La faillite des institutions

images[3]La vie publique est faite tout autant de personnalités que d’institutions. L’actualité, la surface des choses, se focalise sur les personnes, le culte ou les scandales qui s’y attachent, mais on oublie tout ce qu’il y a derrière, en particulier le contexte institutionnel, socle de la vie politique. Or, nos institutions, qui paraissent définitivement acquises et au-delà de toute critique, sont aujourd’hui en faillite complète. Un système qui place au pouvoir une équipe pendant cinq ans, échappant à tout risque politique, toute mise en cause de sa responsabilité, quels que soient ses résultats, est profondément vicié. Il favorise la coupure entre le peuple et la classe dirigeante, la corruption, les politiques irresponsables, catastrophiques et obtuses. Un exemple : le plus haut dirigeant français annonce une amélioration de la situation de l’emploi d’ici la fin de l’année. En principe, dans un système qui fonctionne, s’il échoue à respecter une promesse de cette importance, de cette gravité, il doit être remercié. Or en France, aujourd’hui, il peut tout dire et tout faire, plonger le pays dans le chaos,  il est assuré de rester en place pendant 5 ans.  Les IIIème et IVème République (de 1875 à 1958), étaient rongées par une instabilité chronique. Le président du Conseil, responsable de l’action gouvernementale,  changeait plusieurs fois en un an. En revanche, quand il réussissait, son mandat pouvait durer deux ou trois ans (Jules Ferry, Méline, Waldeck Rousseau, Poincaré)… Le système avait ses défauts mais aussi sa qualité de souplesse et d’adaptabilité. Notre Vème République est en revanche totalement sclérosée. Le détenteur du pouvoir, le véritable responsable du gouvernement, c’est-à-dire le chef de l’Etat, peut conduire le pays à l’abîme ; peu importe, il est inamovible pendant 5 ans. En démocratie, cette situation est tout simplement invraisemblable. Dans l’esprit de la Vème République telle qu’elle a été instaurée en 1958 par le général de Gaulle, les choses devaient se passer tout autrement. Il y avait un Chef de l’Etat arbitre, chargé de la politique étrangère, des grandes orientations, du destin de la nation, mais la politique au quotidien relevait de la responsabilité du Premier ministre, par exemple en matière de lutte contre le chômage ou l’insécurité. Or ce dernier était clairement responsable devant le Parlement qui pouvait le renverser (c’est arrivé une fois en 1962). Une politique aggravant la précarité, le chômage, l’insécurité, la division des Français pouvait être sanctionnée à tout moment. Mais nous le voyons bien, ce n’est pas du tout ainsi que les choses fonctionnent aujourd’hui : président inamovible, omnipotent et en charge de tous les dossiers, Premier ministre effacé, relégué au second plan, Parlement croupion, inféodé à l’exécutif par la logique du « parlementarisme majoritaire ». Le système politique est bloqué, nous conduit au précipice. J’ai toujours vécu, comme beaucoup de personnes, dans le culte de la Vème République créée par le Général de Gaulle. Or, la Vème République est gravement malade, totalement paralysée, presque moribonde. Elle n’a plus vraiment de rapport avec le régime mis en place par de Gaulle qui devait au contraire lui permettre de décider et de gouverner efficacement, en particulier pour mettre fin à la guerre d’Algérie. S’il reste un soupçon de lucidité dans ce pays, la priorité absolue du gouvernement qui sera issu de la prochaine alternance doit être de transformer en profondeur les institutions pour pouvoir diriger le pays : redéfinir les rôles entre le chef de l’Etat, chargé de l’intérêt national et le Premier ministre, seul responsable du gouvernement au quotidien, retour à un mandat présidentiel de 7 ans, restauration du rôle de contrôle du parlement, renouveler la démocratie directe en facilitant le recours au référendum, etc. Sinon, cela ne servira à rien, nous irons de catastrophe en catastrophe.

