 2012 – et cherche des boucs émissaires. On nous parle aujourd’hui, Dieu sait pourquoi, du CNR, conseil national de la résistance (1943-1944). Mais notre époque ressemble bien plus à celle de l’Entre-Deux-Guerres quand la classe dirigeante au pouvoir, sous l’emprise de la démagogie et de l’aveuglement, de 1920 à 1940, a laissé se dégrader l’outil militaire français (équipement, qualité du haut commandement et stratégie), réputé jusqu’alors le plus puissant au monde, jusqu’à l’épouvantable débâcle de mai-juin 1940. Et toujours, comme aujourd’hui, en parfaite bonne conscience, elle pavoise la tête haute et fuit ses responsabilités. L’historien Marc Bloch en a fait un livre: l’étrange défaite.

MT

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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56 commentaires pour Electricité, la débâcle ou l’étrange défaite

  1. cyril dit :

    à There : vous me répondez très curieusement et sans réfléchir, je faisais un constat et je posais une question, tout simplement

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  2. Pierre 95 dit :

    Bonjour Monsieur

    A la lecture de votre article, je me pose la question de la pertinence de la création d’une commission d’enquête sur le fiasco de la politique énergétique de ce pays depuis 10 ans.
    Parce que les décideurs politiques, dont Monsieur Macron et Madame Borne, pour ne citer qu’eux, et sans oublier les responsables EELV, doivent assumer leurs responsabilités.
    Mais qu’attendent donc nos députés et nos sénateurs pour diligenter une telle commission ? Que les gens descendent dans la rue ?

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  3. Pheldge dit :

    @Stanislas : je vous mets un commentaire lu ailleurs, en réponse à vos accusations sur le prétendu libéralisation du marché de l’électricité :
    « Lorsque un producteur est forcé par un état (ou une commission) de vendre à un prix fixé et en plus à perte, comment parler de ‘dogme libéral’. Ce raisonnement ne tient pas une seconde.
    C’est le business model qui est pourri. Ces crétins de politocards nationaux et de Bruxelles ont imposé à EDF de vendre à perte plus de 50% de sa production. Ca n’a rien de libéral. C’est au contraire dans la plus pure mouvance socialo-communiste ou l’état fixe les prix, décide du business model, et fait n’importe quoi en plantant une fois de plus une boite avec ses gros doigts dégueulasses. ».

    Ensuite, EDF a dû subir et appliquer les instructions non « de l’état », mais des gouvernements, notamment depuis 2012 où Flamby, puis Macron ont sacrifié le nucléaire en échange des votes écolos. La fermeture de Fessenheim décidée par Hollande sur un coin de table a été réalisée par Macron pour avoir Hulot au gouvernement … Vous voyez qu’on est loin de « l’état stratège » et de la vision à long terme, que nécessiterait une politique énergétique digne de ce nom.
    Donc au final, le problème des sociétés nationales, c’est qu’elles sont soumises, non à des impératifs industriels, mais aux caprices et lubies de la clique en place.
    Et pour ce qui est de l’addition de leurs c0nneries, elle sera de toutes façons répartie entre le contribuable et le consommateur, qui se trouve être – sauf cas particuliers – la même personne, alors il faut vraiment croire au Père Noël, pour avaler ce tour de passe-passe qui consiste à faire croire que « grâce à l’état » le prix payé par le consommateur restera faible, quand le coût de production est multiplié par 10.

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    • Stanislas dit :

      « libéralisation du marché de l’électricité

      Je « n’accuse pas » « de libéralisation » .. après vous pouvez faire votre libéral bon teint selon la formule consacrée « si ça marche pas, c’est qu’on n’est pas allé assez loin »….

      Je ne vous envoie pas du complotiste

      https://fr.wikipedia.org/wiki/March%C3%A9_de_l%27%C3%A9lectricit%C3%A9_en_France

      https://selectra.info/energie/guides/comprendre/liberalisation

      http://www.senat.fr/rap/a09-617/a09-6172.html

      Je vous signale aussi que des entreprises privées ont été contraintes par l’état à fermer deux mois en 2020.. les petits magasins ne sont pas du service public que je sache..

