Cap 2022, les scénarios (pour Atlantico)

69% des Français sont convaincus que M. Macron ne sera pas réélu. Peut-on imaginer un scénario similaire à celui de 2017 dans lequel un candidat inattendue ou une situation inattendu viendrait faire dérailler le train du match retour ? En d’autres termes, les mêmes causes pourraient être produire les mêmes effets ? 

 Bien sûr, deux ans et quatre mois à l’avance, rien n’est joué. La part de l’incertitude est colossale. M. Macron est fortement impopulaire avec un taux de confiance de 25 à 30%. D’ici deux ans, la situation économique peut se détériorer. Depuis la crise des gilets jaunes, suivie du mouvement social, la France est plongée dans un chaos permanent. Les chiffres de la dette publique, de la délinquance, de l’immigration, sont préoccupants. Le « tout communication » ne permettra pas forcément de couvrir un bilan. Quant à Mme le Pen, elle porte toujours, aux yeux de 80% des Français, l’image inacceptable du parti créé par son père au début des années 1970 auquel s’ajoute un scepticisme général sur ses capacités personnelles et celle de son parti à conduire une expérience gouvernementale. L’électorat est imprévisible. Face à un scénario tout ficelé que le système politico-médiatique s’obstine à lui imposer de manière aussi caricaturale une réaction de lassitude, de révolte et de refus est tout à fait envisageable, comme en 2017. Dans l’histoire, les surprises n’ont pas manqué aux présidentielles…

Qui pourrait être ce candidat inattendu et qui changerait la donne ? Faudrait-il l’arrivée d’un homme providentiel pour envisager la défaite d’Emmanuel Macron ? 

 Dans les périodes de grand trouble et de violence endémique, le scénario de l’homme providentiel peut être une issue à la crise. L’idée est celle de l’émergence d’une personnalité extérieure à la classe politique, à l’image, par exemple, du Général de Villiers dont il est beaucoup question même si lui-même ne semble pas intéressé. Mais pour que cette hypothèse se réalise, aujourd’hui, il faut parvenir à forcer l’attention médiatique : un candidat potentiel n’existe que s’il est invité à la télévision et à la radio. Le « sauveur » doit, presque mécaniquement, être adoubé par le pouvoir médiatique, ce qui est loin d’être gagné. Et puis après, que faire, sans cadres, sans troupes, sans parti ? … En tout cas, ce qui est sûr, c’est que dans le climat chaotique dominé par une incertitude absolue, de perte de tous les repères traditionnels, sur les ruines du système politique français, tout est possible et rien ne peut être exclu d’avance (Probabilité, 10%).

Hormis ce scénario du sauveur providentiel extérieur à la classe politique, quels sont les scénarios envisageables ?

Le premier est la réélection de M. Macron en 2022. 80% de la classe politique et médiatique parie aujourd’hui sur cette perspective en l’absence d’autre scénario évident. Ensuite, c’est beaucoup plus compliqué. L’illusion du « nouveau monde » et du « renouvellement » étant dissipée, le parti LREM profondément déchiré et discrédité, sur quelle majorité pourra-t-il s’appuyer ? Et sur quel projet ? Un sous-scénario, complémentaire à celui-ci, serait l’hypothèse où le président Macron ne se représenterait pas et laisserait la place à Edouard Philippe. Les cartes pourraient être alors rebattues, une partie de l’électorat de droite se ralliant à lui. (Probabilité du scénario, 25%).

Le second est l’élection de Mme le Pen. Il n’y a aucune raison de l’exclure, même si les « experts », dans l’ensemble, n’y croient pas. Dans un mouvement de colère, les Français, de droite, du centre, comme de gauche, peuvent voter avant tout contre Macron par rejet viscéral du pouvoir actuel dans un climat de grave mécontentement. Après, le pays entrerait dans l’aventure : quelle majorité ? Quel gouvernement ? Quelle politique ? Le chaos – auquel nous assistons aujourd’hui – serait sans doute amplifié ou remplacé par un chaos encore pire. (Probabilité 20%)

Le troisième est une résurrection de la gauche. Il n’y a aucune raison de l’exclure totalement non plus. Dans le système politique français, il suffit qu’une personnalité parvienne à convaincre 21% à 22% des votants au premier tour des présidentielles, soit, en cas de forte abstention, 10 à 11% des électeurs, pour accéder au deuxième tour puis l’emporter face à la candidate RN. Les écologistes ont le vent en poupe. Une alliance LFI/PS/Vert peut fort bien réaliser la surprise, contre toute attente, en s’appuyant là aussi sur le mécontentement et le climat de revanche sociale. C’est pourquoi la candidature de Mme Ségolène Royal n’a rien d’absurde. (Probabilité 20%)