Maxime TANDONNET

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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24 commentaires pour La faillite des institutions

  1. GUENIN Pierre dit :

    Après avoir évoqué sa vie sexuelle très dense dans une récente interview, le poète David Dumortier est intervenu en classe de CM1. (la presse…)

    Ca suffit!

    Moi, simple citoyen Français, seul et parfaitement inconnu, Retraité, Père et Grand-Père de famille, respectueux des Lois et décrêts en vigueur dans mon Pays, que, par ailleurs j’ai servi, en son temps, les armes à la main
    , civilement tolérant des us et coutumes et moeurs de mes concitoyens et, en vertu des droits et devoirs que me donnent la Constitution Française je demande que soient recadrés (juridiquement et techniquement), par les Autorités juridiques et politiques françaises, tous les enseignants des écoles de la République.

    Je rappelle que l’Enseignement, en France, est une mission de service public régalienne parfaitement réglementée. Donc, dans le cadre d’une obligation de respect des textes qui organisent le fonctionnement des enseignants et la protection des jeunes écoliers français j’exige que cessent, immédiatement, les dérives de prosélytisme en faveur de l’ homophilie, la pédophilie, la pédérastie et d’une manière générale toute tentative de détournement de mineurs dans les écoles de la République.

    Les enseignants sont payés par les contribuables pour enseigner selon des directives qui leur sont imposées par leur Ministère et nullement pour avoir des opinions où des états d’âmes (ce qui est valable pour tous les fonctionnaires, d’ailleurs, qui, lorsqu’ils sont « en fonction » doivent « oublier » leurs points de vue de citoyen!).

    Je demande ce rappel à l’ordre républicain, l’application stricte des textes législatifs et ce recadrage dans la pratique du Service Public français.
    Exécution! J’ai adressé ce message, par mail, à la Présidence de la République le 14/02/2014

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    • Je suis entièrement d’accord avec vous Pierre. Comme vous, je suis militaire à la retraite après 43 ans de bons et loyaux services. Je suis aussi respectueux des lois en vigueur dans mon pays et comme vous je m’insurge contre tout ce qui sa passe actuellement au sein de l’Education nationale. C’est là où je voulais en venir. L’Education nationale porte mal son nom. L’éducation de nos enfants, c’est nous qui la faisons. Nos enfants n’appartiennent pas à l’Etat. Je suggère d’ailleurs que l’on supprime au plus tôt cette appellation ridicule pour la remplacer par enseignement national. Après tout, on ne dit pas des éducateurs il me semble mais des enseignants lorsque l’on parle des professeurs. Les éducateurs exercent leurs talents dans d’autres établissements…… Idem pour ce qui est de la religion. On parle d’éducation religieuse lorsque celle-ci est exercée par les parents, sinon on parle de formation religieuse. Alors, que l’école et les enseignants s’occupent d’enseigner et évitent de se disperser dans des activités qui ne sont pas de leur domaine. Chacun chez soi n’est-il pas?

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    • GUENIN Pierre dit :

      Tout-à-fait d’accord. Merci de votre réponse.

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  2. L'Amiral dit :

    Cher Maxime,
    Je partage votre analyse. La 5° République est à bout de souffle mais il faut dire qu’on passe son temps à modifier la constitution et qu’on a fait une faute très grave en instaurant le quinquennat.
    Mélenchon a lancé son slogan « Pour la 6° République ». Celle qu’il veut n’est sûrement pas la nôtre mais sur le tempo n’aurait-il pas raison et ne devrions nous pas militer pour son avènement. Nous aurions alors le champ libre pour imaginer ce que pourrait être cette République et se placer dans une perspective encourageante de préparation de l’avenir au lieu de se morfondre dans le regret des gloires passées. En plus piquer une idée de Mélenchon ça ne manquerait pas de piquant. Chiche?

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    • regisollivier dit :

      Le Colonel est d’accord avec les propos de l’Amiral, notamment sur la mise en place du quinquennat. Comme je le disais récemment, je milite pour le rétablissement d’un septennat, mais un septennat unique. Quant à « piquer » une idée à Mélenchon, pourquoi pas. Je l’entends déjà éructer sur point.