      Le prix des livres est bloqué depuis 30 ans, et ça ne fait pas des librairies, des structures de service public..

      citation

      COUR DES COMPTES
      DEUXIÈME CHAMBRE
      ____
      TROISIÈME SECTION
      S 2015-1442
      RAPPORT PARTICULIER
      (articles L. 143-3 et R. 143-1 du code des juridictions financières)

      LA STRATÉGIE INTERNATIONALE D’EDF
      Exercices 2009 à 2013
      – Actualisation pour l’exercice 2014 –

      Si, de façon générale, EDF jouit d’une forte capacité d’autonomie vis-à-vis de satutelle étatique,
      l’État a, pour sa part, peu cherché à influer sur la stratégie internationale du groupe, durant la période 2009-2013. Dès lors que cette stratégie a été prudente et peu offensive, la préoccupation majeure de l’État actionnaire a été que le groupe continue à servir un dividende substantiel, malgré une situation financière fragile et même au prix d’un surcroît
      d’endettement.

      L’inflexion de la politique énergétique nationale à partir de 2012 n’a pas eu non plus d’incidence significative. Les projets nucléaires à l’étranger ont continué à être encouragés.

      IV. Les attentes de l’État et des autres actionnaires ont été peu directives

      A. L’EXPRESSION DE L’ÉTAT AU SEIN DU CONSEIL D’ADMINISTRATION

      La situation de l’État vis-à-vis d’EDF est ambivalente : il fixe et met en œuvre la politique énergétique, et EDF est une entreprise publique, mais il s’agit d’une société cotée, et, ce faisant, il se trouve dans la posture particulière d’un actionnaire majoritaire d’un groupe d’envergure internationale ; dans le même temps, il a aussi la responsabilité de l’action publique dans les domaines du commerce extérieur et de la défense des intérêts économiques
      nationaux à l’étranger, ainsi évidemment que des intérêts stratégiques, sensibles notamment en matière nucléaire. D’où une difficulté intrinsèque, pour l’État et ses différentes incarnations, à mettre en cohérence et à exprimer clairement ses attentes, souvent contradictoires.

      fin de citation…………………………….

      Je ne vais pas vous envoyer mes 60 cms de documentation sur le marché électrique…

      Et enfin, si les gens confondent un fonctionnement accepté depuis 20 ans, avec un état absent, avec la reprise en main du secteur électrique sous réseau numérique, il faudrait peut être vous pencher sur la stratégie non ?

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    • Stanislas dit :

      Encore un article que j’avais mis de côté à l’époque qui évoque un « dogme » à propos du marché de l’électricité libéralisé qui oblige les décideurs à se cogner les synapses en permanence pour ne pas cesser de réglementer la déréglementation d’un marché au produit très spécifique… une sorte de technique de « bouchage des trous dans la paroi qui se fissure » et il y en a eu de nombreux depuis quasi 20 ans…

      Etat des lieux synthétisé de 2017…
      Vous remarquerez que je n’envoie pas du média communiste qui « accuse »

      https://www.lemonde.fr/blog/huet/2017/09/04/le-marche-et-lelectricite-le-dogme-perd-leurope/

      Petit site qui décortique EDF et par exemple son actionnariat…

      https://mirador-multinationales.be/secteurs/energie/article/edf

      Petite réflexion sur le prix de l’électricité

      Cliquer pour accéder à rapport-prix-ann1.pdf

      et des options pour le nucléaire à l’ordre du jour…

      https://www.hprevot.fr/cout-du-nucleaire.html

      Mes excuses pour le dérangement permanent Mr Tandonnet mais quand je lis « d’accusations » sur la base de deux lignes non significatives, écrites par je ne sais qui, j’envoie quelques références pour montrer que deux lignes anonymes, ne suffisent jamais pour envoyer dans un tribunal……quoique !!

      Si les personnes comme Pheldge (et c’est un compliment) avaient été plus préoccupés du sens des mots, par suspicion ou par souci de vérification, à propos du couillonacircus, on n’en serait pas à nous faire effacer notre histoire et notre présent par une bande de voyous…

      point final….

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    • Pheldge dit :

      merci pour vos liens mais le marché de l’électricité en europe est contraint par des règlementations, et n’est donc pas un marché libre … parler de libéralisme à ce sujet est une escroquerie intellectuelle, c’est tout ce que je voulais rappeler.

