La vague

Je regarde, j’écoute, je lis… La vague qui déferle sur la France me laisse pantois. Soudain, tout est beau, tout est gentil, tout est neuf. Le clivage droite gauche est dépassé, un monde nouveau est en train de s’ouvrir, une ère nouvelle d’extase, d’euphorie, de bonheur, de gentillesse vient de s’ouvrir sur la France. Et surtout, il est formellement interdit de s’interroger, de se poser des questions. Ceux qui doutent sont voués aux gémonies: les mots de « vieux », ringard, pessimiste, jaloux, grincheux se substituent à celui de réactionnaire. La révolution avance et ceux qui ne suivent pas sont à jeter. Les vieux repères s’effondrent, la table rase est en route, un monde nouveau commence.  S’interroger, marquer un quelconque scepticisme, un doute, même discret, devient acte de ringardisme. L’idée même de songer à réfléchir et critiquer devient passéiste, presque honteuse, morbide. Voilà, par exemple, ce qu’il ne faut surtout pas dire:

1) Mettre en place une grande force à connotation centriste destinée à absorber « la droite et la gauche » ouvre un boulevard aux extrémismes, de droite comme de gauche dans la perspective de 2022.

2) L’idée de créer une grande force centriste dominant la scène politique n’a strictement rien de nouveau: elle renvoie aux radicaux dans les années 1920-1930, et à la troisième force » de 1947 à 1951, des époques qui n’ont pas laissé un souvenir franchement positif.

3) Tout ce à quoi on assiste aujourd’hui n’a rien de vraiment nouveau : débauchages politiciens, copinage, culte de la personnalité sans limites, unanimisme médiatique, magouilles politiciennes. Le vivier reste le même et le renouvellement recèle de nombreux recyclages.

4) Le nouveau pouvoir, par delà l’apparence de la modernité, n’apporte guère de changement sur le fond des projets et des politiques du passé. Voilà, tout est dans le culte de l’apparence, du clinquant, du grand spectacle, de l’immédiat. Un bel éclat pour masquer le néant. Et le fond des choses, le politique, qui aurait l’idée saugrenue, ringarde, de s’y intéresser?

L’euphorie du jour, le prodigieux, vertigineux unanimisme médiatique, comme toutes les béatitudes, recèle des pièges, des dangers, des déceptions inévitables, peut-être de nouveaux abîmes. Mais surtout, ne pas le dire, ne pas le penser, ne pas le sentir, ne pas gâcher la fête joyeuse. Jubiler comme tout le monde, ou se taire…

Maxime TANDONNET

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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44 commentaires pour La vague

  1. raimanet dit :

    A reblogué ceci sur Boycottet a ajouté:
    http://tiny.ph/uZTX ->

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  2. pier212 dit :

    Nous cherchons le « Claudel nouveau » qui donnera une suite à « l’Ode au Maréchal », que le poète avait fait suivre 4 ans plus tard, en un tourne-veste magistral, de « l’Ode au Généra »l: « l’Ode au « Président… en marche » .
    Vers quoi? Les poètes sont les yeux de l’avenir dit-on, alors à vos plumes!

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  3. Jean- Louis Michelet dit :

    Sans risque.
    Qu ‘il est facile d’ être Macroniste aujourd’hui.
    Qu ‘il est facile facile d’ emmener dans son sillage une majorité de ceux qui vont bien, de ceux qui peuvent se projetter dans l’avenir, dans l’Europe et dans le monde.
    Qu ‘il est facile d’ être le Président de cette fraction du peuple français.
    Qu ‘il est facile de surfer sur la vague d’ un progressisme affiché ( effacé le progrès social)
    On peut même se poser cette question : ont-ils vraiment besoin d’un président ?
    ( bien sûr, exceptés ceux et celles qui sont aux premières loges)
    Bref, ceux qui auraient dû avoir un Président ne l’ont pas eu.
    Rien de surprenant.
    L’histoire, elle, continue.

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  4. Annick dit :

    Bonsoir Maxime,

    Les « Cassandre » ont toujours tort aux yeux des béats manipulés.

    La pluralité étant essentielle à la démocratie, cet acharnement à vouloir un parti unique n’est guère rassurant. D’autant que la légitimité de l’élu est faible, très faible, juste 17% des inscrits, score du 1er tour qui, seul, donne la véritable adhésion.

    Son programme n’est donc plébiscité que par une petite minorité des Français, et le tintamarre des médias n’y change rien. Leurs caquètements incessants nous saoulent.
    Le poids de sa popularité a laissé les Champs Élysées biens vides lors de son investiture. Où est l’enthousiasme du peuple Français ?

    Épatant aussi le chœur de tous ceux qui, n’hésitant pas à dévier et falsifier le résultat de cette élection, brament partout que la France a choisi l’EU et l’euro.

