« La nouvelle société », après le « nouveau monde »? (pour Atlantico)

L’économie mondiale est marquée par une hausse des inégalités au sein des pays développés et un ralentissement de la croissance. Face à cette réalité économique, certains hommes politiques de droite comme Xavier Bertrand entrevoient la possibilité de remettre au goût du jour une droite sociale, proche du peuple. Ont-ils une véritable arme idéologique pour répondre aux problèmes économiques et politiques de notre temps

 La présidence Macron s’est faite l’étendard du l’ultra-libéralisme sans frontière et de l’économie start-up qui sont sa marque de fabrique. Cela ne veut évidemment pas dire que la réalité coïncide avec cette image. Pour autant, l’hôte de l’Elysée incarne sur le plan de l’imaginaire collectif des Français cet ultra-libéralisme. Dans un objectif de conquête du pouvoir, la droite peut en effet avoir intérêt à prendre le contre-pied de cette posture et  renouer avec un discours social, axé sur la protection des plus démunis. Dans un pays qui compte 3 à 5 millions de chômeurs, 9 millions de personnes sous le seuil de pauvreté, 4 millions de mal-logés ou sans logis, ce thème est adapté à une reconquête du pouvoir. Toute la difficulté, en cas de succès électoral, consistera à passer du discours à l’action… Compte tenu du poids de la dépense publique dans notre pays et d’une législation sociale déjà extrêmement contraignante pour les entreprises au vu de la lourdeur du code du travail, les marges de manœuvre sont réduites, pour ne pas dire infimes. Le risque est donc d’aggraver encore la crise de confiance entre la classe dirigeante et l’opinion en ne tenant pas des promesses impossibles à tenir.

 Historiquement, la droite sociale ou le gaullisme social a défendu l’idée de la participation ou de l’intéressement. C’est ainsi qu’elle prétendait concilier les aspirations des entreprises et celles des salariés et répondait au marxisme. Est-ce suffisant aujourd’hui pour répondre aux nouvelles ruptures fondées sur l’économie et qui se répercutent en politique ?

Le problème, c’est que le thème n’est pas nouveau. La participation fut le mot clé de la politique intérieure du second mandat présidentiel du général de Gaulle à partir de 1965.  Elle avait pour objectif d’associer les travailleurs à la gestion de l’entreprise dans le cadre d’une co-gestion paritaire avec le capital. Elle ressort périodiquement, lors des présidences de droite ou de gauche, comme un serpent de mer, un remède miracle quand on ne sait plus quoi inventer. En 1995, Jacques Chirac fut élu sur le thème de la lutte contre la fracture sociale qui passait par une relance de la participation. Philippe Séguin lui-même voulait incarner cette idée. Le fait est qu’on en parle depuis plus d’un demi-siècle mais sans l’avoir jamais vraiment réalisée. Cette participation a-t-elle un sens dans le monde moderne, une économie ouverte, sans frontière, dominée par les multinationales qui imposent un impératif de retour sur investissement et de rentabilité ? La France peut-elle, dans ce contexte, se singulariser par un système de co-gestion généralisé ? Il est permis de penser qu’au-delà de la force du mot, la participation, au sens de la co-gestion, qui n’a jamais vu le jour en plus d’un demi-siècle, est largement utopique dans le contexte d’une économie ouverte.

 Xavier Bertrand a parlé d’une « nouvelle société » avec nos confrères du Point, reprenant le terme de Chaban-Delmas. Le projet de Chaban-Delmas consistait à rénover l’Etat en favorisant la décentralisation et en réduisant son emprise sur la société et sur l’économie. Est-ce de ce côté que devrait se tourner la droite ? Quelle différence avec le discours d’Emmanuel Macron ?