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  4. Pheldge dit :

    HS : fabien Roussel, le chef du PC après avoir répondu à Sandrine Rousseau sur le barbecue « on mange de la viande en fonction de ce qu’on a dans le porte-monnaie et pas de ce qu’on a dans son slip », se démarque à nouveau : « Roussel dit non à « la gauche des allocs » »
    lepoint.fr/politique/roussel-dit-non-a-la-gauche-des-allocs-la-nupes-grince-des-dents-10-09-2022-2489451_20.php
    Allô, les « de droite » ?

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  5. Stanislas dit :

    Pour ceux qui croient que la France a des dirigeants, alors qu’il ne s’agit que de drônes pilotés à partir des cabines de Bruxelles et d’ailleurs..

    Les croyances sur la magie de d’escrocfinance, pseudo libéralisme déviant, afin d’organiser des monopoles ou oligopoles privés internationaux, sont vite liquidées si peu qu’on lise un peu la littérature de l’organisation des lois opportunes qui favorisent le business au détriment des manants sous leurs applaudissements.
    Je suis un extrémiste qui a refusé l’UE en 1992 avec Seguin.. et je n’ai jamais varié surtout après l’introduction de l’euro..

    Ce règlement 2017/1938 que j’avais mis de côté après lecture d’un rapport du CGEDD (conseil général de l’environnement et du développement durable) de février 2018
    on le trouve encore…

     » Retour d’expérience des difficultés rencontrées pour la sécurité d’approvisionnement en électricité et en gaz durant l’hiver 2016-2017 – Evolution du critère de défaillance du système électrique et du critère de sécurité d’approvisionnement en gaz naturel »

    Voici donc le règlement UE en question, cité par le CGEDD qui fait 56 pages.
    à lire pour les plus curieux ..en rappelant qu’un règlement s’applique. Point barre

    RÈGLEMENT (UE) 2017/1938 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
    du 25 octobre 2017 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) no 994/2010
    (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)

    petit passage pour le fun…page 3
    je cite

     » Dans sa communication du 16 octobre 2014 sur la résilience à court terme du système gazier européen, la Commission a analysé les effets d’une rupture partielle ou totale des approvisionnements en gaz en provenance de la Russie, et a conclu que des approches purement nationales ne sont pas très efficaces en cas de perturbation
    grave, du fait de leur champ d’application, qui est par définition limité. Le test de résistance a démontré à quel point une approche plus coopérative entre les États membres pourrait considérablement réduire les effets de scénarios de perturbation majeure dans les États membres les plus vulnérables

    Les tirs des Français dans leur propre pied continue sous les applaudissements…

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  6. Monique dit :

    Bonjour Maxime Tandonnet toutes et tous,

    Je dois avouer humblement que je n’ai jamais rien lu de Marc Bloch, je fais donc mon mea culpa comme mon président me l’a appris, oui, pour mon ignorance, repentance !!!!! Panneaux solaires dans le Nord autant acheter des chaussettes de laine en gros, l’éolienne (il parait qu’on peut en construire une dans le jardin!!) je préfère le joli moulin de chez nous, donc tout est simple, facile, je suis pour le nucléaire tout azimut, je suis pour les centrales nucléaires .
    Pour notre chère automobile électrique, la batterie revient plus cher qu’un plein d’essence, c’est scandaleux, alors je garde mon diesel.
    … et puis, où en est cette fabrication miraculeuse du fioul vert (30% de colza) qui devait être commercialisé début juillet ? dans le monde rural, beaucoup se chauffent au fioul, personne n’est capable de renseigner, on ne sait pas ! coût d’une chaudière à condensation non polluante, 13.000 euros ! (rien que de la vapeur d’eau sans suie !) un investissement pour ménager la planète !!
    La défaite qui nous attend, toutes les sanctions qui retomberont sur nous bientôt et qui ont déjà commencé c’est uniquement de la faute à la gestion de Macron. Hollande avait été le capitaine du pédalo, celui là sera le capitaine du naufrage. La dette publique française s’établit à 2 901,8 milliards d’euros, après tout on peut encore la creuser !
    Les économies d’électricité ont commencé depuis longtemps dans les villages plus de lumière dans la rue à partir de 23h50, d’où de nombreux cambriolages de nuit, y compris syphonner la cuve à fioul, on n’y voit rien, ou bien embarquer la tondeuse. C’est ça aussi les économie d’énergie.

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