    Je sais bien que Frederic-N soutient ici sans faiblir cette monnaie idéologique, mais peut-être pourrait-il réviser ses cours de monétarisme et d’économie ou, plus simplement, faire le bilan économique des pays qui l’ont adopté et reconnaître que les divergences se font de plus en plus grandes entre eux, sans que rien ne puisse arrêter la chute des uns et l’envolée des autres.

    Bien avant l’adoption de l’Euro Ch. Gave avait parfaitement analysé ce qui est en train de se passer, et prévenu que nous courions droit dans le mur. Encore une Cassandre, ignorée.
    Alors allons-y ! toujours plus loin, et plus dure sera la chute.
    Étant bien entendu que cette monnaie non-adaptée n’empêche pas que nous fassions les réformes structurelles absolument nécessaires, dont la remise en cause du périmètre de l’État est un des sujets essentiels parmi une foultitude d’autres que nous évoquons souvent ici. Mais, ce travail effectué, restera l’épine Euro qui continuera d’entraver la bonne gestion, quels que soient les efforts fournis.
    Les politiques pieusement dites « non-conventionnelles » de la BCE, les tergiversations de Draghi pour essayer d’ajuster et d’équilibrer, sans jamais y réussir – sauf dans la montée des dégâts, sont une cause supplémentaire pour se pencher et étudier sans tarder comment remédier à cette erreur fondamentale qui répand la pauvreté, et bientôt la misère.

    Petit aperçu de ce que donne cette gestion sur la masse monétaire : M1-M2 enflent, réflexe tout
    à fait normal dans une telle conjoncture voulue et soutenue par la plupart de nos « Oints du Seigneur »:
    http://chevallier.biz/2017/05/masse-monetaire-libre-et-croissance-2/

    Bref, nous attendrons encore longtemps un vrai changement des mentalités et des actions.
    D’autant plus que le « maître des horloges » nous fait la démonstration qu’il est incapable de maîtriser le rythme, donc le temps. Soit il court, soit il traîne, mais ne saisit jamais le rythme juste, et c’est bien embêtant pour la suite.
    Il devrait s’entraîner à sauter à la corde ; il saute un temps en avance, ou un temps en retard, la corde le frappe, ou le fait tomber.

    Amicalement,

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    • Annick, l’impact du conditionnement médiatique, nous le verrons aux législatives.
      MT

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    • hugues dit :

      Le problème de JP Chevalier est qu’il compare deux systèmes monétaires et bancaires qui sont difficilement comparables.

      Le système bancaire des USA est très libéral alors que celui de l’Europe est très loin de l’être: en Europe le système bancaire, celui des grosses banques systémiques, est intiment lié au financement des Etats: ce sont ces grosses banques systémiques qui achètent massivement la dette des Etats et ce sont les Etats qui garantissent les dépôts bancaires. Rien de tel aux USA. La plupart des banques systémiques européennes auraient déjà fait faillite selon le critère des Reaganomics comme Leman brothers en son temps. Il faut savoir que la pire des banques systémique européenne, selon les critères des Reaganomics, est la Deutsch Bank !! Mais s’attaquer à la DB c’est s’attaquer à l’Allemagne (les USA, eux, ne sont pas venu au secours de LB !!) . Il y a eu quelques tentatives ces dernières années mais toutes ont été vouées à l’échec.

      Bien sûr JP Chevallier a raison, le système bancaire Européen est beaucoup trop centralisé, les banques ne se font pas confiance entre elles et préfèrent deposer leurs liquidités à la BCE (surtout depuis la crise de 2008) plutôt que de se prêter en elles. Cela limite la vélocité de la monnaie et contribue à une moindre croissance.

      D’un autre coté, ce différentiel de croissance peut être gagné autrement que par des jeux monétaires et bancaires, en particulier en augmentant la compétitivité de nos entreprises par l’innovation et l’investissement: l’Allemagne réussit magistralement sur ce plan, l’Europe dans son ensemble aussi d’ailleurs où la compétitivité des entreprises est bien meilleure qu’aux USA: et c’est d’ailleurs ce que nous reproche Trump car le QE européen fait baisser l’euro face au dollar !!

      JP Chevallier pense que la coexistence de ces deux systèmes (liberal du dollar et étatiste de l’euro) n’est pas viable à long terme. Jusqu’à présent la BCE et la FED ont toujours coopéré à stabiliser les deux systèmes (éclatement des bulles quand les déséquilibres sont trop flagrants): il est vrai que si les USA décident de saborder cette coopération, ils peuvent le faire mais ce serait considéré comme une vrai déclaration de guerre contre l’Europe et d’autres acteurs comme le Japon, la Chine et les Brics s’en mêleraient: le risque que les USA arrivent à coaliser le Japon, la Chine et les Brics contre l’Euro me parait faible, aujourd’hui je ne vois pas comment les USA arriveraient les convaincre à entamer une telle guerre: cela n’est absolument pas dans leurs intérêts que le dollar soit trop omnipotent, bien au contraire !!

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