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  3. Bernard06 dit :

    Goethe parlait de l’ombre que projettent en arrière les évènements à venir. Froid dans le dos depuis quelque temps…

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  4. noop dit :

    Bonjour Maxime,
    je souscris à votre constat, mais m’interroge sur les remèdes.
    Et si la crise des institutions était « le doigt qui montre la lune »… Avez vous remarquez comme l’ensemble des penseurs occidentaux de notre temps sont pessimistes lorsqu’ils se projettent dans un avenir proche ? C’est la phrase de Chantal Delsol un soir sur le plateau de Taddeï qui résume bien ça je trouve : « On a l’impression que l’on a un nuage au dessus de nous, quelque chose va éclater, on ne sait pas quoi, quelque chose nous attend… »
    Et si tout simplement nous étions à la fin d’une ère, d’un âge, et au début d’un autre, celui du numérique qui changera et boulversera tout jusqu’à notre essence même ? Ce qui rend nos discussions (que j’apprécie beaucoup) désuettes et surtout obsolettes.
    A nous ancrer dans l’humanisme, dans la démocratie, ne nous rendons nous pas aveugles et impuissants pour les temps qui viennent si vite sans nous demander notre avis ?
    Ne se donne-t-on pas l’illusion, moi le premier, que nous pouvons encore avoir prise sur notre destion d’humain, alors qu’il nous échappe de plus en plus ?
    Parler des institutions (sujet qui m’intéresse beaucoup), sans prendre en compte l’avènnement d’une « post-humanité », n’est-il pas un coup d’épée dans l’eau, cautères sur jambes de bois, ou écopage à la petite cuillère ?
    Vous voyez je pose beaucoup de questions et j’ai bien peu de réponses… j’aurais du mieux travailler à l’école.

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  5. Cher M. Tandonnet,

    Personnellement, je crois qu’il est trop tard. Trop tard pour réformer pacifiquement et rationnellement notre pays et nos institutions.

    J’ai cru, et j’ai même fait plus que croire en M. Sarkozy, puisque j’étais tombé dans l’illusion que c’était un personnage providentiel à cause de l’énergie qu’il dégageait.

    Las! ce n’était qu’illusion et la désillusion fut terrible, à la hauteur des espoirs.

    Nous avons maintenant cet ahuri de Hollande, cet homme d’une parfaite superficialité qui ne connaît ni doutes, ni désirs puisqu’il n’a aucune conviction sur rien. Son sourire stupide me glace de plus en plus. Il verse maintenant dans la tyrannie avec l’emprisonnement de ce jeune homme. Depuis combien de temps n’avons-nous pas eu de prisonniers politiques en France?

    a période 2007-2012, l’histoire nous le dira dans quelques décennies, était sans doute notre dernière chance de réforme. Après la nullité abyssale des années Chirac, nous avions encore une chance, nous l’avons laissé passer.

    A quoi s’attendre maintenant?

    Je pense que la France comme le monde va entrer dans une période de grands troubles et ce pour plusieurs décennies. Ne croyant plus à la réforme, je ne crois pas non plus à la révolte. Nous sommes trop attachés à notre bien-être matériel.

    Pour moi, l’Europe et plus généralement l’Occident va entrer dans une période de grande régression culturelle, une implosion dans laquelle une grande confusion règnera. Il n’ y aura pas d’explosion mais une implosion nihiliste. Certes, le mouvement des Veilleurs et les différentes « Manif pour tous » me donnent de l’espoir mais un mouvement de réforme culturelle pourra-t-il partir de là, je ne le crois pas.

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  6. crisfi dit :

    Nous croyons vivre un cauchemard, comment a-t-on pu en arriver là ?
    Comment, quand, qui…qui pourra nous sauver, sauver la France ?
    L’inquiétude est présente partout, le commerce en province est moribond,
    Dans les rues, les parcs, les magasins, toutes les musulmanes portent le voile :
    C’est un symbole, le symbole du rejet ou bien d’autre chose… Nous sommes en pleine crise de
    Civilisation et les hommes qui sont en place (par défaut) , ne font qu’enfoncer un peu plus ce pays et, ils semblent en jouir… Vos propositions, Maxime, sont intéressantes, nous espérons que vous avez de par votre position, des contacts utiles…
    Cordialement.

