« La société bienveillante »

téléchargementLa lecture de la motion A du parti socialiste, majoritaire, celle qui soutient le gouvernement est passionnante: un long sermon d’une douzaine de pages qui débouche en conclusion sur un nouveau concept fondateur: celui de « société bienveillante »: « Et au-delà des valeurs durables du socialisme, l’égalité sans laquelle il n’y a pas de liberté, la laïcité, l’internationalisme, le féminisme, le progrès social et écologique, la nouvelle social-démocratie doit porter l’idée d’une société bienveillante. Une société bienveillante, c’est une société de droits et de devoirs, à la fois attentive à chacun et demandant à chacun d’être attentif aux autres : le respect des règles, bien sûr, le sens des limites, aussi, face à tous les extrémismes et à tous les obscurantismes, mais également le goût du commun, du partage, le soin des autres, l’attention aux générations futures. Donner un sens à l’action pour le pays, mettre de l’engagement dans chacune de nos vies, bâtir du commun, voilà qui donnera une force nouvelle à la France. » En guise de programme et de mesures concrètes pour combattre le chômage, l’insécurité, le risque terroriste, le déclin économique, la crise de l’éducation, les tensions identitaires, le parti socialiste propose une formule: la société bienveillante. La société bonne, gentille, aimable, se voit érigée en principe de gouvernement, en fondement d’une politique. Evidemment, la bonté, la gentillesse, l’ouverture, l’amour du prochain sont surtout de façade, un principe de communication qui n’empêche pas de haïr, vomir une « droite » coupable de tous les maux. En tout cas, ce document qui émane du parti à la tête du gouvernement est révélateur de la vision actuelle du pouvoir, de nature abstraite, moralisatrice et incantatoire, détachée des  réalités, du vécu quotidien, négation de la politique au sens noble poussée  son paroxysme. L’expression de la « bienveillance » dont le parti se réclame désormais s’adosse à son antithèse, citée plusieurs fois dans le texte, « l’extrême droite réactionnaire ». Le « bien » ne se conçoit que par l’existence du « mal » et afin d’assurer la promotion de ce dernier, une dose de « proportionnelle » aux législatives et l’éternel serpent de mer depuis 1981 du « vote des étrangers » sont annoncés. Pour exister malgré le néant, rien ne vaut une bonne dose de repoussoir « fasciste ». Que resterait-il du parti socialiste, d’ailleurs, sans la menace fasciste qui comme chacun sait, pèse sur la France? Le parti socialiste, à l’image de la classe politique française dans son ensemble d’ailleurs, a quelque chose d’une fuite en avant dans  le rêve, un univers mental où le bien pur qu’il incarne s’affronte au mal réactionnaire, où règnent les mots creux, d’une bulle de savon  qui ne cesse de dériver et de s’éloigner du monde réel, celui des « gens », de la population, de la majorité silencieuse. Gouverner ce n’est pas choisir, décider, agir. Gouverner c’est paraître.

 Maxime TANDONNET

A propos maximetandonnet

Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d'histoire...
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37 commentaires pour « La société bienveillante »

  1. Mich dit :

    Plutot que moralisme, je devrai aussi dire et surtout, manichéisme.

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  2. Mich dit :

    J’ai bien rigolé à la lecture….On croirait à une blague…C’est d’une infantilisation cette motion.
    Les socialistes sont bloqués dans un antropocentrisme et un moralisme qui procèdent d’une infantilisation de l’esprit.
    C’est la maladie du siècle… Notre civilisation va peut être en mourir.

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  3. François dit :

    Connaissez-vous Jean Lartéguy ? Dans Les Centurions, il écrivait :
    « Je t’en prie, rassure-moi au plus vite et dis-moi que nos concitoyens nous comprennent, nous soutiennent, nous protègent comme nous protégeons nous-mêmes la grandeur de l’Empire. S’il devait en être autrement, si nous devions laisser en vain nos os blanchir sur les pistes du désert, alors, que l’on prenne garde à la colère des Légions ! »

    C’était un dialogue imaginaire entre un centurion de la 2e cohorte de la légion Augusta à son cousin Tertullus à Rome. Méfiez-vous ! Je ne suis pas loin de basculer et de prendre les armes, non pour renverser la République, mais pour sauver ce qui peut l’être encore. La crainte de mourir a fait partie de ma vie, un peu plus, un peu moins, quelle importance ? J’ai payé l’impôt du sang, comme plein de mes camarades. Cela ne me donne aucun droit, que des devoirs ! Où est-il mon devoir ? Défendre un État qui ne sait même pas où il erre, un État qui fait fi de tous les principes démocratiques ? Est-ce pour cela que nous avons risqué notre peau ?

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  4. Tracy LA ROSIÈRE dit :

    Réponse à Tygrys
    Bien compris votre remarque mais les gens de cette caste donnent trop souvent  » le mauvais exemple. C’est une « élite ». Ils ont atteint « l’excellence ». Ils ont un niveau de vie qui les met, en général, à l’abri de tentations malveillantes, malhonnêtes, corruptrices. On peut dire qu’ils sont « privilégiés ». Ils doivent être irréprochables. Et ceux qui ne le sont pas doivent être impitoyablement sanctionnés, faute de quoi, le peuple, les « sans-dents », n’a plus de repères, ne sait plus à qui se vouer, qui croire… Or, force est de constater qu’il n’en est pas ainsi. Lorsqu’on évoque le cas de cette femme recasée et qu’on le compare au sort d’un sdf condamné, en juillet 2014, à quatre mois de prison ferme pour avoir volé 12,70€ dans le tronc de la cathédrale de Strasbourg afin de se nourrir (Libération – 29/07/2014), tout est dit et qu’on ne s’étonne surtout pas des scores du FN ! Cordialement.
    Tracy LA ROSIÈRE.

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  5. Tygrys dit :

    # Tracy: ce que vous dénoncez est absolument scandaleux et comme Maxime, j’ai honte. Mais je ne crois pas qu’il faille accuser l’ENA. C’est une question bien plus large et qui n’est pas fondamentalement liée à cette école. Supprimez-la, et ce sera sans doute bien pire.

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