Entretien avec le site « Droite de demain » sur la tragédie démocratique française

En effet, après un scrutin de 2017 qui a été dénaturé par le scandale autour de François Fillon, les élections de 2022 s’annoncent absolument neutralisées par la succession des crises, épidémies de covid 19, Ukraine. La posture présidentielle de « fausse non-candidature », le problème des parrainages, le matraquage sondagier, les difficultés de Valérie Pécresse candidate officielle du principal parti d’opposition, la valse des trahisons, ont pour effet d’annihiler le débat démocratique sur le bilan du quinquennat et sur la préparation de l’avenir. Pour la première fois, le climat est au désintéressement général face à une présidentielle présentée comme jouée d’avance. La France connaît une tragédie démocratique.

  • La crise liée à la pandémie de la Covid-19 a consacré la résurrection de l’État sous toutes ses formes, État-providence, État-pompier, État régalien… et jeté une lumière glaçante, sur les lourdeurs et absurdités de la bureaucratie. Selon vous quel État va sortir de cette crise inédite et comment sortir de l’impuissance publique ?

Rien dans le déroulement de cette non-campagne ou dans le programme des candidats ne permet de concevoir une rénovation de l’Etat. A voir comment les choses se déroulent, la volonté démocratique de changer les choses est écrasée, inexistante. On peut même craindre aujourd’hui que ces phénomènes soient voués à s’aggraver : la hausse vertigineuse des dépenses publiques et celle de la dette vont se poursuivre, comme une drogue destinée à anesthésier les tensions dans le pays, son appauvrissement et sa désindustrialisation, l’impuissance des institutions. Cet effondrement se traduit par l’exubérance de la communication : le grand spectacle sert à recouvrir le désastre. On ne voit pas à ce stade ce qui permettra d’inverser la logique, en tout cas à moyen terme. La pente est raide…  Un jour, le pays se trouvera au pied du mur et la prise de conscience devra se produire, mais nous n’en sommes pas là.

  • Pendant cette pandémie les esprits libres se sont fait rares. La politique a ses propres exigences. Comment rester un « esprit libre » face au pouvoir de l’opinion et en admettant une obligation d’action ?

A mes yeux, le passe vaccinal est emblématique du pire de ce que la société politique peut produire. Cette mesure est rigoureusement inefficace et ne prétend même pas à l’efficacité (le vaccin n’empêche pas la transmission du virus). Sous le voile du progressisme, elle procède de méthodes de communication les plus douteuses : désigner implicitement une partie de la population – non vaccinée – comme bouc émissaire de maux qui tiennent en grande partie aux dirigeants politiques (réduction des moyens hospitaliers).  Son objectif déclaré – forcer les non vaccinés à se faire vacciner – n’a même pas été atteint. Et pourtant, le pouvoir persiste et signe, l’opposition soutient dans l’ensemble ces méthodes de même qu’une vaste majorité de l’opinion selon les sondages. Cela montre l’état de déliquescence morale et intellectuelle d’une société. Les quelques esprits libres et lucides qui gardent le cap dans la tempête doivent aujourd’hui s’unir par-delà les clivages du passé.

  • Lors de cette campagne présidentielle, le régalien sera inexorablement mis en avant, notamment dans une période chaotique marquée par la poursuite de l’augmentation de la violence. Pourtant la préoccupation des Français sur des questions fondamentales comme l’avenir de la démocratie française, les libertés sont très peu repris, pour quelles raisons ? La gouvernance doit-elle être un thème électoral pour 2022 ?

Parce que nous sommes avant tout dans le médiatique, l’émotionnel et l’immédiateté. S’intéresser à la préparation de l’avenir, notamment au fonctionnement de la démocratie française suppose un retour à la raison, à la prospective, à la capacité de se projeter dans l’avenir. Or, l’effondrement du niveau scolaire, depuis des décennies, annihile la capacité d’une société à réfléchir sur son destin. Ce nivellement et cet aveuglement touchent aussi bien la majorité des commentateurs que l’opinion en général.  Des images médiatiques montrant une agression vont provoquer une (légitime) émotion collective. Cependant, les spectateurs de ce drame ne vont pas pour autant s’interroger sur une faillite de long terme d’un système politique qui a abouti à l’impuissance de l’Etat et au chaos d’une société sur plusieurs décennies. L’affaiblissement de la culture politique et de l’esprit critique est au cœur de la tragédie démocratique.

