2020, l’année de la « table rase » (pour Atlantico)

Les faits peuvent sembler anecdotiques au regard de la crise sanitaire du covid 19 qui a balayé la planète. Pourtant, ils sont révélateurs d’une crise de la conscience qui ébranle le monde occidental, l’Europe et surtout notre pays, dans ses profondeurs. Et quand l’épidémie sera terminée ou sous contrôle, cette crise morale continuera à miner nos sociétés et les affaiblir.

Le 23 juin dernier, la statue de Colbert, l’ancien ministre de Louis XIV, a été taguée à Paris, au nom de la lutte contre le racisme et de la mémoire de l’esclavagisme. Pendant l’année, d’autres statues ont été dégradées au même motif, celles de Victor Schoelcher ou de Christophe Colomb à Philadelphie, de Churchill à Londres. Cette phobie nouvelle ne s’applique pas qu’aux statues mais aussi à la littérature. Ainsi l’œuvre d’Agata Christie les dix petits nègres a été rebaptisée en « ils étaient Dix ». Elle touche le cinéma : le Grand Rex déprogrammant sous la pression Autant en emporte le vent. Dans la même logique, les nouveaux dirigeants écologistes à Lyon ont fustigé le Tour de France et ceux de Bordeaux s’en sont pris au sapin de Noël. Les projets de supprimer les fêtes chrétiennes du calendrier sont du même acabit.

 A travers cette obsession de la table rase, chasse aux traces de l’histoire, deux phénomènes mentaux sont à l’œuvre. Le premier est idéologique. L’idée de supprimer les traces du passé qui dérange exprime à l’évidence un renouveau de l’esprit totalitaire : « Du passé faisons table rase », selon le titre de l’ouvrage de Stéphane Courtois. L’idée d’effacer la culture, l’histoire, pour engendrer un homme neuf, apuré de ses références morales, traditionnelles, intellectuelles, et le rendre parfaitement hors sol et malléable à merci, soumis au pouvoir, est au centre de tout projet révolutionnaire de droite ou de gauche. Les idéologies totalitaires ne sont pas mortes, elles se métamorphosent et rejaillissent sous d’autres formes.

Le second est le déclin de la culture et du niveau intellectuel. Tous les voyants sont au rouge.  Le niveau scolaire des élèves de cinquième d’aujourd’hui est équivalent à celui du CM2 en 1987 vient de révéler une étude. Le dernier classement PISA de l’OCDE, situe la France à la 23e place, pour la lecture, ou compréhension de textes écrits, reléguée à des années-lumière des pays asiatiques. Une autre étude internationale, réalisée sur les élèves de CM1 et des classes de 4e révèle la chute du niveau en mathématiques : avant-dernier rang dans l’OCDE. Ce vertigineux déclin a pour effet de désarmer les jeunes Français face au retour de la table rase. Colbert réduit à l’image d’un esclavagiste : il faut des décennies d’effondrement de l’enseignement de l’histoire pour en arriver là. De fait, le retour de l’instinct totalitaire se nourrit de la montée de l’ignorance.

Maxime TANDONNET

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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85 commentaires pour 2020, l’année de la « table rase » (pour Atlantico)

  1. EQUALIZER dit :

    2020, l’année de la « table rase » (pour Atlantico)

    Oui, 2021 mise en place de : « Le Communisme de Marché » -de l’utopie » marxiste à l’utopie mondialiste – essai.
    lire ou relire ce livre de Flora Montcorbier.