 « Nouvelle société » est une formule, un slogan. Il y a eu en 2017 le « nouveau monde » qui devait ouvrir une ère d’exemplarité, d’optimisme et une « extraordinaire renaissance ». On sait ce qu’il en est advenu. Aujourd’hui, le thème d’une « nouvelle société » est ainsi exhumé pour faire écho à celui du « nouveau monde ». On peut tout mettre derrière cette formule : décentralisation et libéralisme certes, mais aussi rayonnement, fraternisation, bonheur… Il n’est pas du tout certain qu’après la déception du « nouveau monde », le pays soit prêt à être séduit par la « nouvelle société ». Les Français, échaudés par les déceptions, attendent tout autre chose de la politique que des slogans et des chimères. Quelles mesures concrètes, opérationnelles pour réduire le poids de la fiscalité et de la dette publique, pour combattre la pauvreté et le chômage de masse qui ne s’améliore en aucune façon au regard de la situation des pays comparables, comment améliorer la gestion de l’immigration, la maîtrise des frontières et restaurer la sécurité dans la rue, comment enrayer l’effondrement du niveau scolaire ?  Les Français sont beaucoup plus lucides que ne semblent le penser les dirigeants politiques. Ils ne veulent plus être manipulés par des postures et des slogans mais ils veulent être gouvernés par des actes.

 

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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21 commentaires pour « La nouvelle société », après le « nouveau monde »? (pour Atlantico)

  1. carlo dit :

     » Les Français sont beaucoup plus lucides que ne semblent le penser les dirigeants politiques. Ils ne veulent plus être manipulés par des postures et des slogans ».
    Nos dirigeants l’ont compris. Il est par exemple désormais permis de faire la différence entre un migrant et un réfugié, ce qui était interdit il y a peu. Ils ont également compris que les Français étaient opposés à une pratique jupitérienne du pouvoir.
    Mais cette prise de conscience n’entraînera pas de changement de l’orientation politique du gouvernement actuel, lequel reste prisonnier de son idéologie « progressiste », ultralibérale, européiste et mondialiste.
    Dès lors, le gouvernements est condamné à l’envoi de signaux contradictoires, conformément à la logique illusoire du « en même temps » prônée par EM.

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  2. Philippe Dubois dit :

    Bonjour Maxime

    Ils étaient trois
    Ils attendaient patiemment l’élection promise de Juppé à la présidence de la république.

    En attendant d’entrer en compétition afin de lui succéder au terme de son mandat unique, ils ont choisi chacun une région.

    Manque de bol, (pour eux, pas pour la France) Juppé s’est pris une gamelle
    Adieu, veau, vache, cochon, couvée

    Il y en a un qui s’est cramé tout seul, comme un grand, malgré un parcours scolaire long comme un jour sans pain
    Une autre fait la feuille morte flottant selon l’air du temps

    Il en reste un, qui s’est fait oublier, dans le Noooooord, qui montre le bout de son nez en proférant quelques énormes sonneries
    M’est avis qu’il va chopper une pneumonie

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  3. André Lugardon dit :

    « Si les hommes de notre temps ne trouvent pas aux problèmes qui déchirent le monde de solutions fraternelles, c’est peut-être la condamnation des hommes de notre temps, ce n’est pas une condamnation de la fraternité ».

    Romain Gary – L’affaire homme (2005)

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  4. EMarquet dit :

    Mr Bertrand se voit en haut de l’affiche.
    Il fait (c’est à la mode en ce moment) acte d’humilité, déclarant qu’il est resté très provincial, reconnaissant ses erreurs lorsqu’il était ministre (ministre de la Santé sous Chirac, ministre du travail sous Sarkozy, où Il ne m’en souvient pas qu’il ait brillé !), et avouant qu’il avait pris la grosse tête.
    Courageusement, il a fui le navire LR en perdition, se faisant élire en région avec l’appui des socialistes, et il a voté Macron. Beau parcours d’opportuniste. Belle carrière pour un assureur local.
    Pour monter sur le podium national, on lui demandera certainement plus que l’habileté d’un gestionnaire encaissant des primes d’assurances et se mettant aux abonnés absents lorsqu’il s’agit de régler les sinistres.
    Mais à dire vrai, pourquoi pas lui ? Il ne déparerait pas sur la brochette des impétrants au trône.

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  5. carlo dit :

    « Ils veulent être gouvernés par des actes »
    Ils veulent aussi se gouverner davantage eux-mêmes et définir eux-mêmes les grandes orientations du pays, notamment en ce qui concerne l’Europe, les frontières, les services publics… L’élection présidentielle ne permet pas de trancher de telles questions ; ce n’est d’ailleurs pas son rôle.