  • Que voulez-vous dire sur la faillite des institutions ?

Le système politique français (pas seulement les institutions, mais leur pratique et la culture politique) a abîmé la démocratie. Il a engendré une sorte de gourou élyséen qui absorbe toute la substance du politique. La vie publique se limite pour l’essentiel à sa logorrhée quotidienne et ses gesticulations médiatiques tournées vers sa réélection, comme dans un vulgaire régime autocratique. De fait, le gouvernement n’existe plus, le parlement est annihilé, les collectivités territoriales affaiblies, la presse en partie neutralisée. Nul ne décide plus grand chose dans le champ du concret. La politique se réduit pour l’essentiel à n’être qu’un spectacle éthéré destiné à occuper les esprits. La faiblesse se déguise en autorité. Les courroies de transmission entre le pouvoir central et la Nation sont rompues. Tout est à repenser, à reconstruire. La démocratie est à réinventer, par le référendum, le renouveau des libertés locales, la refondation de la représentation populaire… Tout le reste en dépend dès lors que la gouvernance conditionne l’efficacité des politiques. Mais qui cela intéresse-t-il ?

  • Jamais la liberté n’a autant été abîmée. Cet état dont le gouvernement nous a privé et où l’opposition a eu bien du mal à la défendre. Comment la droite doit elle retrouver ces fondamentaux ?

Nous en saurons plus dans quelques mois, en fonction du résultat des présidentielles et législatives. Mais a priori, elles ne se présentent pas dans les meilleures conditions pour les idées auxquelles nous croyons.  Lors de la crise sanitaire, une poignée d’hommes et de femmes, généralement étiquetés à droite, mais pas seulement, parlementaires et intellectuels, ont montré leur attachement à la liberté face à l’Absurdistan bureaucratique et à la terrifiante dérive du passe vaccinal ainsi que leur lucidité et leur force de caractère en résistant au vent de folie collective. Il leur faut s’unir, même en partant d’un tout petit nombre, et tenter de reconstruire quelque chose en livrant la bataille des idées.

MT

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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75 commentaires pour Entretien avec le site « Droite de demain » sur la tragédie démocratique française

  1. Anonyme dit :

    Il faut écouter le discours de Porochenko en 2014 mais aucuns médias occidentaux n’ont relayé ce discours haineux .

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  2. Zonzon dit :

    Si Platon avait connu l’islam il n’est pas assuré qu’il aurait écrit La République !

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  3. Anonyme dit :

    La droite occidentale est tombée dans le guet-apens du politiquement correct

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  4. Zonzon dit :

    Je crains que mon évocation de l’« effondrement du niveau scolaire », lequel a provoqué une intéressante discussion avec Gribouille et Citoyen, ait été à côté de la plaque. La faute en revient à MT qui a jugé bon de shunter un envoi préliminaire où je faisais part de mon souci au sujet de « l’invasion migratoire », cause principale de la chute libre du système éducatif à tous les niveaux. Et de bien d »autres choses !
    Mais … comme on dit … il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut point voir …
    Pareil pour la surdité !

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  5. Sganarelle dit :

    Macron devrait remercier Poutine , grâce à la tourmente actuelle il y a gros à parier que personne n’ait le courage d’oser changer de président.
    Si il y a une défaite pour la France ce sera bien celle.- là .

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    • sganarelle, oui, remercier le covid et Poutine… Que voulez-vous faire? On se console méchamment en se disant que c’est lui et tous ses lèche-cul, personnellement, qui à froid vont payer cela très très chèrement.
      MT

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    • Eric dit :

      Cher Maxime,
      Je pense plutôt que ce sont nous, les citoyens, qui allons payer très chèrement ce nouveau mandat si il est confirmé.

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    • Oui Eric, c’est évident et ne parlons même pas de notre pauvre pays…
      MT

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