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    • Crisfi, cauchemar est le mot, en effet… Non, il n’y a hélas aucun espoir de mon côté, aucun réseau, aucune relation, aucun projet… Désolé…
      Bien à vous
      Maxime

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  7. JD75 dit :

    Cher Maxime,
    Je ne peux moi aussi que valider ce constat. C’est encore l’orgueil démesuré du Grand Charles qui nous met dans la panade…
    Ce commentaire de haute philosophie énoncé, il serait plus intéressant de savoir pourquoi, pratiquement sans exception depuis la mort du dit Charles, nos dirigeants ont fait les choix contraires aux intérêts bien compris de leur peuple, dont ils n’étaient que les représentants, et non les maîtres et seigneurs.

    Bien cordialement

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  8. Freddie dit :

    Oui, certes, vous avez raison. Mais il faudrait des chef intègres pour cela. Or, les gens intègres ont souvent du mal à réussir. Ce n’est pas qu’ils soient idiots, mais tout simplement la plupart des gens ont du mal à s’identifier à eux, et donc à les élire.

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  9. Ping : LeColonel_fr » Blog Archive » La faillite des institutions

  10. Cher Maxime, Tout ceci est bien dit et je valide la totalité. La France est sclérosée jusque dans ses fondements. Au plus haut niveau de l’Etat et de ses institutions. Hélas, cette situation fait le bonheur de ce pouvoir sorti des urnes « par défaut ». Et c’est le propres des incompétents de vouloir se maintenir en place « coute que coute ».pire infamie, De diviser toutes les strates de la société pour mieux régner et, pire infamie, avoir recours désormais à l’emprisonnement politique. J’ajouterai ceci en rapport direct avec ton excellent billet. Un nouveau parti de droite doit voir le jour sous peine d’être laminée lors des prochaines échéances électorales. Peu importe le nom parti auquel je pense.

    In fine, je pense pour ma part que nous devrions revenir au septennat et je suggère que ce mandat soit unique.

    Bien amicalement.

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    • Régis, le nom de ce futur parti pourrait-être « l’Union républicaine » vous ne trouvez pas, avec un arrière-plan de résistance, d’énergie et de volonté puisque tel était le nom du parti de Léon Gambetta!
      Amitiés
      Maxime

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    • regisollivier dit :

      Maxime, les grands esprits se retrouvent car c’est exactement le nom auquel je pensais. Et derrière lequel je suis prêt à engager le combat. Bien amicalement. Régis.

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  11. michel43 dit :

    Maxime. je sens dans votre écrit que votre moral est au plus bas? nous avons entre ,vous et moi, des différents sur le fond et la forme de l’avenir de notre pays ,nous autres, le priver ,c’est notre entreprise ,,donc notre argent les politiciens ,c’est tout le contraire, voila pourquoi notre pays est en faillite, 35 ans d’emprunts, des irresponsables dans tout les domaines ,Donc, vous devriez vous regrouper, faire des propositions pour relever notre pays, 15 propositions approuver pars référendum ,c’est a VOUS de faire cela, avant qu’il ne sois trop tard Amitié

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    • Michel43, concernant la politique à mener à propos de l’entreprise privée, je vous ai toujours dit que j’étais à 100% d’accord avec vous! Là je parlais d’autre chose, des institutions nationales qui doivent permettre de conduire une politique efficace, notamment en matière économique!
      Amitiés
      Maxime

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  12. Sceptique dit :

    François Hollande est l’élu de….l’ignorance. Crasse! Mais, Lui, le sait bien. Il tient son monde à sa façon, en l’enfumant. Ce qui me parait l’essentiel, c’est que le mécontentement, légitime, ne puisse arriver à un désordre dont l’extrême gauche chercherait à profiter. L’outil des institutions chauffe, mais ne cassera pas.

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