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  2. jfsadys dit :

    A l’approche de mes 70 ans je regarde le chemin de vie que j’ai parcouru. J’ai eu beaucoup de chance. Les crétins que j’ai croisés enfant, adolescent, jeune homme, adulte ont plutôt bien réussi dans la vie, certains ont même très bien réussi. J’en suis heureux pour eux. Et je me risque à affirmer aujourd’hui que les problèmes du monde et de notre pays ce n’est pas la crétinisation de masse et les migrants. Les crétins ne gouvernent pas notre pays ni le monde. Les migrants non plus. Le problème c’est que nous sommes gouvernés par des personnes très intelligentes et très cultivées. Et le fil conducteur depuis VGE est le même: en finir avec l’héritage gaullo-communiste. C’est à dire en finir avec la sécurité sociale, l’éducation nationale, les services publics, les grandes entreprises nationalisées, en finir avec les fonctionnaires, en finir avec l’Etat « protecteur » et régulateur des misères humaines. Et la méthode est toujours la même: tirer à boulets rouges sur l’Education Nationale, sur les services publics, sur les fonctionnaires, sur les entreprises nationalisées. Les guerres d’Afghanistan, d’Irak, de Libye, de Syrie ne s’expliquent pas par la crétinisation de masse ni pas les phénomènes migratoires. Elles ont été décidées et menées par des personnes intelligentes et cultivées. A quelques jours de 2021 je me pose une question: les Etats désunis d’Amérique, l’Arabie Saoudite et Israël vont-ils déclencher des opérations militaires contre l’Iran?

    Je ne sais pas si le lien ci-dessous peut s’ouvrir sans payer;

    https://www.academia.edu/35664607/LIRAN_DANS_LES_CRISES_DU_MOYEN_ORIENT?email_work_card=thumbnail

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  3. Georges dit :

    Un suicide occidental ou l’art d’hypothéquer l’avenir de sa descendance ,blanche s’entend.

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  4. Annick Danjou dit :

    https://www.lepoint.fr/invites-du-point/michele-cotta/cotta-presidentielle-2022-qui-peut-succeder-a-emmanuel-macron-26-12-2020-2407141_1595.php
    N’étant pas abonnée je ne peux lire l’article en entier mais les 187 commentaires sont très instructifs et il faut vraiment les lire.
    Michèle Cotta est une personne qui ne fait jamais de mal à personne, ses articles sont souvent insipides, tout le monde il est beau tout le monde il est gentil. Ce n’est pas une journaliste que j’admire. Ici ce sont les commentaires qui apportent beaucoup d’informations intéressantes.

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    • Annick Danjou, en effet, bien souvent, les commentaires sont plus intéressants que les articles…
      MT

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    • Freddie dit :

      Les commentaires fustigent le tout-à-l’Etat. Il y en a un qui fait remarquer que les entreprises où il a travaillé avaient des contrats avec l’État ou les collectivités. C’est ça le problème en France. Ça remonte à loin, tout le monde le sait et tout le monde est lié. Tout le monde râle et tout le monde demande des subventions. Inévitablement, il arrive que ceux qui sont à la tête de cette grosse machine développent un ego boursouflé.

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  5. Sganarelle dit :

    Nous sommes dans une totale révolution de notre civilisation , le malaise semble général . Les transitions trop rapides créent un dérèglement . Les générations se suivent sans se ressembler et les plus anciennes ont beaucoup plus de mal a s’adapter à la modernité que celles de leurs parents. La terre qui subit des changements climatiques avec en plus la prolifération des virus crée des bouleversements dans notre habitat et nos mœurs. Les migrations brassent les cultures. Beaucoup d’espèces devraient disparaître ou s’adapter. La nôtre n’échappera pas à la loi commune.
    Comment préparer les jeunes au monde qu’ils devront affronter? ..c’est le sujet de l’excellent roman de Françoise Chandernagor «  l’enfant des lumiéres » où la mère a l’aube de la révolution de 1789 oscille entre l’éducation reçue qu’elle transmettait suivant la coutume et celle d’un monde nouveau qu’elle ne peut qu’imaginer. Comment se préparer et préparer nos jeunes aux bouleversements qui s’annoncent ???

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  6. Coucou dit :

    Bonjour à vous tous,

    Pendant la pandémie, les délocalisations vers la Chine continuent, par Eric Verhaegh

    Macron et d’autres leaders européens ont souvent parlé de souveraineté et de reprise de contrôle au printemps. Mais l’UE devrait annoncer la conclusion d’un accord avec la Chine pour conforter le processus de délocalisation. Mais où on est-on ?