Le quatrième est celui du retour de la droite classique qui bénéficie de son ancrage local, d’une force de frappe parlementaire à l’Assemblée et au Sénat. Il lui faut parvenir à s’unifier derrière un leader, incarnant la sagesse, la vision, l’unité nationale, la sincérité, le respect du peuple, c’est-à-dire tout le contraire du « nouveau monde » d’En Marche. Dans le cadre d’un travail d’équipe, il lui faut aussi présenter un projet en adéquation avec l’attente des Français, ancré sur le retour de l’autorité de l’Etat, la paix civile et de la démocratie, la sécurité, la maîtrise des frontières. Pourquoi pas ? Mais rien n’est gagné !  (Probabilité 25%)

Maxime TANDONNET

 

 

 

 

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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73 commentaires pour Cap 2022, les scénarios (pour Atlantico)

  1. carlo dit :

    @ Janus
    « Comment un être sensé peut-il faire le panégyrique de cette femme… »
    J’espère que vous n’avez pas compris que je faisais le « panégyrique » de SR.
    J’évaluais ses chances, qui me semblent supérieures à celles de G Larcher pour les raisons que j’expose.
    MT lui-même avait envisagé cette hypothèse (« une candidature de Mme Ségolène Royal n’a rien d’absurde ») mais il estimait plus probable l’élection d’une personnalité issue de la droite « classique » ( 25% contre 20% pour SR), ce que je ne crois pas compte tenu de la profonde division provoquée par l’élection d’EM au sein de cette famille politique.
    N’oublions pas qu’une partie des électeurs de la droite « classique » se reconnaissent désormais parfaitement dans la politique d’EM. Au demeurant, AJ, CE, et même NS (et d’autres encore) soutiennent aujourd’hui EM.
    « S’il n’y a pas d’autre compétiteur que cette donzelle, pauvre de nous… »
    Il y aura d’autres compétiteurs, mais peu nombreux sont ceux qui pourront se qualifier au 2d tour aux dépens d’EM.
    L’élection d’un « sage » (plutôt que d’un « sauveur », expérience déjà tentée avec les résultats désastreux que l’on constate depuis 2 ans) comme Henri Guaino, JPC ou Hubert Védrine (et d’autres encore) me semble très peu probable, en raison du manque de notoriété de la plupart d’entre eux, mais surtout à cause des réflexes pavloviens de l’opinion et des médias qui attendent d’un candidat à l’élection présidentielle qu’il se présente … avec un programme de gouvernement.

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  2. Annick Danjou dit :

    Attention au virus il est arrivé chez nous soyez prudents

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  3. carlo dit :

    MLP devrait normalement être présente au 2d tour. Par suite, seul un candidat capable de transcender le clivage gauche-droite, comme ce fut le cas d’EM, peut être élu.
    SR a un peu ce profil, et c’est pourquoi elle se voit à juste titre pousser des ailes, d’autant plus qu’elle a déjà été candidate et qu’elle avait effectué un bon score. En outre, elle est une femme et cela peut être aujourd’hui perçu comme un atout, non seulement parce qu’il serait temps qu’une femme soit élue PR, mais aussi à cause du climat de violence larvée dans lequel se trouve actuellement le pays.
    Gerad Larcher a nettement moins d’atouts à mon avis. Il est beaucoup plus inféodé à un camp et il semble, peut-être à tort, préoccupé davantage par l’intérêt du Sénat (si n’est des sénateurs) que par celui du pays. Il a en outre montré ses insuffisances lors de la campagne présidentielle de 2017 à l’occasion de laquelle il s’est révélé incapable d’imposer un candidat de substitution lorsqu’il est apparu que celui qui avait été désigné dans le cadre des primaires n’etait pas présentable.