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  6. Aurelien dit :

    Bonsoir, le problème c’est que notre président est un illuminé, un néo marxiste qui croit aux individus interchangeables sans racines, son projet sur la famille d’encadrement des individus est digne d’autres régimes (quand on songe que ce type n’a pas d’enfant, pas de famille ça laisse songeur). Moins d’idéologie, pas de cynisme et un peu des valeurs qui ont fait notre civilisation et les politiques gagneraient en popularité.

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  7. Gerard Bayon dit :

    Bonjour à toutes et à tous,
    Depuis 1969, les Français ont essayé : la droite ferme et molle, le centre, la gauche y compris pendant quelques mois avec les communistes, pour quels résultats ? Le chômage a continué de croître malgré quelques courtes phases de baisse, les pauvres sont de plus en plus nombreux et globalement les Français s’estiment de moins en moins heureux.
    Alors que valent les petites phrases de l’opportuniste X. Bertrand que l’on connait surtout comme un bel exemple de girouette politique , toujours proche de celui qui tient le manche ?
    Même dans sa région qu’il dirige grâce aux voix de feu le PS, il ne parait pas si estimé qu’il semble le prétendre, alors permettez-moi de considérer les paroles de ce personnage tout aussi mégalomane que ceux qu’il copie, comme sans intérêt et sans avenir pour notre pays.

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  8. André Lugardon dit :

    Nouvelle société ou nouveau monde l’essentiel est de « se tenir loin des gens négatifs: ils ont un problème pour chaque solution. » (Albert Einstein mais je me demande si c’est vraiment de lui.)

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  9. Janus dit :

    Qualifier Macron d’ultralibéral c’est faire injure aux libéraux : Macron n’est que le nieme avatar des planistes et des amoureux de la centralisation jacobine et soviétique et comme tous ceux-là il échouera. Le slogan de la nouvelle société, Pompidou en avait dit en son temps tout ce qu’il fallait en penser : rien sinon une formule creuse chantée comme un mantra par un homme politique dont l’intelligence analytique n’était pas la caractéristique première. Quand aux réformes à mener, elles passent par un effort de contrôle et de limitation des dépenses de l’Etat et par une réduction drastique du poids de celui-ci et à marches forcées : C’est ce qu’ont fait les canadiens, les suédois, les néo-zélandais et les australiens : Il ne semble pas que ces pays se soient effondrés après la purge.
    Rien ne peut venir des hommes de l’état, qui ne vivent que par lui et qui, donc, ne vont rien faire pour limiter leurs prébendes, consciemment ou non. Un très proche de ma famille, polytechnicien travaillant dans le privé après un doctorat obtenu en Suisse, ne voit que très peu de ses camarade de promotion avoir rejoint le secteur privé et si certains sautent le pas, c’est pour aller de la DDE ou du ministère de l’industrie vers VINCI, EIFFAGE ou BOUYGUES….
    Il faut un plan de marche préétabli à la prise du pouvoir, des textes prêts et validés par les experts du groupe qui brigue le pouvoir et une mise en place rapide et sans faiblesse. (Les atermoiements de Macri en Argentine aboutiront au retour des péronistes et à la ruine totale de ce pays naguère riche) MACRON a montré qu’un pouvoir sans scrupules pouvait casser dans l’œuf les révoltes catégorielles . Or une réforme via la diminution du poids de l’État verra les fonctionnaires et leurs affidés protester et déclencher grèves et manifestations. Il faudra donc faire donner les forces de l’ordre .
    Il il faudrait une combativité de tous les instants pour museler la classe jacassante qui est le fléau du XXIe siècle : Composée d’ignares, voire de crétins conformistes et prêts a tout pour défendre le camp du bien.
    Quelques décisions immédiates seraient efficaces en un instant : Abrogation de toutes les lois mémorielles, abrogation des textes permettant à des associations de se porter partie civile, fin des subventions aux partis politiques, aux syndicats et aux associations de tous poils, fin des subventions à la presse, interdiction à un oligarque de posséder un organe de presse ou des parts dans celui-ci s’il est susceptible de participer à des marchés publics,une seule chaine de TV publique directement aux mains du pouvoir de façon claire, les autres chaines vivant de leurs moyens propres, fin des subventions au cinéma et au livre (les techniques d’édition modernes ne justifient plus le prix unique du livre), remise en cause de nombreuses normes qui polluent toutes les activités sans réduire en quoi que ce soit les nuisances censées être ainsi éradiquées, incompatibilité totale entre la fonction publique et les fonctions électives, information par les fonctionnaires de leurt appartenance à la FM cf les difficultés du juge de Montgolfier dans ses actions contre la corruption… etc etc.
    Xavier BERTRAND n’est pas l’homme d’un tel challenge. Il n’a rien d’un Hercule et encore moins d’un Tardieu…