    Emmanuel Macron et les autres dirigeants européens avaient beaucoup parlé de souveraineté et de reprise de contrôle au printemps, notamment après le fiasco des masques. Mais chassez le naturel… L’Union européenne devrait annoncer de façon imminente la conclusion d’un accord commercial avec la Chine qui confortera le processus de délocalisation à l’œuvre depuis une vingtaine d’années. Cet accord est négocié en catimini sans aucune transparence vis-à-vis d’opinions publiques sous la menace d’un chômage dû à l’inconséquence chinoise. Où comment un scandale arrive.

    Ils sont incorrigibles ! Une fois de plus, les dirigeants européens (et surtout français !) sont pris la main dans le sac du mensonge éhonté. Car que n’avons-nous entendu, durant le mandat de Donald Trump, puis durant la pandémie, sur la nécessité d’abord de redonner vie à une alliance transatlantique à l’agonie, puis sur la nécessité de recouvrer la souveraineté européenne. Que n’avons-nous entendu, dans la bouche du président Macron, colportés ensuite par une presse subventionnée complaisante, sur les relocalisations industrielles, sur le retour des activités stratégiques en France, blabla, blabla, blabla ?

    Et hop ! Entre Noël et le Nouvel An, le quotidien de Bernard Arnault, Les Echos, nous apprend que la Commission Européenne s’apprête à signer un accord commercial avec la Chine, sur le modèle de celui que la même Chine a signé avec l’Australie. Comme par hasard, cet accord permettra de consolider l’inverse des annonces qui nous sont faites depuis plusieurs mois : les échanges commerciaux seront facilités, et nos industriels seront une fois de plus encouragés à délocaliser leur activité pour rendre l’Europe toujours plus dépendante de la grande manufacture chinoise.

    En savoir plus sur RT France : https://francais.rt.com/opinions/82251-pendant-pandemie-delocalisations-vers-chine-continuent

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  7. Trigwen dit :

    Malheureusement, ces méfaits sont le fruit du travail de sape de groupuscules extrémistes pour qui la liberté d’expression s’applique à ce qui les intéresse.
    On cède face aux hurlements de mouvements indigénistes qui ne connaissent rien de la véritable histoire de la colonisation, des indigénistes qui ne veulent pas reconnaitre que les premiers complices des esclavagistes étaient des Africains eux-mêmes qui vendaient des prisonniers de guerres tribales congre des armes ou autres produits.
    Les anciens soixante huitards ont fait de notre école un endroit qui n’a plus rien d’un lieu de savoir, d’apprentissage et de culture. Ces messieurs voudraient qu’on revoie l’Histoire à leur façon tout en continuant de nous excuser pour ce que nous avons fait jadis.
    Ils font ce vœu en omettant volontairement qu’il s’agissait d’une autre époque, de siècles où la morale n’était pas la même, les mœurs différentes et les Droits de l’Homme une idée totalement inexistante.
    Mais voilà, tous ces gens qui cassent notre Histoire, notre culture sont eux-mêmes des gens à qui il la culture fait grandement défaut sinon ils ne démoliraient pas notre école comme ils le font depuis des décennies.

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    • Trigween, oui, et la table rase est facilitée par la crétinisation.
      MT

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    • lehibou dit :

      Vous avez tapé en plein mille, Trigwen. Remplacer le primat du savoir objectif et factuel par l’instillation d’une idéologie clairement partiale et biaisée est le propre d’ESPRITS TOTALITAIRES.
      Un exemple proprement caricatural de ce type de comportement est celui de Jdanov (1896-1948), homme politique soviétique membre du Politburo et agent actif du stalinisme, Pour lui il existait deux sciences: la science bourgeoise et la science prolétarienne.