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    • Janus dit :

      Comment un être sensé peut-il faire le panégyrique de cette femme qui a démontré durant toute sa carrière , essentiellement due a ses relations avec le 1er secrétaire du PS , son incompétence crasse, son caractère de forcenée, son indifférence aux réalités et son mépris des règles ? Ce commentaire démontre s’il en était besoin que tout est possible en France et notamment le pire !
      S’il n’y a pas d’autre compétiteur que cette donzelle, pauvre de nous…

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    • Le commentaire de Carlo nous rappelle que des personnes sont prêtes à voter Ségolène Royal si elle se présente. Cela peut paraître insensé mais c’est une réalité. Comme des personnes re voteraient François Fillon , Nicolas Sarkozy, François Hollande s’ils se représentaient. Et les autres raisons de voter SR que donnent Carlo me semblent « justes ». Je profite de mon commentaire d’aujourd’hui pour ajouter quelques remarques de plus et poser quelques questions. Je pense que dans les prochaines élections présidentielles françaises il pourrait bien y avoir des interventions visibles ou invisibles des USA, de la Russie, de l’Iran. Pourquoi l’école Sciences Po s’appelle SP? Comment dois-je l’écrire? Science politique? Sciences et politique? Merci par avance de vos réponses.

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    • carlo dit :

      Merci Lugardon.
      C’est exactement ce que je voulais dire.

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  4. Pierre-Jean dit :

    Le blog de Maxime Tandonnet, tant par les billets de ce dernier que par les messages des participants, considère favorablement les idées gaullistes. Dans ces conditions, je m’étonne qu’il ne soit absolument jamais évoqué cette personnalité politique qu’est François Asselineau. Cela s’expliquerait-il par un tropisme de ce blog assez tourné vers le parti Les Républicains quand même ?

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    • carlo dit :

      Il est certain que François Asselineau serait un bon choix et correspondrait assez bien à cette figure du sage au-dessus de la mêlée qu’avait dessinée Maxime Tandonnet dans un précédent billet.
      Le problème est qu’il n’a aucune chance d’être élu, d’une part parce qu’il manque de notoriété et d’autre part parce que son image est trop associée à celle du Frexit.

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    • Pierre-Jean dit :

      @Carlo,
      Une notoriété se construit pas à pas, pierre par pierre, et celle de François Asselineau progresse, pas si lentement que cela et très sûrement. Quant au frexit, ce n’est évidemment pas un problème pour François Asselineau, puisque c’est l’un des fondements de son programme. Pour ce qui est des citoyens, je vous retourne l’objection Carlo : en quoi le frexit serait-il un « problème », puisqu’il faudrait quand même finir par se demander s’il ne serait pas une solution aux problèmes que Maxime Tandonnet pointe régulièrement dans ses billets. Il semblerait bien que de l’autre côté de la Manche on tienne ce raisonnement. Sans vouloir vous offenser Carlo, ne serait-il pas temps de s’extraire de ce que j’ai appelé le « tropisme Les Républicains » ?

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    • carlo dit :

      @ Pierre-Jean
      « En quoi le frexit serait-il un « problème », puisqu’il faudrait quand même finir par se demander s’il ne serait pas une solution aux problèmes que Maxime Tandonnet pointe régulièrement dans ses billets.  »
      Je crains que vous ne m’ayez mal compris Pierre-Jean. Je crois simplement que, vu l’état actuel de l’opinion, un candidat du Frexit n’aurait aucune chance de l’emporter. MLP l’a d’ailleurs bien compris, et c’est pourquoi elle ne parle même plus de sortir de l’euro.
      Ceci explique aussi les difficultés de F Philippot dans les sondages, malgré sa notoriété.
      Il me semble donc préférable de favoriser la candidature rassembleuse d’un sage eurosceptique, comme HG, HV ou JPC, dont le discours pourrait finir par provoquer, pendant son mandat, une prise de conscience et un retournement de l’opinion sur cette question, fondamentale, de l’UE.

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    • Ce qui handicape aussi François Asselineau c’est le fait d’être un haut fonctionnaire, un brillant énarque. Il y a des électeurs que ça révulse. Il a une solide culture historique aussi. Je regarde régulièrement ses vidéos. J’ai fait beaucoup d’échanges avec un candidat local du parti qu’il a créé.

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    • Pierre-Jean dit :

      @Carlo,
      Cette fois j’ai bien compris votre position. Merci de m’avoir éclairé.

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    • carlo dit :

      @ André Lugardon
      « Ce qui handicape aussi François Asselineau c’est le fait d’être un haut fonctionnaire ».
      C’est vrai, et les eurosceptiques auxquels avait pensé MT, à savoir Henri Guaino, Hubert Védrine et Jean-Pierre Chevènement, ont un peu le même profil, malheureusement.