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  10. new dit :

    Notre presse, nos radios, nos télés donnent toujours la parole à ceux à qui l’on doit la situation actuelle de la France. Des cloportes, des rapaces, des escrocs, des traitres !
    Leur monde que nous présente Charlie Chaplin dans le court métrage ci-dessous :

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  11. Timéli dit :

    Xavier Bertrand avance tout doucement ses pions dans la perspective de la présidentielle de 2022. Fort d’une belle cote d’amour dans la Région des Hauts-de-France dont il est le président, il s’estime le mieux placé, à droite, pour remporter ladite élection. Aujourd’hui, il ne fait plus partie de LR, qu’il a quitté, au lendemain du second tour de la présidentielle de 2017 parce que son parti n’avait ouvertement dit non au vote RN (Wauquiez avait laissé libre choix à ses électeurs et ouvert la porte au vote blanc), ce qui peut constituer un énorme avantage pour lui dans la mesure où il n’aura pas à subir une éventuelle primaire pour désigner le candidat LR. Chacun peut penser ce qu’il veut de Xavier Bertrand, mais, personnellement, je pense qu’il a de sérieux atouts dans son jeu et qu’il peut agréablement surprendre. Mais ce n’est qu’une hypothèse et non une certitude.

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    • Janus dit :

      C’est un petit bonhomme sans envergure ni intellectuelle ni sociale, un petit notable du fin fond de l’Aisne, bref même pas M Toutlemonde qui aurait le bon sens si français. Rien à attendre de cet ectoplasme.
      Malheur à la France si elle n’a rien d’autre à présenter…

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  12. Curmudgeon dit :

    Et c’est quoi, exactement, « l’ultra-libéralisme » ?

    En tout cas, en France, il faut être contre.

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  13. michel43 dit :

    PAUVRE Bertrand ,,,encore une fois, il nous prend pour des imbéciles ,,,tout comme le Macron ,a cette émissions ,le jeune du RN ,a très bien décrit la situations ,immigrations , chômage et pauvreté, ,sont les vrais problèmes de notre société ,Maxime et la LEPEN ,on des point communs ,l »immigrations ,maitrise de nos frontières ,pauvreté ,sécurité dans nos rue ,et comment font pour vivre nos anciens avec 800 euros ,un SCANDALE,,,la rue va finir part gagner ,si il ne redescende pas sur terre

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  14. Mildred dit :

    Monsieur Tandonnet,
    Que ce soit pour Atlantico ou pour qui que ce soit, combien de ces articles avez-vous signés qui précisément, s’arrêtent au moment où ils devraient commencer ?

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  15. Citoyen dit :

     » Elle ressort périodiquement, lors des présidences de droite ou de gauche, comme un serpent de mer, un remède miracle quand on ne sait plus quoi inventer.  »
    Ben voila … Ce qui est très drôle, c’est que ce soit Bertrand qui se colle à cette resucée, sachant qu’il doit sa sinécure aux socialos … Aurait-il besoin de caresser un certain électorat dans le sens du poil ? … Pour assurer sa rente ?… Allez savoir …
     » co-gestion  » ? … Pourquoi pas auto-gestion … Il suffit de se souvenir de l’expérience de Manufrance.

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    • Citoyen dit :

      Et quand on veut se faire une idée plus large de ce clown, qui se propose d’imiter l’autre l’autre clown Raffarien, on peut lire aussi ceci :
      https:/ /www.atlantico.fr/decryptage/3579487/vous-avez-la-parole–quand-xavier-bertrand-propose-un-retour-a-raffarin-droite-les-republicains-eric-verhaeghe

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  16. Fredi M. dit :

    ils veulent être gouvernés par des actes.

    Exactement !

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