François et les « heures sombres de l’histoire »

Le Pape François, fustigeant « souverainisme » et « populisme », vient de déclarer au journal la Stampa: « On entend des discours qui ressemblent à ceux d’Hitler en 1934 ». Les Catholiques pratiquants n’apprécient généralement pas les commentaires critiques concernant les paroles du saint Père. En l’occurrence, les mots qu’ils tient sont de nature politique et historique, ne relèvent en rien du dogme couvert par l’infaillibilité pontificale.

Les comparaisons entre la période actuelle et l’apocalypse des années 1930 et 1940, devraient appeler, surtout de la part du chef de l’Eglise catholique, la plus grande prudence. Le contexte actuel, économique, politique, technologique, démographique planétaire, est sans rapport avec celui des heures sombres de cette époque. Certes, la démagogie extrémiste, de droite ou de gauche, est en plein essor, surtout en France. Mais faut-il rappeler au pape François ce que furent les persécutions raciales du nazisme, les entreprises d’extermination du stalinisme comme de l’hitlérisme, la centaine de millions de victimes de ces entreprises sanguinaires, le génocide des Juifs d’Europe (six millions de morts), la férocité des dictatures totalitaires, la conquête hitlérienne de l’Europe continentale, la Shoah par balles en Ukraine, la politique d’asservissement ou d’anéantissement des populations slaves, le pillage et les massacres commis en France et presque dans toute l’Europe continentale pendant une occupation de 4 années?

Le père Jorge Mario Bergoglio n’a pas connu cette période de déchaînement sanguinaire qui a entraîné l’Europe dans l’abîme, ou bien il était tout jeune enfant, et vivait à quelque 10 000 kilomètres de ces évènement. En revanche, il a vécu personnellement, en pleine force de l’âge, entre 40 et 47 ans, d’autres évènements tragiques, d’autres heures sombres: la dictature Argentine du général Videla, de 1976 à 1983. Ce régime militaire s’inspirait des méthodes fascistes et nazie qui ont ensanglanté l’Europe: dizaines de milliers de disparus, femmes et enfants massacrés, torture et exécutions de masse, meurtre ou emprisonnement des opposants politiques, disparition des libertés publiques.

Alors, pourquoi François, dans sa quête de comparaisons explosives, destinées à marquer l’opinion sur la détestation que lui inspire certaines politiques actuelles, notamment sur la question de la maîtrise des migrations, invoque-t-il  les « heures sombres » européennes qu’il n’a pas connues, mais demeure-t-il silencieux, sur d’autres heures sombres plus récentes, d’autres abominations, une autre dictature et d’autres terreurs et d’autres atrocité qu’il a vécues lui-même, en personne, de tout près, en Argentine, son pays d’origine? D’ailleurs, nul ne saurait douter un instant que ce héraut planétaire des droits de l’homme, porte-parole de la conscience universelle, alors haut placé dans la hiérarchie catholique de son pays, a exercé un rôle pilote, exemplaire et incontestable à la tête de la résistance à la dictature argentine, ce régime tortionnaire, au péril de sa vie pendant 7 ans. Dommage qu’il n’en parle pas car son expérience personnelle de cette période (un sujet quelque peu tabou), serait riche en enseignements, serait de nature à illustrer son propos et à servir d’exemple aux jeunes générations. 

Maxime TANDONNET

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
Cet article a été publié dans Uncategorized. Ajoutez ce permalien à vos favoris.

60 commentaires pour François et les « heures sombres de l’histoire »

  1. Citoyen dit :

    De mémoire d’homme, ce pape est la pire engeance que le Vatican ait eu à supporter … une erreur flagrante de casting …
    Même les chrétiens (au moins les européens), pour bon nombre d’entre eux, ne s’y retrouvent pas.
    Probablement que la promiscuité avec la dictature en Argentine, lui aura développé (à son insu ?) des réflexes gauchistes, qui sont incompatible avec les souhaits des européens en matière de pape. En cela il ressemble quelque peu à macron : une erreur de casting …

    J’aime

  2. André Lugardon dit :

    Pour les plus anciens d’entre nous ce qui se passe en Irak, Syrie, Libye rappelle la guerre d’Espagne. Nous assistons impuissants et dépassés par les événements à une succession de Guernica, à un désastre moral et humain.

    « Arrivée la guerre le diable agrandit son enfer. »

    Nul ne sait plus vraiment de quoi demain sera fait. Probablement d’encore beaucoup de sang et de larmes.

    Et puis parfois surgissent des nouvelles inattendues: Boris Johnson dit qu’il étudie la possibilité de régulariser la situation de 500 000 sans papier à Londres, Guillaume Larrivé dit qu’il faut construire des villes d’accueil pour les migrants de l’autre côté de notre mer méditerranée.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume_Larriv%C3%A9

    L’Italie et la Grèce affirment haut et fort que ce n’est pas à eux d’accueillir toute la misère du Monde. Probablement que d’autres finiront par le dire aussi. Qui pourrait les en blâmer?