      Vous parlez aussi des droits de l’Homme. Cette idée a priori généreuse a effectivement été galvaudée au cours des décennies et érigée au rang d’une vraie religion. Et gare à ceux qui ne suivent pas aveuglément ses préceptes!
      Quant aux indigénistes, en plus d’être de parfaits idiots, ce sont avant tout des gens qui suintent la jalousie et la haine indicible de l’Occident, les deux étant évidemment liés.

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  8. Gil dit :

    Bonsoir

    Et ceux qu’on ne peut pas deculturer parce que trop vieux et de l’ancienne école donc capable de reconnaître le totalitarisme et de penser, on leur collera un vaccin dont on a aucune idée des véritables effets.

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  9. Janus dit :

    Les responsables de ce déclin vertigineux sont connus : les instituteurs et professeurs de collège et de Lycée. Sans leur adhésion aux couillonnades des pédagogistes, adhésion de plein gré pour beaucoup, indifférence pour la plupart, résistance impossible pour quelques uns, il n’ y aurait pas eu cette dégradation si rapide du niveau. Je l’ai vécu concrètement au moment de mai 1968. dans mon lycée, un professeur d’histoire sévère, rigide, mais excellent pédagogue a jeté sa blouse grise aux orties (Il n’en portait pas, veston cravate toujours…) pour courir derrière les délires du PSU de ce pauvre Rocard. Et du jour au lendemain, sa classe ou l’on apprenait l’histoire de très bonne manière, chronologique et complète est devenue une foire d’empoigne. Lui seul a été responsable de cette catastrophe et pourtant, c’était un très bon professeur, efficace, neutre dans ses cours et respecté.
    Il faut lire les articles de JP Brighelli et notamment celui-là dans Causeur : https://blog.causeur.fr/bonnetdane/voici-revenu-le-temps-des-assassins-de-lecole-003250
    Plus généralement, je conseille la lecture des billets de JP Brighelli, qui n’est pas de ma paroisse, mais qui est cultivé et sait faire partager ses enthousiasmes et ses détestations avec talent. Il a le courage de détester dans ce monde de castrats ou le moindre mot malsonnant peut vous mener en correctionnelle…
    Et dans nombre de ses billets, il a posé les problèmes de l’éducation nationale : Celle-ci a une constante : Les ministres passent, les enseignants restent. Quel que soit la catastrophe préparée par les réformes, ce sont les enseignants qui enseignent nos enfants et qui le font mal trop souvent.

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    • Annick Danjou dit :

      Brighelli est de Marseille, il sait donc de quoi il parle et ses articles sont souvent bien documentés. quant aux enseignants dont j’ai fait partie et mon mari aussi je vais dire comme Sganarelle il ne faut pas généraliser. Nous nous sommes battus tous les deux contre une hiérarchie et des collègues socialistes dans l’âme. Mais que faire quand on fait partie d’une minorité ?

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    • Janus, il y a aussi de nombreux professeurs qui sont vent debout contre la casse de l’intelligence.
      MT

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    • Janus dit :

      @ Annick Danjou et Maxime :Bien sûr, il y a eu de nombreux professionnels sérieux et efficaces, consternés par ce qu’ils voyaient et subissaient. Mais la majorité n’a pas démontré autre chose que son indifférence au sort des enfants et son intérêt musclé pour les vacances et les prérogatives du fonctionnaire. Ce qui était selon le mot de Brighelli un sacerdoce (et je souscrit à cette définition du métier d’enseignant) n’est plus pour la plupart qu’un métier de fonctionnaire.
      J’ai connu trop de mes camarades qui choisissaient cette voie par flemme et absence de sens du risque, mais sans aucune vocation. Je ne crois pas que les difficultés intrinsèques du métier d’instituteur ou de professeur puissent se supporter sans une réelle vocation.

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  10. cyril dit :

    votre clairvoyance, Maxime, m’a permis depuis quelques temps de m’ouvrir les yeux sur cette idéologie de la table rase qui paraît d’une grande dangerosité.

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