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    • Pierre-Jean dit :

      @André Lugardon,
      Je ne suis pas d’accord avec vous. Quand les gens « sentent » qu’en face d’eux il y a quelqu’un de consistant et qui a du fond, ils lui font assez spontanément confiance : et cela que l’on soit énarque ou pas. Ce point est d’ailleurs intéressant car François Asselineau est, comme Emmanuel Macron, inspecteur des finances. Simplement le premier sait réfléchir et penser, si nécessaire en dehors des schémas préétablis, tandis que le second n’a qu’un vernis faisant de moins en moins illusion, qu’il s’est contenté d’apprendre scolairement dans ses cours d’économie à Sciences Po.

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    • carlo dit :

      @ Pierre-Jean
       » Quand les gens « sentent » qu’en face d’eux il y a quelqu’un de consistant et qui a du fond, ils lui font assez spontanément confiance : et cela que l’on soit énarque ou pas »
      C’est vrai, mais le climat anti-élites actuel ne favorise malheureusement pas l’émergence de personnalités comme la sienne. Le fait d’être un haut fonctionnaire, ou même simplement d’être cultivé, voire de donner l’impression de l’être, est devenu un handicap.
      Les sages eurosceptiques ( HG, JPC, HV) auxquels avait pensé MT sont hélas un peu dans le même cas.

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    • @Pierre-Jean, merci de votre commentaire. Et je suis tout à fait d’accord que vous ne soyez pas d’accord avec moi. Je vais essayer d’être plus clair. Les vidéos de François Asselineau sont beaucoup regardées et sont je me répète intéressantes et riches de sens et de contenus. Je remarque que les radios, les télés, les journaux l’invitent peu et quand il est invité lui laissent peu de temps et d’espace pour s’exprimer. Il ne « décolle » pas électoralement. Peut-il y avoir aujourd’hui un courant politique gaulliste sans De Gaulle? Sur la situation présente de notre pays je la perçois comme nouvelle et sans précédent historique. Il y a un mécontentement général et de nombreuses luttes qui durent mais il n’y a pas convergence de ces luttes. Ce qui permet pour le moment à Emmanuel Macron de rester en place. Chacun monte au combat en ordre dispersé. Je le regrette et je reconnais que je ne suis pas assez charismatique pour qu’il en soit autrement.

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  5. pier21 dit :

    On commence à s’agiter dans la médiasphère des conséquences de la réforme des retraites sur la présidentielle car chacun sait que Macron n’a qu’un objectif, se faire réélire, le reste il s’en tape!
    Or la situation est simplissime:
    Au début…et à la fin il y a la CONSTITUTION !
    Tournez le problème comme vous le voulez, l’élection présidentielle se joue en 2 tours!
    Les 2 hypothèses les plus probables sont au 1er tour Macron 1er ou 2d, Marine 2de ou 1ère!
    Certes il y bien les Insoumis, mais voyez-vous Méluche 2d, et ne parlons pas de Quatrenens ou encore moins de Ruffin?
    Bien qu’il m’en coûte je ne vois pas non plus ni Bertrand, ni Pécresse, encore moins Larcher, ni même Baroin au 2d tour!
    Au 2d tour donc, on rejouera 2017, sauf (et tout dépendra du degré de détestation de Macron) à ce que se soit le TSM (Tout Sauf M.)et que l’électeur, surtout si on le lui souffle, se dise: » Votons Marine pour éliminer le « Président des riches » ou du « en même temps. On rebattra les cartes lors des législatives ».
    Ce serait alors la défaite du parti de la peur (peur de casseurs, peur de Martinez, peur des gochistes nihilistes) c’est à dire de la bourgeoisie qui avait donné une chambre introuvable au Général en juin 1968, rappelez-vous,…enfin si vous avez mon âge!
    Je me demande d’ailleurs si ce serait un si grand malheur car la Constitution permettrait de remettre les choses à l’endroit:
    le Président préside (Art.5)
    et le gouvernement, (issu d’une majorité parlementaire beaucoup plus représentative que les 2/3 de godillots élus par 1/5 des votants) gouverne (Art.20).
    Sans compter qu’avec l’épée de Damoclès de la dissolution (Art.12), la Présidente aurait la bâton pour les obliger à s’entendre!
    Qui vivra, verra!’

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