    L’Histoire est en marche!

    « Vous avez voulu éviter la guerre au prix du déshonneur. Vous avez le déshonneur et vous aurez la guerre. » Winston Churchill.

    Dira-t-on un jour la même chose pour les migrants?

    J’aime

  3. Drareg dit :

    Le contraste est pourtant saisissant :

    La France d’avant, étatiste et dirigiste, grâce à laquelle nous avons la chance que des choses fonctionnent encore ; et la France d’après, lobbys, médias, économistes à la noix et réformateurs plus ou moins européistes, qui est en train de tout détraquer.

    Quand on pense qu’on trouve encore des gens pour nier le tournant néolibéral et ses conséquences, avec des arguties maintes fois démontées sur un prétendu excès de dépenses publiques…

    Ce sont pourtant des choses fondamentales.

    J’aime

    • Drareg, pour tout vous dire, votre mélange de suffisance (je sais tout sans le moindre doute), et de style café du commerce ne me donne pas vraiment envie d’essayer de vous répondre sur le fond. Ce n’est pas la peine de m’inonder de vos commentaires pour dire la même chose, un seul suffirait amplement pour exprimer votre opinion.
      MT

      J’aime

    • Drareg dit :

      Si vous ne me répondez pas sur le fond, c’est plutôt parce que la position de votre parti est indéfendable.

      En tout cas, (et pour tout vous dire), cela vous va mal de m’accuser d’un style café du commerce, qui s’appliquerait bien mieux à votre (seul) argument, les fameux 57%, que vous pourrez en effet trouver à tous les comptoirs avinés de France et de Navarre.

      Et pourtant, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à de nombreuses reprises, toutefois nettement moins nombreuses que votre utilisation de cet argument, ce chiffre n’a pas le moindre sens, et la comparaison de pays à périmètre différent relève de l’enfumage.

      Enfumage dont les électeurs se doutent bien, ce qui vous conduit aux 8% des dernières élections. Surtout continuez, et ne vous remettez pas en cause…

      J’aime

    • Drareg dit :

      Dans votre réponse, vous m’accusez également de suffisance ; voilà ce que cela m’inspire.

      1) est-il possible que vous ayez une connaissance personnelle et approfondie de tous les sujets que vous abordez ? Il me semble que non, par manque de temps. Donc, vous vous basez sur des informations et idées qui circulent dans votre milieu professionnel.

      2) Ce milieu professionnel est-il infaillible ? Pour le savoir, regardons un exemple.
      Vous indiquez régulièrement que le niveau scolaire est en baisse. Or, ceux qui connaissent ce secteur mettent en cause les réformes appliquées :

      et ces réformes sont conçues par vos homologues au MEN (recrutement en partie semblable au vôtre) et au MEFI (recrutement semblable au vôtre).
      Contestez-vous que ce soient de mauvaises réformes qui soient à l’origine de ce qui vous y inquiète ? Mais, dans ce cas, est-ce que cela ne signifie pas que ce sont vos homologues qui se sont fourvoyés ? Et, s’ils se sont trompés là-bas, ne peuvent-ils se tromper ailleurs ?

      3) Sur votre sujet de prédilection, nul ne niera que vous soyez un des plus compétents dans la connaissance du droit de l’immigration, et de la connaissance des moyens concrets d’action du MI dans ce domaine.
      Mais, justement, cela concerne la partie moyens, qui est différente de la partie but. La partie but est ouverte à discussion, or en dépit de vos billets comparant ceux qui veulent restreindre plus fortement l’immigration à ceux qui ont construit le mur de l’Atlantique, votre proposition d’immigration raisonnable risque en pratique de renforcer ces phénomènes :

      donc là aussi vous devriez vous demander si vous ne devriez pas vous rapprocher de vos adversaires.

      J’aime

  4. Drareg dit :

    @P. Dubois et M. Tandonnet

    Les pages Débats du Figaro d’hier comportaient les deux articles suivants :

    http://www.lefigaro.fr/vox/societe/climat-l-argument-reve-pour-les-partisans-de-l-etatisme-qui-retrouvent-leur-aplomb-20190812

    http://www.lefigaro.fr/vox/histoire/le-prince-de-lampedusa-a-palerme-un-conservateur-eclaire-20190812

    Si on y réfléchit un peu, on se rend compte que le deuxième article n’est pas très gentil pour l’auteur du premier article (ou pour ceux qui pensent comme lui).

    Et, si on y réfléchit un peu plus, on se dit que l’auteur du premier article (ou ceux qui pensent comme lui) n’auront pas volé les qualificatifs que leur applique le deuxième article.

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.